must be love (clem)
Ça doit être la troisième fois que tu te changes, essayant de trouver une tenue digne de ce nom dans les vêtements qui se sont invités au fur et à mesure chez Clementine. On pourrait croire que c’est une illustration de ton stress, mais la vérité est tout autre, t’es juste à la recherche de l’ensemble parfait pour pouvoir manger un maximum sans être inconfortable. Est-ce que ton sens des priorités laisse à désirer ? Oui, comme d’habitude en soit, comme toujours diraient même certains. Pour ta défense, le plan de ta soirée est d’aller chez tes parents, t’as donc aucun besoin de si bien paraitre. Aussi, dans ta logique, Clem sera nécessairement la plus jolie sur place, donc il ne sert à rien de faire des efforts pour bien te vêtir. T’aurais pu y aller en pyjama que ça ne t’aurait pas dérangé, mais tu as un souci de mettre celle que tu aimes à l’aise dans l’aventure. T’as peut-être pas besoin de bien paraitre, mais tu te doutes qu’elle se soucie de l’image que vous renvoyez. Enfin, t’as surtout appris le temps que ça la dérange bien plus que toi ce genre de chose.
On pourrait croire que c’est pour ça que t’as passé la majeure partie de ta journée chez elle, mais ce serait te donner bien trop de crédit. Tu passes déjà une bonne partie de ton temps chez elle et, au-delà, t’avais surtout envie de la voir. Il ne faut donc pas s’étonner que tu t’installes sur son (votre ?) lit quand ton choix de tenue se porte sur une salopette trop grande. T’aurais pu aller ailleurs pour lui laisser son espace ou discuter avec les autres habitants de la maison, mais non, c’est naturellement vers Clem que tu gravites en presque toutes circonstances. Mais maintenant que tu penses aux autres occupant.e.s de la demeure. « Are you sure you didn’t want to invite Jolene or Alvaro ? My parents are used to a big crowd. » Il ne serait d’ailleurs pas étonnant de voir l’un.e des enfants dont iels s’occupent présentement être à table avec vous. Tu ne sais pas ce qu’iels auront décidé pour l’occasion, t’as juste compris que, sans surprise, iels prennent le tout plus au sérieux que toi - comme tout le monde.
Tu te redresses du lit pour trouver la blonde du regard. Tu ne peux qu’ajouter avec un sourire : « It’ll be great either way ! They can’t wait to meet you. » Probablement parce que ça fait beaucoup trop longtemps que tu leur casses les oreilles. T’as laissé des détails importants hors de l’histoire que tu leur as raconté, mais il a été aisé pour eux de voir à quel point tu étais amoureuse, sans doute la raison pour laquelle iels tiennent autant à la rencontrer. Peut-être le seraient-iels un peu moins s’iels apprenaient toute l’histoire, mais t’as toujours accepté de limiter les informations vu les circonstances de votre rencontre.
Cette fois tu te relèves complètement, venant passer tes bras autour de la taille de celle que tu aimes. « But we can skip it. I love my parents but you know. » Est-ce qu’il faut dire que tu l’aimes plus ? Ce serait relativement vrai, mais c’est surtout que tu ne peux pas t’imaginer faire quelque chose qui lui ferait du mal. Est-ce que tu le fais quand même par moment ? Oui, sans doute, comme la ramener rencontrer tes parents, mais bon. T’es raisonnable tu peux très bien être amenée sur une autre voie.
Sept à trois : voilà où en sont les comptes, sur le nombre de tenues, et ça ne prend pas en compte le maquillage frénétiquement fait et refait de Clementine qui est visiblement complètement infoutue de s'arrêter deux secondes pour réfléchir posément. Ça n’a jamais été son fort, rencontrer les familles : elle est un peu trop revêche et brute de décoffrage, trouvant difficile l’exercice de se plier à l’acceptation d’autrui. La seule fois que c’était arrivé, c'était avec les parents d’Itzan ; elle les avait trouvés détestables, et sûrement réciproquement. Ses anciens beaux-parents étaient des vieux de la vieille, chrétiens bien ancrés dans leurs valeurs qui n'avaient pas vu d'un bon œil le mariage éclair de leur fils unique et prodigue avec une jeune femme sans statut ni argent. La communication entre eux n'était pas simplifiée par la barrière de la langue, ni par le fait que leur gosse ne leur avait pas adressé la parole pendant cinq ans le temps de digérer ses traumas : un bon concentré pour une super ambiance, somme toute. Cette première incursion dans le monde des relations entre in-laws l'avait durablement marquée, assez pour la faire freiner des quatre fers devant l'idée de rencontrer la famille de Charlie.
Elle sent bien que Charlie en est consciente et essaie de la rassurer, en étant là et en lui proposant des alternatives – c'est toujours ce qu'elle fait de mieux, déployer une énergie folle pour la rassurer, et si elle n'était pas autant engoncée dans son angoisse et une robe trop moulante, elle serait submergée par une vague d’affection. Pour l'heure, elle ne trouve rien d'autre à lui transmettre qu'un sourire reconnaissant. « Please, Jolene wouldn't find it in her to behave for two seconds if her life was on the line. » Les dernières frasques de son aînée, entre l'alcool et les coupes de cheveux funky, n'arriveraient pas à coller dans le thème, et puis qui ramenait sa frangine à une rencontre avec ses beaux-parents ? Des losers finis, voilà tout. « And Alvaro… As much as I love my kid, he's a nervous one. And he feels other people’s stress, much like a horse, except since he can't run away from what scares him he might just vomit in his plate. » Impossible de savoir si c’est de l'amour vache ou la nervosité qui parle pour elle. Probablement les deux à égalité. Et manifestement, ça n’encourage pas sa partenaire à la motiver davantage : Charlie vient entourer sa taille de ses bras pendant qu’elle lutte pour retirer sa robe en se tortillant comme un ver, ce qui a au moins le mérite de l’apaiser deux secondes. Une fois son bras tiré de la manche, ses bras passent autour des épaules de la jeune femme : « No, don't be ridiculous. We're going. » L’une des deux mains caresse sa joue avant qu’elle ne dépose un bref baiser sur ses lèvres, l’air de s’excuser pour tout, et surtout pour la mauvaise volonté qu’elle doit renvoyer : elle fait de son mieux, pourtant. « How am I ever going to marry you if I don't ask for your father’s permission, anyway? » Nouveau baiser, puis elle retourne à la dure tâche de se sortir de sa robe sans pleurer de frustration.
Une fois qu’elle retrouve sa liberté, elle revient à la première tenue choisie dans un grognement peu satisfait et refait son maquillage en conséquence. L’heure tourne et elles risquent d’être en retard : il ne manquerait plus qu’on les attende alors qu’elles ne ramènent que le dessert, du champagne et un autre apéritif au cas où Clementine soit considérée comme ingrate ou mal élevée. C’est sur le pas de la porte, après avoir rabroué sa soeur pour qu’elle limite le temps devant les écrans d’Alvaro en son absence, qu’elle amorce un léger mouvement de recul : « Can you tell me more about them, what they like, if there’s topics they’d rather avoid? » Elle est foncièrement sous-préparée.
Tu vois bien qu’aucune des solutions que tu proposes à Clementine ne lui convienne, mais ça ne t’empêche certainement pas t’essayer. T’esquisses un sourire à la réponse qu’elle t’offre jugeant qu’elle n’a sans doute pas tord en ce qui concerne sa soeur ou son fils. Tout ça sans compter le fait que les choses n’ont pas si bien commencé entre Jolene et toi ce qui faisait d’elle un poids considérable à trainer chez tes parents. « I mean, it would make you look even more amazing if she doesn’t behave. » Comme s’il n’y a rien qui te dérange dans tout ce qu’elle vient de dire. Il faut dire que, comme toi, tes parents en ont vu de toutes les couleurs. T’as donc aucun doute quant au fait qu’iels ne seraient pas plus perturbé.e.s que ça.
Pas que tu insistes davantage, non, il t’apparait plus important de venir l’enserrer dans tes bras pour lui apporter un minimum de réconfort, un autre échappatoire aussi. Elle le refuse celui-là aussi, non sans te faire sourire à nouveau. En soit, le fait qu’elle soit prête à faire quelque chose qui ne lui tente visiblement pas parce que tu lui as demandé te rempli le coeur, mais ce n’est rien en comparaison avec ce qu’elle ajoute. « You’re right, we have to go if only for that. » Même si en vérité, pour toi, il est évident que tu la marierais sans aucune hésitation et ce, peu importe ce que tes parents ont à dire sur le sujet. « Otherwise it won’t be a fair race. » Parce que t’as toujours l’intention d’être celle qui la demande en mariage, une compétition ridicule à laquelle le fait perdre ou gagner ne change pas grand chose.
Tu retournes ensuite sagement sur le lit, attendant que Clementine finisse de se préparer pour la suivre et attendre à nouveau, cette fois pour qu’elle donne les directives à Jolene. Tu salues tout le monde d’un geste de main avant de sortir et prendre une grande inspiration. Tu vois bien que celle que tu aimes n’est toujours pas bien à l’aise face à ce qui vous attend, mais tu ne peux que lui adresser un énième sourire alors que tu attrapes sa main libre avec la tienne. « They’re very laidback and easygoing. » Ce qui n’a rien d’étonnant considérant ce que t’es devenue comme personne. « They love kids so I’m pretty sure they would love to know more about Alvaro. » Pas que t’aies évité le sujet de conversation, t’as déjà fait le vautour en essayant de récupérer des jouets que tu aimais à son âge - sans grand succès. Tu réfléchis alors que tu prends place dans l’automobile. « You do know you only have to be yourself. They’ll love you. » Avec une certitude qui pourrait presque être attendrissante si ce n’était du fait qu’elle ne doit pas être rassurante pour deux sous. Enfin, tu n’y peux rien, t’es partisane de l’idée que puisque tu aimes Clem, tes parents ne pourraient que l’aimer (mais différemment). C’est sans doute pour ça que tu n’arrives pas à suivre l’inquiétude de la blonde. Tu fais quand même l’effort de réfléchir un peu plus pour essayer de lui donner une réponse un peu plus utile. « I would steer clear of any of my injuries. » Okay peut-être pas plus utile considérant que ce que tu dis t’arrange toi plus qu’autre chose. Tu doutes réussir à la convaincre que c’est pour le bien de tes parents que tu dis ça de toute façon. « They like gardening, cooking… » Tu continues de réfléchir un peu plus avant de conclure. « I mean they just want to get to know you. » Et un haussement d’épaule en prime. Tu pourrais bien te casser la tête à soulever tous les détails possibles chez tes parents, mais tu veux qu’elle soit elle-même, que tes parents aient l’occasion de l’apprécier pour qui elle est.
Elle ne sait pas pourquoi elle s’attend au pire, vis-à-vis de la famille de Charlie ; peut-être se monte-t-elle simplement le bourrichon parce que c’est trop important pour rater, et qu'elle a tant l'habitude de contrôler ou en tout cas comprendre les paramètres en jeu que ne connaître personne et d'avoir tant d’enjeux dans l'événement la paralysent. Quoi qu'il en soit, l'air détendu de sa compagne ne fait pas grand-chose, voire même rien pour l’apaiser : elle a toujours connu Charlie relax dans toutes les embûches que pouvait lui lancer la vie, elle était presque sûre qu’elle avait accueilli sa convalescence à l'hôpital avec un peace sign après avoir manqué de mourir et, honnêtement, c'est peut-être en partie cet optimisme à toute épreuve qui pousse Clementine à s'inquiéter : s'il y avait un traquenard, Charlie pourrait ne même pas s’en douter.
Parce qu’à ses yeux, c'était certain : quel parent serait heureux de voir son enfant avec une femme qui avait rendu son mari cocu, en plus de l'avoir rencontrée via des séances qui étaient censées rester entièrement professionnelles ? Certes, elles ne l'avaient jamais vraiment été – c'était rapidement devenu une espèce d’amitié alambiquée, aucune des deux ne respectant stricto sensu la relation patient/psy, mais tout de même : Clementine avait eu une responsabilité, et elle ne l'avait pas tenue. À la place des parents de la jeune femme, elle serait extrêmement méfiante.
Mais, pour être honnête, elle ne savait pas à quel point Charlie leur avait exposé les circonstances dans lesquelles elles avaient été réunies – les séances, le mariage, ou quoi que ce soit d’autre. En temps normal, elle serait partie du principe qu'il ne pouvait rien exister que Charlie n'aurait envie de confier à sa famille – cependant, sa tentative habile de la réduire au silence quant à ses blessures la fait tiquer. « Great. Jolene cooks and I killed a basil plant and a cactus once. » And I’m a shit mom. Elle laisse retomber ses mains contre ses flancs et les claquer pour signer son désespoir. Ça ne fait aucun point commun, jusque-là, si ce n'est l'amour des enfants, et Clementine s’astreint à rester sur le perron sans aller chercher son fils en totem d’immunité : ce serait trop brusque, trop soudain pour lui qui n’a été préparé à rien, et il n’a pas à payer le prix de ses inquiétudes. Elle finit par en vocaliser une, cependant : « Wait, so, what do they know, exactly? » Elle s’installe au volant de la voiture et règle trente fois le siège et la hauteur du rétroviseur que personne ne touche jamais, puisqu'elle est seule à conduire le véhicule. « They don't know about your, uh… incident… at work? » C’est la première fois qu'elle mâche ses mots pour en parler : d'habitude, elle présente la chose comme elle est, Charlie a manqué de mourir et a à peine pris conscience de ce fait. Là, pourtant, elle a presque l'impression qu'une oreille des Maxwell traîne déjà sur la banquette arrière. « And the rest? » s’enquiert-elle, commençant à rouler trèèès doucement. « In any case, you better let me win the race after this, because you had it way easier and you knew almost everyone already. » En oubliant le nez-à-nez avec Jolene dans le placard.
Tu vois bien que toutes tes tentatives ne font rien pour aider Clementine à passer outre son stress de rencontrer tes parents. Ce n’est pas faute de changer de tactique et d’essayer encore et encore. Tu ne lui tiens pas rigueur, pas même lorsqu’elle se laisse un peu avoir par le désespoir. « You don’t have to like the same things for them to like you. » Toi tu restes convaincue que tes parents ne pourront qu’apprécier celle que tu aimes. C’est la seule option à tes yeux et c’est pour ça que tu attrapes sa main pour la serrer. « Plus they’ll be impressed that you killed a cactus. » Oh bon, peut-être que c’est pas la chose à dire, mais tu l’accompagnes d’un beau sourire pour que ça sonne un peu moins terrible. Tu ne le dis pas pour l’embêter de toute façon, juste pour lui montrer que tout ira bien - encore.
C’est aussi plus agréable que répondre à la question que te pose Clem. Oh en soit, détailler ce que tes parents savent sur elle n’est pas un problème - t’adore parle d’une et l’autre. Mais la première question est suivie d’une deuxième et tu fronces les sourcils cette fois. Parce qu’elle en parle avec trop de douceur, pas assez de franchise. Elle ne l’a jamais évoqué en ces mots. « They know I got hurt, they saw my leg. » Tu leur as juste caché à quel point c’était sérieux, le suivi que tu as du avoir auprès de Clementine et tous les détails du genre. C’est ça qu’il faut que tu admettes et t’as peur pendant un instant qu’elle soit déçue que tu n’aies pas tout dit. Ce n’est pas par honte ou quoi que ce soit, t’as juste voulu lui épargner une montagne à grimper face à tes parents ou une source de malaise. « I didn’t tell them everything else. » Que tu admets finalement en pinçant les lèvres. Tu ne sais pas comment tourner la chose, comment tout dire. « I told them we met through my work but I didn’t give any details. I wasn’t sure you would want me to. » Parce que c’est ça au fond, tu veux t’assurer qu’elle soit à l’aise - au moins autant que possible.
Parce que, encore une fois, tu ne peux que voir à quel point ça ne marche pas. Ce qui ne t’empêche pas de pouffer de rire à ce qu’elle dit ensuite. « Do I need to remind you how I met Jolene ? » Pas que ça te dérange vraiment au fond, t’as passé outre et t’es maintenant persuadée qu’elle t’aime bien (ou pas). « But sure. I’ll let you win. » Parce que tu ferais n’importe quoi si elle te le demandais. C’est une évidence de la façon dont tu la regardes et que tu serres doucement la main. Sauf que pour le mariage… « By giving you the best proposal ever. » Le tout avec un grand sourire, encore une fois. Parce que mine de rien, tu supposes que c’est gagnant-gagnant dans tous les cas. « You’ll need to go a bit faster though. Otherwise we’ll be here until Christmas. » Pas que tu sois si pressée que ça en soit, mais bon, elle semblait bien motivée à arrivée à l’heure et faire bonne impression. « It’ll be great, I promise. » On pourrait se demander si tu le dis pour elle ou pour toi, mais te connaissant il n’y a qu’une seule réponse. C’est pour elle parce que toi t’en es déjà bien trop convaincue.