frozen night (mingi)
J’adore revenir.
C’est peut-être pour ça que je pars.
Alors que l’avion entame doucement sa descente à l’aéroport de Los Angeles, une main tendre se pose sur ton épaule pour te réveiller de ce lourd sommeil provoqué par ces quelques jours intenses en Chine, dans une nouvelle usine de matière première dont l’inauguration s’est faite pendant ton séjour. La paume, c’était celle de ton assistante, laquelle t’avait accompagnée, comme presque à chaque fois, et à qui tu avais gentiment laissé le siège hublot pour le long retour. Grâce à ton sommeil loin d’être agité, le vol n’avait duré que quelques minutes pour toi alors qu’en réalité c’est plusieurs heures qui s’étaient écoulées, dont un gros jet lag que tu ressentais après avoir jeté un coup d’oeil à la piste d'atterrissage obscurcie. Il est déjà tard dans la nuit ou très tôt dans la matinée lorsque tu passes la douane avec une valise pour deux et deux autres qui trônent sous tes yeux. T’es fatigué, mais un passage éclair au bureau pour régler deux, trois bricoles s’annonce obligatoire.
“On vient de m’avertir qu’un invité vous attend dans votre bureau.” Dit-elle alors qu’elle pianote sur les touches de son téléphone sur le chemin entre l’aéroport et le siège de ta société. Un sourcil arqué, tu te demandes un instant qui pourrait être encore présent au beau milieu de la nuit et surtout qui aurait pu rester sans être mis dehors de force par la sécurité de l’immeuble ? Tu soupires. Aucun doute possible, c’est forcément lui. Tu étais parti comme un voleur cette fois, ne lui laissant pas l’habituel post-it sur le frigo lui rappelant d’être sage ; seulement un message envoyé avant de décoller pour lui annoncer que tu serais de retour dans cinq jours, s’ensuivirent de bien piètres conversations et quelques appels d’à peine dix minutes, de quoi combler quelques impatiences. Est-ce qu’il t’avait manqué ? A chaque instant, à chaque fois que tu tenais la main de ton assistante au lieu de la sienne et à chaque fois que tu mangeais dans de bon restaurant en te promettant de l’y emmener un jour.
“Je m’occupe de mon rendez-vous, ça ne devrait pas être long.” Que tu fais à tes gardes du corps, signifiant qu’ils devaient gentiment rester à l’extérieur pendant que tu entrais seul dans la pièce à peine éclairée par le luminaire de ton bureau. Alors que tu refermes la porte, à clef, derrière toi, tu aperçois la silhouette sur le sofa en cuir. Satisfait, tu arbores un sourire quasi machiavélique au coin des lippes, d’avoir encore une fois raison.
“Qu’est-ce que tu fais là ? Tu pouvais m’attendre à la maison.” Ta grande main se pose sur sa tête, en tirant un peu les cheveux pour la faire basculer en arrière. D’en haut, tes yeux se baissent sur ton véritable fiancé et tu remarques très vite les blessures sur son visage. Le sourire disparaît, laissant place à une expression beaucoup plus neutre. “Tu t’es encore battu... Qui t’a soigné ?” Tu le relâches en poussant très franchement sa tête et te dirigeant vers ton bureau pour y feuilleter brièvement les quelques dossiers qui étaient posés proprement dessus. C’était bien le genre de Mingi, de se battre, de rentrer blessé, tout penaud après s’être pris une raclée dont tu devais soigner les blessures ensuite. Mais cette fois, semblerait qu’il se soit rendu à l’hôpital, bizarrement, presque jaloux.
“T’es sûr que t’étais boxeur avant ? J’ai l’impression que t’es juste bon à recevoir des coups.” Dans un soupire, tu te rappelles de cette soirée où tu l’avais adopté après avoir misé sur un canard boiteux qui te fera perdre plusieurs centaines de dollars. L’argent n’est rien pour toi et il avait bien remboursé tout ça depuis toutes les années à tes côtés, il t’avait apporté bien plus qu’une poignée de billets verts inintéressants. Tu t’installes sur la chaise de ton bureau luxueux. Tout ici sent bon l’aisance financière de toute façon, ayant grandi dans l'opulence tu ne te rends même pas compte que tout ce que tu possèdes est le rêve de certains.
“Mingi. Viens t'asseoir.” Tu lui désignes tes grandes jambes d’un geste de la tête, où la place est libre. Le regard acéré et les mains prêtes à bondir, tu l’attends patiemment. Les cinq jours, séparé de la bête, furent un supplice.
En faisant son entrée dans les bureaux du siège de l’entreprise, l’homme salua d’un respectueux signe de tête l’équipe de nuit qui s’activa à sa simple vue. Ces hommes, constamment costumés, l’air sérieux, répondaient au moindre de ses ordres, qu’il soit en civil ou mobilisé. S’il n’était pas constamment à leurs côtés, fainéant profiteur qui tirait avantage de sa position, il restait néanmoins l’un de leur supérieur, ce qui lui offrait quelques privilèges non-négligeables. Sur son chemin, les portes s'ouvraient une à une, sans qu'il n'ait besoin de décliner son identité, ni d'apporter quelconque justification de sa présence.
"Faites comme si je n'étais pas là, annonça-t-il en décidant de s'isoler au sein du bureau de l'homme d'affaires, se déchaussant comme si la vaste pièce n'était qu'une seconde maison à ses yeux."
Mingi - 4:52am
Je le veux au bureau dans moins d'une heure.
La cruche - 4:56amOn va atterrir, laisse-le se reposer.
Mingi - 4:59amJe n’ai pas demandé ton avis, contente-toi de faire ton boulot, princesse.
Un verre de whisky à la main, le trentenaire observait, à travers l'une des géantes baies vitrées, l’activité nocturne de la ville qui s’étendait face à lui. Les bâtiments qui s’éteignaient, les publicités qui imposaient leurs agressives lumières et ces quelques lève-tôt, qui entamaient leur journée par un jogging. Au détour d’une gorgée, il inspecta le ciel, bien incapable de deviner lequel des avions tournoyants au-dessus d'Oceanside lui rapportait sa moitié. L’attente touchait à sa fin.
Si les absences de Wooyoung avaient été source de grandes difficultés durant leurs premières années, l'intensité de leur lien créant une sorte de dépendance, de néfaste fusion, les choses s'étaient apaisées lorsque Mingi avait, lui aussi, trouvé de quoi occuper son temps. Ses semaines s'articulaient désormais autour de celles de l'entrepreneur, s'abreuvant de virées, mondaines ou souterraines, qui occupaient son corps ainsi que son esprit. Une soif d'adrénaline guidait ses pas, ses choix, acceptant les coups, violents ou sensuels afin de combler l'ennui, mais surtout le manque et l'absence.
Sa boisson terminée, le gamin des rues s'installa sur le canapé, chassant ses sombres pensées pour retrouver son habituelle expression maligne. Il devait cesser de remettre en doute sa place, cesser de se méfier de cette femme, cesser de se croire indigne, car à chaque fois : c'était à ses côtés que Wooyoung revenait.
"T'attendre à la maison comme une bonne femme au foyer ? S'amusa-t-il en voyant enfin l'objet de ses désirs faire son apparition. Tu sais bien que j'suis du genre impatient, j'allais pas me coucher sans toi."
Le contact physique prenant fin bien trop tôt à son goût, Mingi grogna, levant les yeux au ciel face au rejet que lui imposait son compagnon.
"J'ai trouvé une infirmière, en quelque sorte, s'expliqua-t-il presque satisfait d'éveiller une forme de jalousie. Que je n'ai pas sauté, précisa-t-il rapidement, pas encore, du moins. Elle sait s'occuper des animaux dans mon genre... Mais la prochaine fois, rentre plus tôt si tu veux jouer au docteur."
Amusé à l'idée de genrer au féminin sa rencontre avec le vétérinaire du quartier de Peacock, l'ancien boxeur se redressa, guilleret, pour rejoindre son amant, entamant un massage de ses larges épaules. Désobéissant, il s'amusa à mordiller l'oreille de son employeur, puis sa nuque, dans une tentative de perturber ses travaux.
"Peut-être que j'aime juste ça, m'en prendre plein la gueule, répondit-il en acceptant finalement de s'asseoir sur ses jambes, imposant son dos plutôt que son torse, comme si les papiers étalés sur le bureau étaient dignes de son intérêt. C'est donc ça que tu t'empresses de retrouver, à peine débarqué ?"
Provocateur, il poussa les dossiers jusqu'au sol, ne ménageant ni les feuilles, ni les objets de valeur entreposés sur la surface, tapotant le bureau au fur et à mesure que de vicieuses idées prenaient possession de son imagination.
"Alors qu'il y a tellement plus intéressant à faire, hein Monsieur Jin ?"
L’idée d’un Mingi t’attendant sagement à la maison pendant que tu t’occupes de tes affaires, de ton travail et qu’une fois rentré, le retrouve sage comme un agneau, souriant et sans blessures sur le corps, t’effleure l’esprit un instant. L’image d’un parfait fiancé se dessine alors dans ta tête, l’image d’un Mingi que tu ne connais pas et que tu ne désires pas connaître. Pour toi, il a toujours été ce gamin féroce qui montre les dents dès que quelque chose lui déplait, toujours un mot de trop pour réveiller la bête qui sommeil en toi. Il est celui qui te procure plaisir, satisfaction et aussi une immense colère, tu ne l’échangerais pour rien au monde, lui prouver en lui passant cet anneau au doigt devrait être une preuve suffisante.
“Je t’ai manqué, Mingi ?” L’air faussement innocent alors que tu ne connais que trop bien la réponse, parce que tu ressens la même chose que lui, dès l’instant où vous êtes séparés, le tumulte de tes pensées refait surface et même si lui, arrive à combler l’absence, il n’en est pas de même pour toi et bien qu’elle soit là pour t’aider à t’endormir, pour venir masser les tempes de ses mains frêles, qu’elle s’amuse à occuper ton regard lors de tes journées solitaires et que son doux parfum arrive, parfois, à le remplacer quelques instants. Pourtant, c’est bien pour le corps de Mingi que tu es toujours aux abois.
“Vraiment ? Tu as été sage ? J’en serais presque… Déçu.” Attentif à ce qu’il raconte sur toutes ses aventures nocturnes, retenant chaque détail futil, ayant grande importance à tes yeux, tu étais bel orateur dans ton quotidien de CEO, mais avec ton fiancé tu savais surtout écouter ce qu’il avait à te dire et des histoires, il en avait souvent à te raconter. Tous les jours même, avec quelqu’un de différent. Cette infirmière ? Tu ne te doutes pas une seule seconde qu’elle puisse être masculine, puisque tu bois ses paroles comme une vérité et ne croit pas une seule seconde qu’il serait capable de te mentir, pas à toi. L’habitude de le punir pour ses agissements qui pourraient s’apparenter à de la tromperie aux yeux du commun des mortels mais qui est plutôt une manière de lui faire croire qu’il a toujours une certaine liberté tout en restant à tes côtés, tu n’auras pas la parfaite occasion de pouvoir lui mettre la fessée tant espérée, qui te démange les mains.
“Je travaille un peu et je m’occupe de toi après.” C’était ton plan initial, en effet. Mais lorsque Mingi se penche sur toi pour commencer à triturer les endroits les plus sensibles de ton corps, il sait très bien l’effet qu’il te fait en te faisant tout cela et c’est avec plaisir que tu laisses un long soupir s’échapper d’entre tes lèvres. Le voilà qui s’installe confortablement sur tes genoux et, en se penchant sur ton bureau pour renverser tout ce qui s’y trouve, t’offre un spectacle amusant de son corps affalé et toi au-dessus de lui. Tout ce qui sépare vos corps de se retrouver en cet instant ne sont que quelques pièces de tissus que tu pourrais facilement déchirer si l’envie t’en prenait.
“Tu ramasseras après.” Le ton ferme, la voix basse, tu regardes autour de vous et tout est toujours très calme, personne n’est présent sauf les quelques gardes planqués derrière la porte. S’ils entendent, ils n'oseront rien dire, de toute façon. L’une de tes mains remonte le long du dos de ton fiancé, l’empêchant de se remettre en place sur toi, écrasant fermement son visage contre le bois du bureau. Les derniers mots qu’il avait prononcés avaient fini par avoir raison de toi et de ta pudeur d’être sur ton lieu de travail, mais après tout, cet établissement t'appartient, tu y fais bien ce que tu veux.
“Laisse-moi vérifier quelque chose.”
La question du manque agissant telle une évidence, le trentenaire se contenta de rouler des yeux, sachant pertinemment que sa présence tardive ici, ainsi que son regard brillant, offraient une réponse satisfaisante au gérant d'entreprise.
"Déçu ? Répéta-t-il intrigué, presque piqué que la curiosité soit potentiellement capable de remplacer la jalousie. J’ai dit que je ne l'avais pas sauté, mais j’ai quand même pas dormi au penthouse."
Le sourcil relevé, dans l’attente d’une mimique qui viendrait parcourir le visage de son compagnon et qui trahirait sa possessivité, Mingi décida de retirer son t-shirt pour dévoiler sa peau. D’un geste de la main, il indiqua sa clavicule, usant de la paume de Wooyoung pour lui faire sentir les deux petites marques boursouflées qui lui restaient de sa soirée mouvementée.
"Il m’a tasé, l’infirmière, dévoila-t-il avec un sourire presque niais, encore incapable de réaliser que leur première rencontre était née ainsi. Et il m’a confisqué ce que j’essayais d’embarquer, ajouta-t-il à propos de
Les documents ayant valsé, le grand brun frissonna en sachant qu’il venait alors de gagner cette petite bataille qui avait opposé plaisir et obligations l’espace d’un instant. Et face à l’ordre, il tenta de se défiler, persuadé qu’il pourrait confier la tâche de les ramasser à du personnel - n’acceptant d’obéir seulement si Wooyoung le réclamait, dans un énième jeu sexuel où il se pliait à ses demandes, quitte à récolter chaque feuille entre ses dents, tant que son amant conservait les yeux sur sa personne. Le visage écrasé sur le bureau, appuyant sur son nez déjà fragilisé par son altercation de la veille, Mingi laissa un rire s’échapper tandis que le sang commençait à couler, tâchant autant son visage que la surface. Accoutumé à la douleur, c’était toujours ainsi avec l’ancien gamin des rues. Ce qui devait faire naître grimaces et plaintes chez les autres ne lui provoquait que spasmes et divertissement, et à ses yeux, tout ce qui flirtait avec le marquage du corps ne faisait qu’ajouter à sa relation, qu’appuyer sur l’importance de l’étrange lien qui l’unissait à l’homme d’affaires. Offrant son bassin comme il ne le faisait pour aucun autre, l’ancien boxeur se mit à grogner en
“Bon garçon.”
Les entrailles tordues par ces simples mots, l’homme sentit une bouffée de chaleur le parcourir, comme s’il n’avait attendu que ça, cette validation et ce compliment. Lui, le gamin au sang-chaud, lui le combattant, lui le dominant,
“Plus profond, sollicita-t-il en s’agrippant au bois du bureau pour s’empêcher d’entamer des mouvements trop délicieux envers la bouche qui le choyait.
Provocateur, il profitait de son expérience, de ces années qui l'avaient totalement désinhibé, pour être aussi demandeur.
“Tu me sembles pas trop usé non plus, constata-t-il en pressant l’érection dans sa paume. Ça devrait faire l'affaire.”
Satisfait, il abandonna sa prise pour se mettre à fouiller le veston de son amant, à la recherche de son téléphone portable, et une fois l’objet en main,
“Vas-y fort, exigea-t-il en essuyant son nez sanglotant dans son t-shirt, vilaine habitude du malpropre bagarreur. J’veux qu’ils nous entendent.”
Un sourire vicieux dévoila ses dents blanches tandis que son esprit imaginait déjà les réactions des employés de la sécurité lorsqu’il pousserait ses premiers gémissements, loin d’être du genre à se satisfaire d’une baise silencieuse. Et s’il s’attendait à subir des regards narquois en sortant de cette pièce, cela ne fit que l’exciter davantage, réalisant qu’il appréciait presque le fait d’être humilié, dégradé, puisqu’il n’avait toujours connu que cela.
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