you dropped something... your standards (jia)
Haneul est d’humeur massacrante.. pour ne pas changer ces derniers temps. Entre celle qui se rapproche le plus d’une ex petite-amie qui débarque de nouveau dans sa vie avec un fiancé à son bras comme pour le narguer – le monde ne tourne pourtant pas autour de lui –, Pippa qui lui en fait voir de toutes les couleurs ces derniers temps rien qu’en étant à quelques mètres de lui et puis… L’animatrice radio qui l’a traité de mauvais coup devant ses propres ami.e.s qui n'ont pas raté une miette du spectacle. Non, c’est trop pour lui. Il a besoin d’évacuer sa frustration d’une manière ou d’une autre, c’est pour cette raison qu’il décide de se lever tôt pour aller à la salle de sport avant de faire l’ouverture de l’arcade. Comme d’habitude, l’appartement est silencieux tandis qu’il se prépare à partir. Tout le monde dort. Ou Pippa est chez l’autre encore une fois. Il n’en sait rien et il s’en fout à vrai dire, ce n’est pas son problème. Il doit être capable de refouler sa jalousie au fond de lui et de réagir avec maturité. Il n’a plus quinze ans et pourtant, les émotions qui surgissent chez lui ces derniers temps… C’est bel et bien la première fois. Mais il n’a pas envie d’y penser, car cela signifierait de se poser des questions. Et si Haneul adore se poser des questions, il décide de passer son tour pour cette fois-ci.
Haneul vérifie trois fois qu’il a bien fermé la porte de l’appartement à clé avant de quitter l’immeuble… avant de se prendre de plein fouet quelqu’un. Il souffle avant de remettre sa chemise blanche parfaitement repassée en place (oui même pour aller à la salle de sport, il refuse de se balader en jogging dans les rues de New-York) et enfin, se décide à regarder la personne qui l’a bousculé. Ou lui, peut-être. Il est trop préoccupé par ses pensées pour faire attention à quoi que ce soit ces derniers temps.
Sauf qu’il aurait préféré continuer son chemin tranquillement, que son regard ne se pose pas sur la nouvelle arrivante. Oh non, pas elle.
« Jia ? » qu’il lance d’une voix étranglée. C’est tout ce qu’elle a retenu de cette fille qu’il a rencontré via une célèbre application de rencontre, n’a pas écouté les trois quarts de ce qu’elle lui a raconté lors de leur date. Ce soir-là, il voulait juste oublier. Sunhee. Pippa. Toutes. Elle est tombée au mauvais moment. Il sent déjà la honte lui monter aux joues tandis qu’il lui fait face, sachant très bien qu’il n’a pas été dés plus… hm… agréable avec elle. Parce qu’en plus de ne pas avoir tenu la route alors qu’ils étaient dans le lit de cette dernière, il a préféré prendre la fuite en lançant des brèves excuses plutôt que d’assumer. Heureusement qu’elle n’est pas animatrice radio. Parce qu’en plus de Haneul le mauvais coup, on peut rajouter Haneul l’impuissant sur la liste. « Quel plaisir de te revoir ! Je comptais te rappeler d’ailleurs mais j’ai été… occupé. »
Haneul panique. Et lorsqu’il panique, il dit n’importe quoi. Des mensonges. Du bullshit comme il a l’habitude d’en vendre. Mais il n’a pas n’importe qui face à lui aujourd’hui.
Un matcha latte de plus dans l’estomac, parfait pour commencer la journée. Bon, Jia était comme à l’accoutumée, en retards. Mais l’équipe y était habituée depuis un an, i.elles ne seraient donc pas surpris.es. C’est peut-être pour ça qu’elle avait fait le crochet par Peacock alors que dernièrement, elle aurait plutôt clamé haut et fort ne plus vouloir y mettre un pied. A series of unfortunate events, se disait-elle mentalement, mais sans grande conviction. Il lui fallait tout de même répéter son mantra des derniers jours «
« 씨발 - »
Qu’elle amorce alors que son matcha latte se repend sur sa blouse Versace. L’espace d’un instant, elle songe à une malédiction. Sincèrement, qui l’aurait ainsi maudite ? Ce n’est pas comme si elle avait des ennemis, pourtant (si, beaucoup), elle était adorable Jia ! Pourtant le sort semblait s’acharner chaque jour un peu plus. Que cela cesse ! Elle demande réparation si le bon dieu existe, elle ne mérite pas tout ça !
Cependant, son insulte est coupée nette par la révélation du visage qu’elle croise. Elle aurait dû se douter que cette épaule lui appartenait. Ha-, Ang-, Soe-… Machin d’un soir. Elle n’avait pas le nom, mais le souvenir, lui était vif. Le souvenir de l’abandon. Pourtant, elle avait supporté sa discussion franchement inintéressante et parfois douteuse, elle avait accepté des invitations franchement frontales et directes, elle avait dit oui a tout. Et pour quoi ? Rien. Et pourtant elle était nue. Personne ne laisse Jia nue insatisfaite. Personne ne lui fait le coup de la panne. Non, pas à elle.
Son gobelet à moitié vide en main, rafraîchie par le souvenir bien froid mais surtout par sa boisson, elle est à deux doigts d’hurler. Seulement, elle est au-dessus de ça, Jia. Elle est une jeune femme mature et responsable. «
« Heu, pardon, c’est quoi ton nom déjà ? »
Qu’il ne croit pas qu’elle a accordé l’espace d’un seul instant une importance à ce date, qui au demeurant était beaucoup plus un prétexte pour ne pas se retrouver seule dans son lit le soir que pour une quelconque recherche d’affection. Non, elle voulait l’attention. Et le plaisir. Elle avait dû se passer des deux. Qu’elle connaisse au moins le nom de celui qui lui avait fait vivre cet enfer, histoire d’en parler à la boutique toute la journée et d’avoir l’excellent prétexte d’être si triste, qu’elle ne peut travailler aujourd’hui.
« Moi, je ne comptais pas te rappeler. Pour des raisons évidentes, d’ailleurs. »
Elle ne peut pas s’empêcher de tourner les yeux vers son entrejambe. Pas vraiment la partie la plus attrayante à regarder, définitivement. Et pas la plus vigoureuse, ça c’était désormais un fait.
« Par contre, à défaut de me devoir un orgasme, tu me doit un teeshirt. »
Trop perturbé par cette rencontre, Haneul remarque à peine les dégâts qu’il a causé sur les vêtements de sa conquête d’un soir qui a très mal fini. L’important, c’est que rien n’a pu toucher sa chemise sinon là, ce serait la fin du monde. Enfin plus ou moins, il a juste à faire demi-tour pour se changer mais le jeune homme est toujours en retard alors il n’a pas le temps de perdre du temps. Et s’il cherche à être le plus mielleux et agréable possible face à la jeune femme, il a presque envie de rire de nervosité lorsqu’elle lui demande son nom. C’est donc ça, ce qu’elles ressentent toutes – toutes celles qui ont eu l’occasion de passer dans son lit – lorsqu’il doit longuement réfléchir pour retrouver leur prénom ? Prénom qu’il confond toujours à une ou deux lettres près, ou alors avec celle d’avant ou celle à venir. Bref, Haneul est un véritable goujat, le sait même s’il essaye de se prouver le contraire. Et il se rend compte à cet instant que la seule dont il n’a pas oublié le prénom, elle, ne se souvient pas du sien. C’est peut-être mieux ainsi, non ? Cela veut dire qu’elle a peut-être oublié cette fameuse soirée.
« Hwan. » qu’il lance rapidement, préférant rentrer dans son jeu plutôt que de lui dire la vérité – un énième mensonge. Au moins si elle doit en parler avec qui que ce soit, son prénom ne sortira jamais. Peu de chose que les deux aient quiconque en commun dans leur entourage mais depuis l’animatrice radio, il devient méfiant. Oceanside a l’air beaucoup plus petit que ce qu’elle laisse paraître. Mais sa joie de ne pas avoir été totalement reconnu est de courte durée – aussi court que leur relation intime qui n’a jamais pu vraiment commencer. Il reste planté là, tandis qu’elle ne le regarde absolument pas dans les yeux et Haneul commence à le ressentir… vous savez, ce fameux désespoir. D’être juste un homme incapable. Juste un Ken.
« Oui – alors, euh. Bon. » qu’il commence à la recherche de ces mots. Si Haneul a toujours quelque chose à dire, là, il ne sait pas comment se défendre correctement. « C’est la première fois que ça m’arrive. Désolé que ce soit tombé sur toi. »
Les mots ne sortent pas du tout comme il l’aurait voulu. En fait, il se rend compte qu’ils peuvent facilement être mal interprétés. Non, Haneul n’accuse pas Jia d’être la faute de son malheur cette nuit-là. Il sait que c’est sa faute, mais il se voit mal lui dire qu’il pensait à d’autres femmes en étant avec elle. Il se sent déjà assez mal d’avoir fait le coup de la panne à quelqu’un pour la première fois de sa vie et a tellement peur que cela se reproduise qu’il est à deux doigts d’aller au couvent.
« Je t’en rachèterais un, pas de soucis. Donne-moi juste ta taille et j’y vais dans la semaine. » qu’il se contente de répondre avec un bref haussement d’épaule. Si c’est tout ce dont elle a besoin pour qu’il se fasse pardonner de son affront, il le fera. « Tu n’es pas animatrice radio ou journaliste toi, hein ? Enfin, tu fais quoi déjà dans la vie ? »
Il s’enfonce, Haneul. Lui montre qu’il n’a pas écouté un seul mot de ce qu’elle lui a raconté alors qu’il lui a certainement posé la question. Mais il veut aussi assurer ses arrières un minimum.
Jia aurait peut-être dû prêter un peu plus d’attention à l’incongru. Elle aurait été ainsi plus armée pour cracher un peu plus de venin. Mais, au vu de l’audace dont il avait fait preuve –il ne l’avait même pas écouté parler du dernier défilé Chanel- elle avait réellement cru que cette même audace se traduirait jusqu’au bout de la nuit. Seulement, non. The mission was aborted. Et de la pire manière qu’elle soit. Partir en plein milieu en la laissant seule, elle et ses désirs ? Qui agissait ainsi ? Haneul, de son prénom, qu’elle garderait désormais bien en tête, si cela pouvait le rassurer.
Elle tente de croiser les bras, pour affirmer un peu plus son mécontentement quant au traitement dont il avait fait preuve, mais le tissu est mouillé et elle ne retient pas une mine de dégout immédiate. Sa pauvre blouse ! Heureusement qu’elle n’avait pas mis de lingerie noire, sinon, ce serait carrément la honte. Quoi qu’elle aurait pu encore un peu plus le provoquer. Ce n’est qu’un homme après tout, impuissant certes, mais ce n’est pas comme s’il n’avait pas montré son avidité cette nuit-là. A la mention d’une première fois, elle ne peut contenir un petit rictus. Pas de ceux qui se veulent compréhensifs, plutôt de ceux qu’on lâche pour éviter d’insulter quelqu’un. Un simple « désolée que ce soit tomber sur toi » Really ? C’est tout ce qu’elle mérite ? Pire ! C’est donc elle le problème ? Car si elle est sa première aventure ratée, cela veut bien dire que le problème vient d’elle.
« Personne ne subit de panne avec moi ! »
Elle est obligée de chuchoter cette phrase, presque par réflexe, car elle a bien conscience d’une chose. C’est la honte de ne pas avoir réussi à faire tenir Monsieur jusqu’au bout. Ce n’est pas son genre, elle. Contrairement à lui. Même si, elle devrait aussi reconnaitre que pour elle, c’est une grande première également. Et elle ne risque même pas de pouvoir se plaindre à papa cette fois. Enfin, cette fois, c’est une manière de parler, ce n’est pas le genre à aller parler des aventures passagères qu’elle parvient –ou pas- à vivre. Même Jae n’en aurait jamais vent ! Personne ne saura. Après tout, même s’il sort de la résidence, ça ne veut pas dire que c’est un locataire, elle ne l’a jamais croisé, contrairement à d’autres…. Dont elle a trop souvent entendu parler ! Mais ça, c’est un autre sujet.
Il vient d’hausser les épaule à la mention de racheter un tee-shirt ? Elle doit serrer du poing pour ne pas le gifler.
« Heu, non, je ne crois pas. Tu vas m’en racheter un immédiatement. Et c’est moi qui vais le choisir ! »
Jia a des limites, et même si sa chemise met bien en avant ses épaules larges et ses bras musclés, elle ne fait certainement pas confiance à Haneul pour choisir un vêtement pour elle. En plus, il fait quoi dans la vie ? Elle ne voit pas spécialement de vêtements de marques dans toute la tenue. Non, jamais elle ne le laisserait seul aller lui trouver un vêtement de rechange ! Elle irait avec lui. Et maintenant.
« Je suis Jia Choi, la fille du propriétaire de cette résidence, Mr Haneul La Panne. »
Cette fois, elle ne se laisse pas distraire par le liquide vert rependu sur elle et croise carrément les bras. S’il devait se sentir doublement honteux, c’était bien maintenant !
Haneul ne se rappelle pas la dernière fois qu’il a pu avoir une discussion aussi gênante. Il ne peut pas s’empêcher de jeter des regards autour de lui au cas où quelqu’un pourrait entendre ce qu’ils ont à se dire. Assumer d’avoir eu une panne ? Jamais de la vie. Il veut bien être un minimum déconstruit sur certains sujets, il reste un homme fragile par moment – surtout pendant ce genre de moment en particulier qu’il ne pensait pas à vivre avant ses soixante-dix ans au moins. Est-ce déjà le moment pour lui d’avoir une prescription de viagra ? Non, il refuse. En même temps, il se voit mal expliquer à Jia qu’il pensait à une autre au point d’en être assez perturbé pour prendre la fuite face à son incapacité. Elle se vexerait d’autant plus et il n’a pas envie d’être catalogué comme l’idiot ultime qu’elle a pu avoir sur son chemin. Question de fierté sans aucun doute, car il se dit qu’il n’a pas de raison de la recroiser de ci-tôt. Enfin, c’était ce qu’il s’était dit aussi ce soir-là et pourtant… Le voilà ici, face à elle, à devoir accepter sa sentence.
« Je suis désolé, ok ? » qu’il répète en chuchotant à son tour. Haneul ne sait pas quoi dire d’autre à vrai dire. Pour une fois, il peut bien avouer ses torts. Mais il ne peut pas s’empêcher de lever les yeux au ciel – et le regrette aussitôt – lorsque Jia lui demande d’aller acheter un tee-shirt maintenant. « Immédiatement ? Genre, maintenant ? Tout de suite ? Mais j’ai un rendez-vous important, là ! »
Est-ce qu’il est en position de se plaindre ? Absolument pas. Et Haneul le comprend d’autant plus lorsque Jia lui annonce qu’elle est la propriétaire de l’immeuble. Oh non. Pas ça. Tout sauf ça. Mais pourquoi est-il maudit à ce point-là ? C’est un fait maintenant : Haneul demandera toujours aux prochaines femmes à qui il parlera sur les applications de rencontre ce qu’elles font dans la vie. C’est fini les mauvaises surprises. Lui aussi va commencer à avoir des exigences. Il change alors aussitôt d’attitude, conscient qu’il a tout intérêt à se rattraper.
« Mon rendez-vous n’est pas si important que ça en y réfléchissant bien… On peut y aller. Par contre, je croyais que tu avais oublié mon prénom. » lui fait-il remarquer, n’ayant aucune envie de se faire renommer Haneul La Panne pour le reste de sa vie. Comme quoi, il n’était pas si inintéressant en dehors de son léger accident en cours de route. « Tu veux aller où ? »
Haneul espère tout de même que cela ne prendra pas trop de temps sur son emploi du temps assez chargé digne d’un ministre (enfin un ministre qui mérite son salaire, ce qui n’existe pas vraiment pour le moment). Il se voit mal devoir annoncer à ses ami.e.s qu’il ne peut pas honorer son créneau de l’après-midi à l’arcade car il est en train de faire du shopping avec la femme avec qui il a eu une panne.