tw: cigarettes
Tabitha s'ennuie. Il lui reste une vingtaine de minutes avant d'espérer voir le bout de la frimousse de son amie. Le bus qu'elle avait pris un peu trop tôt, l'attente devenant passage obligé. Tant pis.
Comme un ado, elle soufflait des ronds de fumée devant elle, sa clope s'étiolant entre ses doigts. Si elle avait pu capter un signal internet, elle aurait probablement travaillé - ici, dehors, devant le bâtiment. N’importe où, c’est le travail qui mange son temps. Alors, cette pause improvisée est finalement bienvenue. Étrange, un peu ratée, un peu désordonnée, mais bienvenue. Seule, Tabitha n’a que ses pensées à remuer, et des textos auxquels répondre.
Sa véritable pause n’aura duré que deux minutes, son téléphone déjà en équilibre entre ses doigts. Répondre à sa mère, à l’un de ses cousins, à Nell, à un fournisseur. Répondre à deux de ses employés, vérifier que Robyn n’a pas envoyé de message depuis le dernier reçu. Relever la tête quand, inconsciemment, elle perçoit la présence d’une silhouette en face d’elle. Quelqu’un qui arrive, ou qui part.
- Sorry, qu’elle annonce en ramassant un peu ses jambes, en poussant un peu son sac, avant de s’arrêter sur son visage.
S’arrêter, tout court.
Face au fantôme de son passé. Non ?
- Wolf ? Murmure étonné, car il faut à la femme quelques secondes de plus pour s’assurer qu’elle n’hallucinait pas.
- Shut the front door ! Woolfiiie ?? Sa voix se perd dans les aigus, alors qu’elle se relève bancalement, rire nerveux en bord de lippes, les mains qui lissent le bord de sa minijupe. Soudainement à court de mots, alors qu’elle plonge malgré tout vers le corps de son vieil ami. S’applique à ne pas le brûler avec la fin de sa clope, quand elle l’entoure de ses bras pour le saluer. Gêne rapidement envolée, quand l’hilarité remplace l’incrédulité.
- Lemme take a look at youuu ! qu’elle fanfaronne, alors que ses mains attrapent son visage en coupe. Il risquait quand même de finir avec quelques cendres sur l’épaule. Tant pis, il aurait qu’à porter plainte. Ses prunelles amusées dévisagent l’enfant, devenu ado, devenu homme. Crime qu’ils ne se soient pas revus plus tôt ; c’est pas faute d’avoir un bon paquet d’amis, de connaissances en commun. C’est juste … Tabitha est toujours un peu trop prise, un peu trop occupée, entre deux rendez-vous et quinze mails, entre ses deux hommes et ses deux jobs.
- Damn, you even have the shadow of a beard ! Thirty years in the making for this one, uh ?