fantôme du passé ; daewon
Il s'agissait d'une journée comme les autres. Eunbi s'est réveillée aux aurores, sachant parfaitement que Jisoo était réveillée et l'attendait avec impatience. Maman d'une magnifique fille de trois ans, la chirurgienne faisait de son mieux. Son instinct maternel s'est rapidement développé. Même si Jisoo n'était pas dans sa chambre pour la réveiller, Eunbi savait qu'elle était dans son petit lit, prête à débuter la journée. Eunbi sortie de son lit et alla voir sa fille. — Salut, mon trésor. Elle la pris dans ses bras et lui fit un baiser sur la joue. À tous les matins, Eunbi préparait le petit-déjeuner. Il s'agissait d'une routine établie depuis un an. Lorsqu'elle est venue s'installer à Oceanside, Eunbi a eu envie de trouver une demeure sur la plage. Elle a trouvé une magnifique maison avec vu sur l'ocean. Jisoo aimait également cela. Elles pouvaient aller à la plage à tous les jours, quand il faisait beau. Il n'y avait rien de mieux.
Après avoir été porté Jisoo à la crèche, Eunbi alla travailler à l'hôpital. Être chirurgienne cardiaque la passionnait. Les journées étaient différentes. Elles ne se ressemblaient pas toutes et ça lui plaisait. À tous les jours, elle faisait des suivis avec des patients, s'assurant que tout allait bien. Et il y avait les opérations qui sauvaient des vies. Bien évidemment, en médecine, Eunbi ne pouvait faire aucune promesse. Elle faisait de son mieux, prête à faire l'impossible. Oui, elle a perdu des patients et c'était encore difficile de faire face à cela, mais la chirurgienne a appris à mettre ses émotions de côté, afin de mieux travailler. De plus, elle s'entendait bien avec ses collègues. Ils étaient une famille. Lorsqu'elle est arrivée à l'hôpital, pour sa première journée de travail, Eunbi s'est sentie nerveuse. Elle espérait vraiment bien s'entendre avec tout le monde et avoir sa place. Heureusement, son arrivée a été bien reçu.
Les heures filèrent rapidement, comme à l'habitude. Ce fut le moment d'aller chercher Jisoo à la crèche. Elle a prévu de l'emmener manger au restaurant. Mais pas n'importe quel. Eunbi se rendait à un restaurant précis. Elle appréhendait les retrouvailles avec Daewon, son mari. Elle ne l'a pas vu depuis trois ans. Est-ce qu'il ressentait encore de la rancune pour elle? Eunbi ne le savait pas. Une fois Jisoo dans la voiture, elle mis l'adresse du restaurant dans son GPS.
Enfin arrivées. Elle se stationna et arrêta le moteur de la voiture. Eunbi pris Jisoo et débarqua de la voiture. Elle entra dans le restaurant. Il n'y avait personne. La chirurgienne avança, regardant autour d'elle. — Salut? Il y a quelqu'un?
Bientôt la lumière du jour tombera dans les petites ruelles où se situe ton restaurant, alors que tu t’affaire à préparer les condiments pour le service du soir, tes yeux vagabondent entre la salle et la cuisine. Tout est calme pour l’instant mais tu sais bien que dans quelques heures les tables seront prises d’assaut et tu n’auras plus une minute pour souffler. Mais t’es bien heureux comme ça, Daewon, c’est la vie que t’as choisi et entendre simplement la lame de ton couteau s’abattre sur la planche à découper ou la symphonie étouffée de la petite radio te rend bien plus heureux que les débats politiques auxquels tu avais pu participer dans le passé. Désormais, les seuls débats que tu entretiens sont avec toi-même ; entre recherches de nouveaux plats à proposer à la carte et idées pour embêter ton nouveau petit commis, Sujin. Occupé à émincer quelques légumes, tu entends tout d’un coup la porte s’ouvrir, il n’est pas encore l’heure - mais elle est toujours ouverte, de toute façon. Préoccupé, tu entailles ton pauvre doigt avec ton couteau beaucoup trop affuté. C’est pas grand chose, rien que quelques millimètres dans l’épiderme, mais les doigts, ça saigne beaucoup et déjà, quelques gouttes tombent sur le plan de travail bien avant que tu te rendes compte de la blessure ; que tu recouvres bien vite d’un papier pour éviter davantage de dégâts. Tu soupires et fais le tour pour rejoindre la salle déserte. Bien avant de regarder qui venait de faire éruption et occupé à faire un garrot à cet index endolori, tu annonces : “Nous ne sommes pas encore ouvert, mais vous pouv –” Coupé dans ton élan de générosité à l’inviter à s’installer le temps que tu puisses finir tranquillement tes préparatifs, tu la vois enfin. Souffle coupé, cœur qui hurle ; sourcils qui se froncent et le gentil cuisinier était bien vide redevenu l’homme impitoyable qu’il était jadis. Celui qui n’avait peur de rien, qui marchait sur tout le monde, dont l’intelligence faisait trembler. “Qu’est-ce que tu fous là Bibi ? Qu’est-ce que tu me veux ?” Surnom mielleux mêlé à la voix grave et à ton air austère, surnom pour remplacer tous les noms d’oiseaux desquels tu voudrais l’appeler. Mais t’es un homme bien Daewon, tu pardonnes pas, ne pardonnera jamais ; mais t’es passé à autre chose. Enfin, c’est ce que tu crois, parce qu’en la revoyant tu te rends compte que ce n’est pas vraiment le cas. Tes yeux se baissent sur l’enfant qui semble apeurée par ta carrure de ‘grand méchant loup’ ; tu regardes la petite fille puis la femme qui se tient à ses côtés, bien sûr qu’elles se ressemblent, bien sûr que c’est elle qui trainait dans son ventre trois ans auparavant. De la tromperie est née un petit ange qui n’a rien demandé sauf d’être aimée. Alors tu lui souris à elle, à la petite fille, contrairement à sa mère. D’un seul coup bien chaleureux par rapport à plus tôt. Tu plies les genoux pour te retrouver à sa hauteur et d’un coréen bien rouillé, t’adresses à elle ; “Bonjour. Comment t’appelles-tu ?”
Peut-être que venir dans ce restaurant était une mauvaise idée. Eunbi en avait conscience. Elle allait revoir son mari, celui qu'elle a lâchement abandonné en le trahissant. Non seulement elle a témoigné contre lui, mais, en plus, elle lui a été infidèle. Elle n'était pas la femme parfaite. Eunbi ne fera pas semblant de l'être. Toutefois, elle voulait le revoir. Savoir comment il allait, malgré tout. Il se retrouvait dans cette situation à cause d'elle. Eunbi ne l'a pas soutenu comme une femme digne de ce nom devrait le faire. Si seulement il connaissait les véritables raisons. Mais, même si elle lui disait toute la vérité, le mal était fait. Il n'y avait aucun retour en arrière possible.
Eunbi entra dans le restaurant avec Jisoo. La petite fille semblait ravie de manger ici. Eunbi lui a toujours parlé en coréen. Elle trouvait cela important que Jisoo sois fière de son héritage coréen. Elle aimait lui faire goûter les spécialités Coréennes. Ce restaurant était parfait pour cela. La chirurgienne appréhendait les retrouvailles avec Daewon. Elle entendit alors sa voix. La femme se figea, plantant son regard dans celui de son mari. Il était visiblement en colère. Les sourcils froncés, Eunbi est prête au pire. Il l'appelle par son surnom. La nostalgie prend le dessus. Eunbi est incapable de dire quoi que ce soit. Jisoo semblait avoir peur. Elle se colle davantage à sa mère. Eunbi lui flatte délicatement les cheveux, lui assurant que tout allait bien.
Daewon sourit à la fillette. Et la mère regarde cette scène. Il se met à genoux, afin d'être à la même hauteur que Jisoo. — Je m'appelle Jisoo et j'ai trois ans. Et toi?
Jisoo est une fillette adorable. Eunbi est fière de sa fille. Elle parle très bien en coréen tout comme en anglais. Eunbi les regarde se parler un peu, ce qui lui permet de se préparer à la suite.
Eunbi reste muette face à toi et tes propos sanguins. Tu soupires face à cette réaction stoïque de sa part mais tu te doutes qu’elle se retient de te répondre devant sa petite fille ; qu’elle retient tout ce qu’elle voudrait te dire, te hurler même. Bien sûr que tu la connais - tu la connaissais, du moins, tu n’es plus sûr de rien - après avoir vécu autant de temps auprès d’une personne, tu comprenais ce qui pouvait la torturer. Le pansement de fortune vint interrompre un instant la conversation entre la petite fille et toi ; tu devais changer ce morceau de papier par un véritable adhésif capable de résister aux assauts d'hémoglobines qui coulait de cette vilaine blessure peu profonde. Après t’être éclipsé un instant pour désinfecter et appliquer un petit bandage, te voilà de retour avec dans les mains de quoi occuper la petite pendant quelques minutes : des feuilles, des feutres et des crayons de toutes les couleurs. Tu avais acheté tout ça pour le jeune Sujin - pour te moquer de lui - le dessinateur de carreaux, sûr l’un d’eux réside d’ailleurs toujours ce petit cactus qui n'apparaît que par temps de pluie, créé des jolis doigts du jeune coréen. “Jisoo, je te confis tout ça. Tu me fais un joli dessin, d’accord ? Que je puisse l’afficher fièrement dans le restaurant. … Je dois discuter avec ta maman.” Lui dis-tu tendrement avant de revenir auprès de Eunbi, l’attrapant par le bras sans ménagement, pour que vous puissiez vous écarter de la petite fille - au moins assez pour qu’elle ne puisse pas suivre votre flot de conversation. “Tu vas me répondre maintenant ? Qu’est-ce que tu me veux ?” Le visage était redevenu fermé pour elle, cet air méchant tu ne le prenais plus aussi souvent que lorsque tu habitais en Corée et que tu récitais tes discours de monsieur le ministre. “Si c’est un père pour la petite que tu cherches… C’est non.” Tu soupires. “Et si tu viens pour essayer de recoller les morceaux, c’est non aussi.” Tu réfléchis un instant puis un grand sourire narquois te vient aux lèvres. “Ou alors t’es encore venue me demander de signer les papiers du divorce ? … Pourquoi ? T’as l’intention de te remarier ?” Si tu savais ce qu’il était en train de se passer en privé, entre elle et Yeowon, ton meilleur ami, tu serais sans doute dévasté. Si tu savais que le père de la petite Jisoo n’est autre que lui… Si tu comprenais enfin que tous ceux autour de toi n’ont fait que te manipuler, te berner pour mieux te trahir… À cet instant tu ne désirais qu’une seule chose, ne plus la voir en face de toi, peu importe si elle habite ici désormais, vous n’avez rien à partager – sauf ce nom de famille dont tu voudrais bien qu’elle se sépare ; mais cet affreux égo t’en empêche. T’empêche d’accéder à sa demande, à moins qu’elle te supplie, qu’elle te l’implore à genoux.
Eunbi resta stoïque devant Daewon. Leur relation n'était plus aussi belle qu'avant. Elle avait conscience que c'était de sa faute et se faire pardonner allait être difficile. Surtout quand il allait connaître toute la vérité. À ce moment-là, il voudra probablement signer les papiers du divorce. Heureusement que Jisoo était présente. Si elle n'avait pas été présente, Eunbi n'aurait pas eu le même courage. Elle en était persuadée. Faire face à son mari était difficile. Elle avait envie de pleurer et de lui demander pardon, mais, connaissant Daewon, ça ne sera pas facile. Elle voulait lui parler de plusieurs trucs. Elle voudrait remonter le temps, mais c'était impossible. Eunbi était impuissante. Elle a gâché la vie de son mari. Il aurait pu être encore un politicien important en Corée du Sud, mais la vie pouvait être cruelle. Il ne connaissait pas encore les raisons. Il ne savait pas qu'Eunbi a été forcé de témoigner contre lui. Daewon demanda à Jisoo de faire un dessin. Jisoo adorait dessiner. Ça ne sera pas difficile pour la fillette. Une fois Jisoo assise pour dessiner, Eunbi fut entraîné par son mari de force, ce qui la surprit. Il n'a jamais été comme ça avec elle. La chirurgienne se rappelait des premiers mois après le mariage. Ils étaient heureux. Ils avaient des rêves communs. Ils voulaient avoir des enfants et être heureux pour toujours. Pendant plusieurs années, ce mariage était parfait. Les gens autour d'eux admiraient leur relation. Comme dans tous les couples, ils se sont disputés à quelques reprises, mais ils finissaient toujours par se réconcilier. Maintenant, tout était différent. Il n'y avait que la haine. Du moins, Daewon détestait clairement Eunbi. — Ce que je veux? Te voir. Ce qui était vrai. Il lui avait manqué. Elle comprenait la rage de Daewon, mais elle ne s'attendait pas à le voir ainsi. Il lui faisait presque peur. — Je ne veux pas que tu deviennes le père à Jisoo. Je ne te demanderai jamais ça. Je pensais que tu me connaissais. Apparemment, la distance n'a pas aidé. Ils étaient devenus des étrangers. Juste y penser brisait son coeur. — Je n'ai pas l'intention de me remarier, mais pourquoi tu ne veux pas signer? Sur papier, nous sommes mariés, mais pas dans la réalité. Nous sommes séparés depuis un moment déjà. Qu'est-ce que ça t'apporte ce mariage? Tu ne crois pas qu'il est temps de tourner la page? Le dire à haute voix était étrange. Mais c'était la vérité. Eunbi allait toujours aimer Daewon, mais c'était fini depuis longtemps.
Cette relation n’aurait jamais dû se terminer ainsi, dans les larmes et les tourments. Eunbi qui se présente à toi aujourd’hui ne pouvait pas plus mal tomber dans ta vie ; alors lorsqu’elle te dit qu’elle est présente pour ‘te voir’ tu ne peux qu’afficher un rictus déplaisant. Ce n’est pas ce que tu souhaites entendre, tu ne souhaites rien d’elle, plus rien. En tout cas, c’est ce dont tu essayes de te convaincre, puisqu’une part de toi-même cherche toujours une réponse à toutes les questions que tu aimerais lui poser : Pourquoi m’as-tu trahie, Eunbi ? Qui est le père de cet enfant, Eunbi ? … M’aimes-tu encore, Eunbi ? Le coeur malade de la voir, si belle, si rayonnante ; femme à laquelle tu n’avais pas l’air d’avoir manqué, et ça te fait chier. Bien sûr qu’elle s’est trouvée quelqu’un d’autre. “Me voir pour quoi ? T’es venue te rendre compte si j’étais pas à moitié en train de crever loin de toi ? … Ou t’es peut-être venu m’étaler ton bonheur à la gueule ?” Ton regard divague vers l’extérieur, essayant de trouver un homme qui aurait pu l’accompagner, qu’elle aurait voulu te présenter comme ‘le papa de Jisoo’ mais semblerait-il qu’elle ne soit venue accompagnée uniquement de la petite fille. Qu’est-ce que t’aurais fait de toute façon ? Rien. T’en a rien à faire… N’est-ce pas ? “Je pensais te connaître aussi… Jusqu’à ce que je fasse un tour en prison après que tu m’aies accusée de t’avoir levé la main dessus.” Tu te rapproches un peu plus d’elle, élevant d’un seul coup la voix, furieux. “Jamais j’aurai fait ça !” Tu vois soudain la petite fille revenir auprès de sa maman, visiblement apeurée qu’il arrive quelque chose à sa génitrice. Mais heureusement pour elle tu ne touches pas au femme – enfin, pas pour leur faire de mal en tout cas. Tu tentes de lui sourire pour la rassurer mais ça sonne faux, alors tu reprends ce visage neutre, naturel. “J’ai jamais dit que j’allais pas signer. J’te pose des questions, c’est tout. J’ai pas le droit, peut-être ?” Reprends-tu, un peu plus calme. “J’ai refait ma vie aussi, je n’ai plus besoin de toi dans la mienne.” Petit mensonge, tout en ayant en tête la jolie femme qui t’accompagne lors de quelques nuits depuis plusieurs années.
En venant le voir au restaurant, Eunbi avait conscience que ça ne serait pas évident. Daewon ne l'aurait pas accueilli avec un tapis rouge et de bonne humeur. La chirurgienne l'a tellement fait souffrir. Elle ne méritait pas un bel accueil. Elle a été odieuse avec lui. Juste de l'avoir trahi à la cours, durant son procès. Eunbi a raconté des mensonges, afin qu'il se retrouve derrière les barreaux. Si seulement il connaissait la vérité. Mais, même si elle lui disait, ça ne servirait à rien. Daewon ne voudra pas la croire ni l'entendre. Jisoo était en train de dessiner. Ce qui était parfait. Sa fille adorait le dessin. Elle sera concentrée durant plusieurs minutes. Daewon était visiblement en colère. Le contraire l'aurait étonné. — Non, je ne suis pas venue faire ça. Je ne peux pas croire que tu penses cela de moi. Eunbi n'a jamais été cette femme qui se vante du bonheur qu'elle vivait. Oui, elle était heureuse, mais pas complètement. De plus, elle ne rêvait pas du malheur à Daewon. Son mari méritait tout le bonheur du monde. Il s'approcha soudainement d'elle. Eunbi ne savait pas du tout à quoi s'attendre. Il ne fit qu'élever la voix un peu. Oui, il était furieux. Il ne lui a jamais parlé ainsi. — Je... je sais... Elle soupira et, en même temps, Jisoo refit surface. Elle semblait avoir peur pour sa mère. La petite fille n'avait que trois ans, mais voulait déjà protéger sa mère. Eunbi la trouvait adorable et essaya de la rassurer et lui faisant un beau sourire. Elle reporta alors son attention sur Daewon qui avait pris un ton plus neutre. — Oui, tu as le droit. Mais je te rassure que je ne vais pas me remarier. C'était la vérité, mais ça ne l'empêchait pas de penser à son ancien petit-ami, le père de sa Jisoo. — Je suis heureuse que t'aies refait ta vie. Ton restaurant semble bien fonctionner. Eunbi désirait repartir sur de bonnes bases avec son mari. Toutefois, elle savait que les prochaines révélations allaient être ravageuses.
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