tw: alcool, drogue, décès, deuil.Il n’aimait pas spécialement les églises, Bashir. Peut-être parce qu’il avait toujours eu le cul entre deux chaises. Dans la famille de son père c’était plus l’église, même s’ils n’étaient pas plus pratiquant que ça et du côté de sa mère, c’était plutôt la mosquée. Il était fier de ses racines, Bashir, aimait l’idée d’être le mélange de deux cultures. Ses parents étaient la preuve qu’on pouvait s’aimer malgré les différences et ce même si le mariage n’avait pas tenu bien longtemps. Lui, il ne s’était dirigé vers aucune des deux religions, bien qu’il chérissait les deux cultures desquelles il était issu. Ça ne l’intéressait pas et globalement il avait toujours trouvé les églises austères. Il se dégageait un truc, de ses bâtiments qui avait tendance à le mettre mal à l’aise. Mais c’était là-bas que se réunissait le groupe qu’il avait rejoint. Pourtant, on n’y parlait pas de religion. Heureusement. Ce n’était pas pour ça qu’ils étaient là, tous ces gens qui avaient choisi de se réunir. C’était le deuil qui réunissait ces gens. Pas le truc le plus joyeux qui soit, bien au contraire. Lui, c’était son psy qui l’avait dirigé vers ce groupe, en pensant que ça pouvait l’aider. Pendant un temps, il y avait cru, Bashir. Il avait cru y avoir rencontré
la bonne personne, celle qui l’aiderait à tourner la page, mais il s’était trompé.
Elcmar l’avait trahi plus qu’il l’avait aidé. Il lui avait menti pendant des mois et c’était une chose qu’il ne pouvait pas accepter, Bashir. Il détestait l’idée qu’il se soit servi de lui pour apaiser un peu sa culpabilité. Il n’avait rien fait quand Tahira était morte et maintenant, il jugeait bon de venir dans ses pattes à lui, comme si ça allait changer quelque chose. C’était plus fort que lui, il détestait chacune des personnes présentes à cette soirée, parce que personne n’avait rien fait pour sa sœur. On avait beau lui dire qu’elle était responsable de ses propres choix, ça ne suffisait pas. Il n’y avait rien qui apaisait vraiment sa peine et sa colère, de toute façon. La drogue et l’alcool avaient mis tout ça en sommeil pendant un temps, mais ça n’avait rien fait disparaître. Il avait arrêté toute cette merde et maintenant, il fallait bien lutter autrement contre ce qu’il ressentait. Le psy, le groupe de parole. Moins efficace d’après lui, mais plus sain. Il était persuadé que ce serait plus efficace si Elcmar ne squattait pas
son groupe pour parler d’un deuil qu’il ne traversait même pas. Ça l’enrageait qu’il soit soit et au final, il ne pensait qu’à ça. Il avait passé la réunion à se ronger les ongles, à se taire en essayant de garder sa rage pour lui. Il n’avait qu’une hâte, c’était que ça se termine, qu’il puisse prendre la fuite. Il regrettait de ne pas s’être barré en voyant le brun se pointer dans la salle. Il ne devait rien à personne, aurait pu partir avant que la réunion ne commence. Se sentait un peu trop mal à l’idée de partir en plein milieu, alors maintenant pas le choix, fallait tenir jusqu’au bout. Il se leva bien vite quand tout fut fini. Quitta l’église sans s’attarder, avait besoin de retrouver sa liberté et surtout, de s’éloigner. Mais il fallait croire qu’Elcmar en avait décidé autrement, car, à peine dehors, il entendit sa voix. Il serra les dents avant de se retourner. «
Parler de quoi ? T’as l’intention de partager avec moi tes peines ? De me raconter ô combien c’est difficile de surmonter l’deuil ? Tu crois pas qu’tu t’es assez foutu de ma gueule comme ça ? » Il s’était attiré sa sympathie, puis son amour en ne lui offrant que des mensonges, alors l’hypocrisie, ça allait bien cinq minutes, maintenant, ils n’avaient plus rien à se dire, tous les deux.