After all this time - Newt

tw: alcool, dépression.


La nuit est froide. Glaciale même. Je ne sais pas depuis combien de temps je suis là, prostré sur ce foutu trottoir, à l’attendre. Mes doigts pianotent encore sur mon smartphone, entre deux gorgées d’alcool. J’ai l’impression que ça fait des heures qu’on s’écrit. Je ne sais pas pourquoi je continue. Pourquoi je l’ai pas envoyé ce faire foutre dès le premier message. J’ai pas pu résister à l’envie de lui répondre. Il fallait que je sache. Que j’obtienne des réponses. C’est ce que j’ai eu. Ça ne m’a pas soulagé pour autant. Au contraire. Parce que je n’ai toujours pas accepté ses explications foireuses. Il a voulu me protéger. Il a voulu m’offrir une vie plus belle que celle que j’avais avec lui. Ça m’a énervé. Vraiment. Ça m’énerve toujours d’ailleurs.

Alors pourquoi je lui ai demandé de venir ?

Ça n’a aucun sens, tout ça. Je devrais être chez moi, avec mon mec qui m’attend depuis des lustres. Il a essayé de m’appeler. Plusieurs fois. Je n’ai pas eu le courage de répondre. Pas le courage de me faire engueuler alors que j’ai fais sauter ma sobriété en l’honneur de mon ex, ce soir. Un an que j’étais sobre. Il aura suffit d’une soirée. D’un foutu concert. De sa foutue voix chantant l’amour, pour me faire craquer.

Pourtant, je continue. Newt est une putain de drogue. La mienne.

Foutrement additif. Horriblement tentant. J’ai envie de le voir, malgré la rage qu’il a éveillé en moi. Je ne devrais pas, je le sais. C’est plus fort que moi. Maintenant que je sais qu’il est sorti de taule. Même après lui avoir foutu mon poing dans la gueule, plus tôt dans la soirée.

Je sais que je vais faire une connerie. C’est déjà ce que je suis en train de faire, de toute façon.

Newt a toujours eu cet effet sur moi. J’ai jamais su gérer avec lui. Jamais. J’ai jamais su lui résister. Depuis la première fois qu’il a croisé mon regard. La première fois qu’il m’a fait des avances, alors même que je me pensais hétéro. Et maintenant, je me retrouve encore bien con, à continuer de lui parler, après qu’il m’ai violemment briser le cœur, cinq ans plus tôt.

Cinq ans bordel.

C’est long, cinq ans. Pourtant il a suffit d’une soirée, pour que tout me revienne. Ses mots me heurtent. Ils me déchirent. Il avoue qu’il m’aime encore. Que je lui manque. Qu’il est jaloux de mon mec, qu’il a gardé la maison, notre maison… Je devrais n’en avoir rien à foutre, de tout ça.

Sauf que c’est pas le cas.

Je relève les yeux lorsqu’une voiture arrive dans la rue. Je l’accroche, l’observe s’arrêter devant moi. J’abandonne mon téléphone. C’est lui. C’est vraiment lui. Je ne sais plus comment réagir, maintenant. Je suis trop saoul. Perdu dans mes sentiments. J’essaie de me relever. Il descend de la voiture. Mes yeux brillent. Je titube, trouve appui contre la vitrine derrière moi.

« T’en a mis du temps. »

tw: alcool, dépression.


Il a fini par envoyer ce SMS comme une bouteille à la mer, en utilisant le numéro de Théo. Du moins, celui qu’il avait à l’époque où ils étaient ensemble. Il s’en souvenait encore par cœur comme s’il était ancré dans sa mémoire. Il y avait de grandes chances qu’il reste sans réponse et cette pensée lui convenait. C’était une manière pour lui de s’alléger de cette culpabilité qui avait rongé sa poitrine ces deux dernières heures. Il avait eu une réponse et comme possédé, il y avait répondu, débutant une longue conversation qu’il pensait ne jamais avoir de nouveau avec lui. Les sujets évoqués avaient ravivé les vieux souvenirs. Il se sentait bouleversé par les confidences qui lui étaient faite. Savoir ce qu’il avait engendré malgré lui, sans avoir totalement conscience du mal que son désir de rompre avait provoqué, le rendait mal. Un de ses membres lui avait demandé s’il allait bien lorsqu’il l’avait vu pâlir face à cette découverte. Il se sentait terriblement mal, à la fois piqué et frustré par l’ironie affichée de son ex-compagnon. Ce Théo là était si éloigné de celui qu’il connaissait. Sans doute qu’il était le responsable de cela. Il encaissait le coup, la dureté de ses propos, car il jugeait que c’était mérité. Malgré la douleur latente qu’il ressentait au niveau de sa pommette et de sa mâchoire, il ne se plaignait pas. Il se retrouva bien trop rapidement inquiet, plus qu’agacé. Le savoir ivre, seul, agitait son palpitant dans sa poitrine. Alors lorsque Théo le provoque en lui disant de venir le chercher, il se redresse et attrape son manteau.

« Je dois y aller, désolé. » Il indique à ses compagnons, devenus amis en se dirigeant vers la sortie.

Il envoie un SMS à son chauffeur qui sait être dans la salle de concert. Il lui indique qu’il l’attend à l’arrière de la salle où quelques fans l’attendent. Il les remercie avec bienveillance, mais a du mal à camoufler son agitation. Il s’excuse après quelques photos lorsqu’il voit son chauffeur arriver. Il regagne son véhicule.

« J’ai un ami qui a trop pu. Il me parle d’une enseigne rouge et d’un magasin de vêtement qui serait dans le quartier. » Il indique au chauffeur comme si celui-ci pourrait avoir une réponse.

Une recherche sur le GPS leur permet d’identifier les magasins de vêtements, mais il y en a une pléiade dans le quartier. Rien que le nombre lui arrache un gémissement de frustration alors que son chauffeur lui demande.

« Tout va bien ? »

Non. Non, il ne va pas bien. Théo est seul, dans le quartier à une heure tardive, idéale pour faire les mauvaises rencontres comme il y a cinq ans. Son cœur s’emballe sous l’anxiété du souvenir qui vient envahir sa poitrine. Il est moins patient dans ses réponses, alors que son chauffeur sillonne les rues où il y a des magasins. Théo en profite pour lui soutirer quelques vérités qui transpirent pourtant dans chacun de ses propos. Il s’en voudra assurément demain, car rien de bon ne peut en résulter, mais ce soir, il a trop besoin de le retrouver pour s’assurer de le mettre en sécurité. Demain est un autre jour, il se dit alors qu’il finit par identifier une silhouette proche d’un magasin.

« C’est lui ! » Il s’exclame alors qu’il est déjà prêt à défaire sa ceinture de sécurité pour sortir du véhicule qui rapidement vient s’arrêter près de cette silhouette hébétée.
Il est dans un état pitoyable. Cela lui retourne le cœur, mais il ne s’en formalise pas à cet instant. Il a besoin de le toucher, se perdre dans ses prunelles marrons. Ce qu’il fait à l’instant où il vient le rejoindre. Ses phalanges retrouvent sa mâchoire, l’agrippe avec douceur et fermeté.

« Je serai arrivé plus tôt si tu n’avais pas joué à cache-cache Théo. » Il lance dans une voix légèrement agacée alors que son myocarde s’emballe dans sa poitrine. Son toucher contre ses phalanges est agréable. C’est une sensation qui lui a manqué. Pourtant, il sait qu’il ne devrait pas le faire, mais c’est trop lui en demander à cet instant.

« Je te ramène chez moi, en sécurité. » Il lui indique en venant relâcher son emprise et glisser son bras autour de son épaule en l’invitant à rejoindre son véhicule.

Son chauffeur quitte son poste pour offrir la porte arrière pour lui faciliter l’accès. Natanael lui offre un sourire reconnaissant alors qu’il s’efforce d’installer Théo sur la plage arrière, en prenant place à ses côtés, sa cuisse pressée contre la sienne, l’odeur nauséabonde de l’alcool fort titillant ses narines. Il s’est pris une bonne cuite. Il lui faudra de nombreuses heures pour décuver. Cela, il en est certain.  

tw: alcool, dépression.

Il est là, vraiment là. Sa présence me tire un sourire. Il est essoufflé et débraillé, comme si il y avait couru un marathon. Cette vision est loin d’être déplaisante, à vrai dire. Même si c’est sans doute l’alcool qui parle. Je le laisse m’approcher tandis que j’essaie de tenir droit, sans lui tomber dessus. Il est vraiment venu, ce con. Il me touche, ses doigts m’entourent, m’agrippent comme lui seul sait le faire. Ça me déstabilise. Mon cœur s’emballe de lui même. Tu fais chier Nat, tu fais chier d’être venu. Tu fais chier de me faire encore autant d’effet, après toutes ses années. Je ne le repousse pas. Mon sourire s’élargit à sa remarque. Mes prunelles brillent, elles me trahissent en rencontrant les siennes, je le sais, je le sens. C’était une connerie, de lui demander de venir. Mes doigts s’invitent sur sa main qui me tient encore, chérissant la sensation. Il est là. Il est venu me chercher.

« C’est toi qui n’est pas doué. »

Il veut me ramener chez lui, en sécurité comme il dit. Je suis trop confus pour refuser. Trop soûl pour l’envoyer se faire foutre. Après tout je n’en ai pas la moindre envie. À vrai dire j’ai envie qu’on reste là un peu, pour encore profiter du calme de la rue déserte. Nat en a décidé autrement. Je n’ai pas le temps de dire non qu’il m’embarque déjà avec lui vers sa voiture. Un homme que je n’avais pas vu avant ouvre la portière pour nous faciliter la vie. Je me retrouve à l’arrière sans comprendre comment. La chaleur de l’habitacle me fait un bien fou. Je m’installe confortablement, profitant du contact de sa cuisse contre la mienne. Je devrais réagir, la retirer, m’éloigner. Mais non.

« Depuis quand t’as un chauffeur ? »

Question à la con. J’avoue que je me moque un peu. Mon ex est devenu une vrai star, à ce faire trimbaler partout par ce gars. Mes yeux font rapidement le tour de l’habitacle, avant de revenir vers Natanael. Ma marque est encore là, bien visible sur sa pommette. Je m’en voudrais presque. Ma main se lève à sa rencontre, caresse son visage du bout des doigts.

« Je t’ai vraiment pas loupé. »

Mes phalanges glissent sur sa mâchoire. Mon esprit doute encore que tout ça est réel. Qu’il est vraiment là. Qu’il est vraiment sorti de prison et qu’il est réellement venu me chercher cette nuit. Je ne sais plus quoi en penser. Ses sms tournent dans ma tête. J’aurais le temps de ressasser tout ça demain, non ?

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La sensation de sa menotte sur la sienne. Ce sentiment d’intimité que ce contact procure est enivrant. Il lui donne envie de s’enliser dans ces bienfaits, mais il a conscience qu’il ne doit pas trop y goûter de nouveau, car demain, tout sera de nouveau comme avant. Théo aura décuvé, aura repris ses esprits et cette haine amoindrie par les effluves de l’alcool redoublera d’intensité. Un soupir s’échappe de ses lèvres à ses propos. Il n’a pas la force de le réprimander quand bien même l’envie ne lui en manque pas. Il était mort d’inquiétude pour lui. Est-il réellement conscience de cela ? Son regard se fait plus ombrageux alors qu’il relâcher la pression de ses doigts autour de son visage pour glisser son bras autour de son épaule pour l’entrainer jusqu’à sa voiture. Il ne compte pas faire de vieux os sur ce trottoir, alors qu’il sait que cela fait bien une demi-heure que Théo gisait sur le sol. Il peut sentir que son épiderme est frais. Si l’alcool n’enflammait pas son organisme, il pourrait risquer l’hypothermie. Il l’installe sur la plaquette arrière et son ex-compagnon s’installe confortablement dans une attitude légèrement hébétée. Il savoure la chaleur de l’habitacle, peut-être de sa cuisse contre la sienne.

« Depuis ma sortie de prison. » Il lui indique dans un ton sombre, car cette réalité le frustre particulièrement.

Seulement, c’est sa triste vérité. La conduite lui est impossible. Le simple fait de se tenir au volant l’amène à trembler de la tête aux pieds, prisonniers du souvenir de cet accident qui hante déjà bien trop souvent ses cauchemars. Il suppose que cette réponse suffira pour lui faire entendre le sous-entendu, même s’il n’est pas certain qu’il soit en capacité d’en prendre conscience. Malheureusement, il n’a la force de parler de cet accident, car malgré le travail mené dans le cadre de sa thérapie, cela demeure un sujet hyper sensible pour lui. La caresse de Théo lui arrache un frison à la fois de bien-être et de douleur tant la zone est sensible. Il grimace même malgré lui. Effectivement, il ne l’a pas loupé. Il ne partira pas facilement, mais cela ne le dérange pas. Il l’avait mérité. Son toucher sur sa mâchoire lui arrache une profonde inspiration, car elle est enivrante, ravive des souvenirs d’une époque où cette caresse était coutumière et dont l’absence est si cuisante. Un léger sourire s’épanche de ses lèvres.

« C’est vrai. Tu y as mis toutes tes trippes. » Il lui indique dans un ton qui se veut un brin sarcastique. « Cela devait faire des années que tu en rêvais. » Il lui indique simplement en venant lui jeter un coup d’œil alors que la voiture s’est déjà élancée dans les rues d’Oceanside. Il se penche sur lui pour attraper la ceinture de sécurité pour la passer sur son torse et la coincer dans l’attache près de sa hanche. Il profite de sa proximité pour plonger ses iris dans les siennes, juste pour savourer d’être l’objet de son attention et de pouvoir le frôler légèrement sans devoir s’excuser.

Malgré les effluves de l’alcool, sa beauté l’enivre toujours autant. Il a quelques rides supplémentaires, mais son charisme lui fait toujours autant tourner la tête. Il savoure cette sensation avant de s’en éloigner pour attraper sa propre ceinture pour la glisser autour de son tronc pour s’attacher à son tour. Il profite de cet instant pour reprendre son souffle, calmer les battements de son cœur alors qu’il observe le trouble qu’il a initié en lui. C’est à la fois enivrant et effrayant, car il doit garder en tête que ce soir n’est qu’une parenthèse. Un simple temps mort.

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Je ne m’attendais pas à ce qu’il me réponde. Encore moins à cette réponse là. Je déchante aussitôt en comprenant le sens de ses paroles. L’accident. Evidemment. Mes souvenirs reviennent tel un boomerang dans mon esprit. Je déglutis. Même avec l’esprit embrumé, je n’ai aucun mal à m’en rappeler. Le soir de mon agression. Le soir où ma vie, notre vie, à volé en éclat. Tout était de ma faute. Si je ne m’étais pas fait agressé ce fameux soir, si je ne l’avais pas appelé à la rescousse, il n’aurait jamais pris le volant, n’aurait jamais eu cet accident terrible. Encore aujourd’hui, je portais cette culpabilité. Par réflexe, je cherchais ma bouteille, dans l’espoir d’étouffer tout ça avec l’alcool. Impossible de la retrouver. Était-ce lui qui l’avait planquée ? Non, il n’oserait pas.

Mes pensées finissent par dévier sur son visage, sur cette blessure que je lui ai faite moi même. Je n’en ai aucun regret, mise à part d’avoir abimé sa belle gueule. Ça me fait mal, de constater que rien a changé. De comprendre à quel point son charme agit encore sur moi, comme au premier jour. S’en est effrayant. Foutrement agaçant. Nat à toujours été un très bel homme. Et moi j’ai toujours été trop faible face à lui. Il suffit d’un regard, d’une caresse, même si ça me tue de l’admettre.

« T’as pas idée. »

Je réponds sur un ton léger, le sourire aux lèvres. Je capte son regard, ce coup d’œil qu’il me lance. Notre complicité est là, intacte. Encore. Toujours. Je dévie sur la ville qui s’étale par la fenêtre, essaie de reprendre mes esprits, tente de calmer mon cœur à l’agonie. C’est à cet instant qu’il approche, attirant mon regard comme un aimant. Il attache ma ceinture, avec une proximité qui me ferait presque défaillir. Ce regard. Il le fait exprès. Bordel de merde.

Il s’éloigne enfin, me laisse le loisir de reprendre mon souffle que je n’avais même pas conscience d’avoir perdu. Il joue, ce con. Et ça fonctionne. Beaucoup trop bien à mon goût. À mon tour de l’observer, à la dérobée.

« Tu fais chier, tu le sais ça ? »

Mes doigts enlèvent la ceinture qu’il vient de me mettre. Rien à foutre. Il n’aura qu’à m’engueuler, si il en a l’envie. J’approche, sans une once d’hésitation. Mes doigts reprennent leur droit sur son visage, la courbe de sa mâchoire, sa barbe légère. Mes yeux se perdent dans les siens. Il m’a tellement manqué, ce regard. Cette étincelle que j’ai tant chéri.

« Tu m’as manqué, idiot. »

Je chuchote contre ses lèvres. La chaleur de son souffle si proche tire un frisson dans mon cou. J’ai envie de le traiter de tous les noms, de déverser ma haine sur lui une fois de plus. Mais mon cœur parle trop fort. Bien plus que la haine que je lui porte. Je retrouve ses lèvres en un soupir étouffé. J’envoie valser le peu de raison qu’il me reste. J’aurais tout le temps de regretter plus tard.

tw: alcool, dépression.


Son ton n’a plus cette hargne qu’il avait quelques heures plus tôt. Sans doute que ce coup de poing donné lui a permis de se défaire d’une frustration profonde qu’il lui a imposé au fil des années. Un juste retour des choses pour l’ancien pilote qui ne se plaint pas de la situation. Ce coup, il l’a mérité. C’est de bonne guerre. Il le sent moins sur la défensive. Il semble même plus enclin à retrouver cette complicité naturelle qu’il avait à ses côtés. Une sensation dangereuse, il le sait bien, car il est sous l’emprise de l’alcool. Lorsque les effluves de l’alcool auront cessé d’embrumer son esprit, il est fort à parier que Théo adoptera une attitude de nouveau austère. Il ne doit pas trop goûter à ce sentiment de bien-être qui l’inonde, car la chute risque d’être terrible. C’est pour cela qu’il s’efforce de s’arracher à cet instant en suspens lorsqu’il l’aide à s’attacher. Un geste qui l’impose une proximité qui l’enivre sans crier garde. Sa beauté demeure la même et il se perd dans la contemplation de ces traits à la fois similaires et plus matures que dans son souvenir. La tentation est forte, mais la raison l’intime à s’éloigner, à regagner sa place pour reprendre son souffle qu’il a retenu malgré lui. Son myocarde bat la mesure dans sa poitrine alors qu’il s’efforce de les amoindrir.

Tu fais chier, tu le sais ça ? Ce reproche qui lui arrache malgré lui un sourire. Parce qu’il prend conscience par ce biais que le trouble qu’il éprouve n’est pas qu’à un sens unique. Il fronce les sourcils lorsqu’il l’entend défaire sa ceinture.

« Théo… » Il grogne malgré lui en tournant son visage vers le sien pour le réprimander à son tour. Un reproche qui meurt sous le contact de ses doigts sur son visage, de sa cuisse plus fermement contre la sienne et de son souffle alcoolisé qui se mêle au sien. La lueur de son regard l’envoute. Par le passé, il s’est tant damné pour sentir ce regard passionné sur lui. Un regard qu’il ne devrait plus lui adresser. Tout comme cet aveu qu’il lui partage. Cette insulte qui se veut presque affective et qui le bouleverse. L’envie de l’embrasser le possède et l’ébranle. Ses lèvres flirtent avec les siennes quelques instants, prémisses d’une promesse qui se concrétise immédiatement. Une rencontre qui lui arrache un frison de plaisir, avive ses sens et son appétence. Il devient difficile de résister. Il oublie même cette pensée à l’instant où ses lèvres recouvrent les siennes. Il replonge dans cette ivresse du passé sans filet de sécurité. Ses lèvres répondent à leurs comparses avec cette envie qu’il ne peut taire. Bien sûr, qu’il en meurt d’envie. Il retrouve leur texture sous les siennes, le contact de cette langue qu’il vient chercher comme un conquérant avide, qu’il ne peut pas nier de devenir. Il le désire. Il l’a toujours désiré. Il se perd dans cette éteinte tandis que sa menotte glisse dans la nuque de son ancien compagnon pour la retenir là où elle se trouve, glisser dans son cuir chevelu pour retrouver la texture de ces cheveux contre sa peau alors que sa barbe vient affrioler la chair qui se trouve à sa portée. Il retrouve la rudesse d’un baiser, l’ambition de posséder bien différente de celle d’une femme. Cela ravive immédiatement de vieux souvenirs, surtout lorsqu’il sent le battement de son cœur faire battre sa jugulaire sous la pression de ses doigts. Il n’a absolument rien à lui envier. Leur souffle vient à leur manquer alors ils finissent par ses séparer, retrouve la joue de l’autre, avide de plus. Il s’intime à retrouver contenance. Sa tête retrouve l’appui tête sur lequel il s’appuie en prenant de grande inspiration. Il continue de caresser la nuque de son ex-compagnon avec une tendresse amoureuse. Il ne devrait pas, mais il ne peut pas faire autrement.

« Tu sais que c’est une mauvaise idée, n’est-ce pas ? » Il murmure dans un souffle court en venant se lécher la lèvre, avide de garder sa saveur sur le bout de sa langue, le corps échauffé par un désir qui vient envahir ses reins. Parce que le désir demeure malgré les années d’absence. Le feu ne s’est jamais éteint. Il suffit d’une étincelle pour embraser les braises et retrouver le brasier d’antan, ce qui serait clairement une mauvaise idée.

tw: alcool, dépression.



Je ne sais pas ce que je fais. Si c’est une bonne ou une mauvaise idée. Je ne suis plus capable de réfléchir correctement. Et ça depuis quelques heures déjà. C’est de sa faute, tout ça. Il n’aurait pas dû venir me chercher ce soir. Il n’aurait même pas dû réapparaître dans ma vie. Ça me fait mal, autant que cela me fait du bien. De constater qu’il est là, que son amour est intact, qu’il ne m’a pas oublié. Que notre connexion est intact. Cette complicité, qui a toujours été la. Comprendre qu’elle le sera toujours fini d’écraser mon palpitant dans ma poitrine.Tout cela virevolte dans ma tête et dans mon ventre, avec bien trop de force. Je me hais, d’encore tomber dans le panneau, de me laisser aller à toutes les sensations qu’il éveille en moi. D’être incapable de le rejeter. D’aller moi même jusqu’à faire un pas vers lui. Retrouver ses lèvres n’arrange rien. Je me laisse au contraire emporté avec plaisir lorsqu’il répond à mon baiser. Je me retiens de sourire contre ses lèvres avides qui me retiennent autant que sa main qui vient s’imposer dans ma nuque. Je frissonne, au contact de ses phalanges le long de mon cou, dans mes cheveux. J’ai toujours adoré ça. Sa langue qui réclame la mienne me fait défahir. Rien à changé. Absolument rien. Le désir est toujours là, intact. Comme si les dernières années n’avaient jamais existé. Comme si rien avait changé. Une partie de moi aimerait le croire, tellement.

Ses lèvres finissent par me rendre ma liberté. J’épouse comme lui l’assise à côté de ma tête, sans réussir à me défaire de sa main qui continue de jouer avec ma nuque dans un geste intime qui ravive le passé. Je n’ai pas envie que ça s’arrête. J’ai envie de lui dire de rentrer chez nous. De retrouver notre maison. Nos affaires. Cette vie que l’on a construite ensemble. Ce mariage que nous nous étions promis et dont j’ai toujours la trace, pendant à mon cou. Je n’ai jamais réussi à me séparer de cette bague, qu’il m’a offert en me demandant en fiançailles. Jamais. Tout comme je n’ai pas réussi à la garder à mon doigt. Elle a naturellement trouvé sa place autour de mon cou, contre mon cœur qui lui appartient toujours.

« Je le sais. »

J’observe son visage si proche du mien. Ne loupe pas cette langue qui vient lécher sa lèvre. J’ai chaud. Tout mon corps brûle à la simple idée d’être à nouveau sien. Mes doigts caressent toujours sa mâchoire, retrouvant la rudesse de sa barbe. J’ai envie de plus, bien plus que tout cela. Le retrouver, pour de bon. Qu’il me prouve tout ce qu’il a pu m’écrire, ses dernières heures, avant de venir me retrouver.

« Embrasse moi encore. »

Je lui murmure en une complainte que je ne retiens plus. Je n’ai pas envie de parler. Pas envie de faire vivre les regrets qui traversent ma tête. Je veux oublier. Vivre pleinement ce soir la vie que nous aurions dû avoir, si les choses avaient été différentes. Je regretterais demain, je le sais. Je retrouverais la raison. Le détesterai à nouveau, parce que c’est plus simple comme ça. Je retournerai auprès de celui à qui je mens sans cesse sur mes sentiments, essayer de fuir ce que je ressens pour Nat en cet instant.

tw: alcool, dépression.


C’est une mauvaise idée. Natanael le sait pertinemment. Théo est bien trop sous les effets de l’alcool pour avoir pleinement conscience de ces paroles et de ces actes. Il est juste sous l’ivresse des effluves du passé, de ce qu’ils étaient et ne seront plus. Ils ne seront plus jamais ce couple profondément épris l’un de l’autre, lorsque le flash des photographes et journalistes n’étaient pas sur eux. Une liaison qu’il a gardé farouchement secrète, même lorsque cet accident a malmené leurs existences. Tout le monde était focalisé sur lui, sur ce qui avait pu le pousser à rouler si vite dans les rues de San Diego, lui qui savait tellement jouer avec les limites d’un véhicule et ne pas pouvoir éviter cet accident. Le pire, c’est qu’il avait essayé, mais une milliseconde trop tard. Un mouvement qui n’avait pas suffit à sauver cette personne, ni son accompagnant, ni-même lui-même. Il gardait encore les traces de cet accident, par la présence d’une cicatrice qui ombrage encore sa cuisse gauche. Il n’a jamais cherché à la faire disparaitre. Il souhaite pouvoir porter sur lui les séquelles de cette erreur, qu’il ne puisse jamais l’oublier. S’éloigner de Théo une fois qu’il avait été placé derrière les barreaux avaient été logique pour l’ancien pilote. D’abord, parce que ses codétenues s’en servait pour jouer avec sa patience, faire exploser le latino qui semblait bien trop propre sur lui-même alors que c’était une tapette. Les menaces qu’ils n’hésitaient pas à proférer sur Théo, ce petit blanc qu’il devait bien baiser pour qu’il vienne se faire chier derrière le parloir en le bouffant des yeux. Certains prenaient plaisir à lui narrer dans les détails ce qu’ils souhaitaient lui faire subir s’ils le croisaient en dehors des murs de cette prison. Dieu qu’il avait eu envie de les buter. Il l’aurait fait si celui qui se trouvait désormais sur la place conductrice, ne l’avait pas sauvé plus d’une fois d’une folie passagère. Il avait préféré l’éloigner, lui offrir une chance de se reconstruire avec un homme qui n’aurait pas les mains sales comme lui et qui seraient éraflées par des bagarres qui auraient laissée explorer une part sombre de sa personnalité, qu’il n’appréciait guère, mais qu’il aurait pu finir par exploiter, si ses codétenus avaient eu du grain à moudre. Un choix qui avait été difficile. Il n’a jamais oublié ce moment où il lui a dit de ne plus revenir, que c’était terminé entre eux. Il n’a rien oublié des expressions de Théo : son incompréhension première, cette blessure que ses mots lui ont sciemment infligée, cette colère qu’ils ont provoqué au fur et à mesure de ses passages au parloir sans qu’il ne daigne venir le voir. Théo ignore à quel point ça le torturait de le savoir là et de ne pas pouvoir le voir, cette douce chaleur qui l’envahissait de le savoir prompt à défier sa volonté, dévoilant sa détermination avant de disparaitre en prenant conscience qu’il ne faisait que le blesser plus intimement. Jusqu’au jour où la colère a surpassé le tout, où son frère lui a annoncé que Théo avait quitté leur maison, laissant ses affaires derrière lui et après avoir coupé les ponts avec lui, laissant derrière lui le silence et une solitude qu’il s’était pris en pleine face. Comment Théo pourrait lui pardonner cela en étant pleinement maître de lui ? Bien sûr que non. Lui-même se le pardonnait à peine.

Je le sais. Cette prise de conscience qui fait du bien comme elle fait mal.

Une évidence qu’on aimerait juste oublier comme si elle pouvait disparaitre si on fermait les yeux sur celle-ci. C’est ce qu’il aimerait, tout en sachant que c’est impossible. Sa peau frisonne sous le toucher délicats de ses phalanges contre sa mâchoire. Cette sensation est enivrante. Elle l’hypnotise et lui donne envie de s’enfermer dans cette bulle qu’ils créent à eux deux depuis toujours.

Embrasse moi encore. Cette complainte qui lui arrache un frison, le contraignant à fermer ses paupières tant il sent son émotion être vive. Une demande qui semble devenir une rengaine tant elle envahit son esprit et l’enivre. Il s’intime à respirer profondément, à garder les idées claires, mais un regard vers lui, vers ses prunelles claires qui brillent de cet attrait qu’il a toujours eu pour lui et il abdique. Il abdique parce qu’il lui demande, parce que c’est lui désormais qui a toutes les cartes en mains, qui peut décider de mener le jeu ou mettre un terme à la partie. Il sait pertinemment que cette nuit ne sera qu’une parenthèse qui risque de le torturer pour les années à venir, mais il suppose que c’est tout ce qu’il mérite : souffrir, comme lui l’a fait souffrir. Alors il sait déjà qu’il le haïra de nouveau demain, qu’il aura sans doute fait de lui, un petit-ami infidèle, mais il est prêt à prendre ce mauvais rôle, puisque c’est celui qu’il souhaite lui faire prendre, car il est prêt à devenir son pantin, si c’est ce qu’il désire. Le pantin de ses désirs. Un pantin qui vient retrouver ses lèvres avec lenteur, les privent de leur liberté pour les entrainer dans un baiser langoureux où il dévore sa bouche avec délectation, lui arrache quelques bruits de gorges qui viennent troubler le calme de l’habitacle. Un baiser qu’il réitère encore et encore, leur offrant juste la possibilité de reprendre quelques secondes leurs respirations avant de rompre de nouveau la distance pour une nouvelle étreinte. Ses phalanges quant à elles, frôlent sa gorge, l’enserre avec fermeté et douceur pour lui rappeler que c’est lui qui l’embrasse et pas un autre. Il l’embrasse comme auparavant pour conserver ce souvenir à l’avenir, s’octroyant cette parenthèse. Une parenthèse enivrante qui avive ses sens, ses désirs sans qu’il n’aille plus loin. Une parenthèse qui se referme à l’instant où le véhicule s’arrête suffisamment pour lui faire comprendre qu’ils sont arrivés chez lui, dans sa nouvelle demeure.

« Viens, je vais t’aider à sortir. » Il lui murmure au bout de ses lèvres. Il sait qu’il a l’esprit enivré à la fois par l’alcool et le plaisir.

La lueur trahit le chaos dans lequel il se retrouve plongé. Il défait son étreinte autour de sa gorge, s’éloigne délicatement de lui pour s’extirper de sa voiture. Il se note mentalement de s’excuser auprès de son conducteur le lendemain, mais ce soir, son attention est focalisée sur Théo, cet homme sur lequel son regard s’égare à chaque seconde alors qu’il l’aide à s’extirper de la voiture et l’aide à rejoindre son pallier. Il ouvre la porte de sa maison, l’invite à le suivre pour rejoindre le salon dans lequel il l’installe sur le canapé pour lui permettre de reprendre ses esprits. Un verre d’eau devrait lui faire du bien, alors il se dirige naturellement vers la cuisine américaine pour attraper un verre et une bouteille d’eau. Il s’oriente dans la pénombre offerte par le clair de lune qui éclaire les pièces à travers les différentes fenêtres de ce coin de la maison.

« Tiens, tu devrais boire un peu, ça pourrait te faire du bien. » Il lui indique en lui tendant le verre avant qu’il s’en saisisse pour s’asseoir à ses côtés.

Son regard est attentif au moindre de ces mouvements, attendant un mouvement de sa part pour savoir quoi faire désormais qu’il est là, chez lui, si beau et désirable. L’aimer est une douce torture. Il le sait depuis le premier jour qu’il l’a vu à ce concert. Une torture qui n’a jamais prise fin.

tw: alcool, dépression.

Cette nuit est une parenthèse. Une erreur. L’exemple même de ce qu’il ne faut pas faire. Pourtant mon cœur vibre. Mon corps l’appelle, le réclame presque. Le passé m’englobe, il me recouvre alors que ma supplique fini par mourir dans ses baisers. Il m’embrasse comme avant, comme il l’a toujours fait. Je frissonne sous sa main qui m’enferme dans son étreinte si particulière. Plus rien ne compte sauf ses sens qu’il ravive, brûlant d’en avoir d’avantage. Je flotte dans un océan irréel, où il n’a jamais eu son accident, où il ne m’a jamais quitté alors même qu’il était derrière les barreaux. Toutes ses années sont effacées, sous l’assaut de ses baisers qui m’enivrent. Je voudrais que ça ne s’arrête jamais.

Le rêve s’évanoui. Il suffit d’une fraction de seconde. La voiture s’est arrêtée. J’ai l’impression d’être dans une bulle, tandis que Nat brise le silence en m’intimant de sortir de l’habitacle. Je me laisse aller, le laisse me conduire à l’intérieur tel un pantin. Ce n’est que lorsque je me retrouve dans le canapé que je prends un peu plus conscience de ce qui m’entoure. De l’endroit où je me trouve. Mon regard flotte dans le vide. Natanaël s’agite. Un verre d’eau fini par m’être offert. Je l’attrape par habitude. Ses paroles trouvent sens dans ma tête. Ça me fera du bien. Je suppose qu’il a raison. J’avale sans réfléchir. Je sens son regard sur moi. Je le sens, telle une caresse interdite. Impossible de lui échapper. Impossible de m’en passer. Je la sens rouler dans ma nuque, chercher une faille alors que je fini par me lever. J’essaie de reprendre contenance, même si je tangue encore un peu. J’observe enfin réellement ce qui m’entoure, malgré la pénombre omniprésente. La lumière de la lune a quelque chose de réconfortant, sans que j’arrive à en comprendre la raison.

« Alors le voilà, ton nouvel appartement. »

Ma voix est lasse, presque brisée. Notre maison me semble brusquement bien loin. Tel un mirage. Comme si notre bonheur n’avait jamais existé. Ou bien trop brièvement.

« Est-ce que tu es heureux, ici ? »

Je le regarde à nouveau, presque suppliant. Ma question ne devrait même pas exister. Je n’ai pas envie de la réponse. C’est juste une forme d’échappatoire, une façon de fuir cette situation que j’ai moi même provoqué. Parce que je sais qu’à l’instant où il me rejoindra, au moment même où je retrouverais ses lippes, je retomberai dans le piège et que cette fois, rien ne pourra m’arrêter.

tw: alcool, dépression.

La présence de Théo dans cet endroit est irréelle. Il n’aurait jamais cru cela possible et pourtant, il est bel et bien présent sur son canapé, sa silhouette seulement éclairée par la luminosité offerte par la lune qui s’infiltre au travers des fenêtres de son salon. Un moyen de croire que cet instant appartient à un songe. Un rêve à la fois merveilleux et dévastateur, car il fait du bien comme il fait du mal. Ses prunelles le détaillent avec une attention particulière, comme s’il pouvait disparaitre s’il clignait des yeux durant quelques secondes. Il se rend compte que cette pensée le terrifie et pourtant, il va devoir y faire face, car il s’agit d’une parenthèse. Un moment éphémère volé au temps. Son cœur bat violemment dans sa poitrine, ses sens encore enivré par ces baisers échangés dans le secret de sa voiture. La suite de cette soirée n’est nullement tracée. Cette parenthèse peut déjà être refermée et il se rend compte qu’il n’est pas prêt à cette dure réalité, même s’il devra l’accepter. Son regard suit le mouvement de Théo lorsqu’il se redresse, passe près de lui pour observer les lieux. Cette demeure dont il ignore tout, cette décoration bien différente de celle qui a été la leur. Cette remarque qui le bouleverse tant elle est empreinte de tristesse et de désolation. Natanael ne dit mot, bien incapable de trouver quoi y répondre. Une agitation qui se renforce lorsqu’il lui pose LA question, celle qu’il ne se pose jamais, car la réponse serait évidente. Il tente de refaire sa vie autant qu’il est possible de le faire. Il le fait pour Rosalina, sa fille, cette poupée qui est arrivée dans son existence alors qu’il lui cherchait un sens, car il n’en trouvait plus lui-même. Il a tenté de reconstruire des fondations sur le champ de bataille qu’est devenue sa vie, elles ont le mérite d’exister, de lui conférer un certain équilibre. Il a appris à apprécier les petits bonheurs de la vie, de profiter de l’instant présent sans trop s’attarder sur l’avenir, car le faire ne pourrait que le mettre face à face à ce vide qui l’habite inexorablement. Non. Bien sûr, qu’il n’est pas heureux. Tout simplement parce qu’il lui manque quelqu’un. Lui. Le regard qu’il lui lance l’ébranle.

« Théo… » Murmure-t-il dans une voix tiraillée en venant lever la tête vers le plafond pour tenter de maitriser ses émotions, en vain.

C’est une torture pour lui de le voir là, cherchant à lui arracher des vérités qu’il ne s’avoue déjà pas à lui-même pour éviter de sombrer dans la tourmente de nouveau. Comme lorsqu’il lui a demander s’il était jaloux. Bien sûr. Il ne veut pas l’imaginer, car ça pourrait le rendre fou, le pousser à commettre une folie, agir comme le salop qu’il semble devenir depuis qu’il l’a retrouvé et qui l’écarte du droit chemin. Théo le pousse à agir comme le méchant et il est prêt à le devenir encore plus juste pour pouvoir effleurer et s’emparer de cette âme qui était la sienne.

« No puedo ser feliz sin ti, tesoro. (1) » Il finit par lui avouer en venant se rapprocher de lui. Ces mots viennent de son cœur, de cette langue latine qu’il chérit, car elle fait partie de lui.
Ces mots d’amour ont toujours été dit en espagnol. Aujourd’hui ne fait pas exception alors que ses doigts retrouvent les traits de son visage. Son visage se penche vers le sien, complètement envouté par son regard qui luit d’une émotion si profonde sous l’éclat de la lune.

« Me vuelves loco, pero por ti, estoy listo para serlo. (2)» Il conclut en venant lui ravir un baiser en s’emparant de ses lèvres de nouveau.

Une étreinte passionnée, dévorante pour le plaisir de le retrouver, de se consumer de nouveau de ce bonheur illusoire de le savoir à lui de nouveau. Qu’importe si ce n’est que ce soir. Il prend tout ce qu’il est prêt à lui donner, quitte à ce qu’il doive garder cette nuit comme dernière relique de cet amour qui est le leur.

(1) Je ne peux pas être heureux sans toi, trésor.
(2) Tu me rends fou, mais pour toi, je suis prêt à l'être.