i don't need a new love or a new life just a better place to die (archer)

Jeu 13 Juin 2024 - 4:08

「 i don't need a new love or a new life just a better place to die 」
∙ with @archer davies

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« Em, I need more coffee. » Ils étaient peu nombreux à pouvoir s’adresser à elle de la sorte, à utiliser ce surnom que seuls les gens qui lui étaient les plus proches pouvaient employer. Pourtant, il y avait de ces clients qui l’avaient vu grandir. Qui avait assisté aux scènes cruelles de ruptures dans le stationnement de ce diner, qui l’avaient vu en larmes, offrant vengeance en son nom, gamine qu’ils étaient venu à considérer, avec le temps, comme si elle était leur propre enfant. De parfaits inconnus qui représentaient à ses yeux tout ce qu’une famille aurait dû être. Qui lui offrait tout ce qu’elle n’avait jamais eu. Eux avaient gagné le droit, de par leur bienveillance, à s’autoriser la familiarité. C’était ces mêmes clients qui donnaient à ses journées une certaine routine. Elle pouvait deviner l’heure simplement en jetant un coup d’œil aux habitués assis à ces places qui portaient presque leur nom à force. Et en toute complexité qu’elle était, autant elle pouvait se complaire dans cette routine, autant elle se retrouvait parfois à espérer qu’un évènement majeur vienne chambouler son quotidien.

« Comin' right up. » La carafe en main, elle se dirigea vers la table et vint emplir la tasse pour la troisième fois dans la demi-heure. « You should probably slow down with the coffee. » Elle ne se serait jamais permis la chose avec d’autres, mais elle savait qu’il ne s’offusquerait pas du commentaire. « You know, just looking out for you. » Que pouvait-il bien en avoir à faire de l’avis d’une gamine, qu’elle se soucie de sa santé? Peut-être rien, et aux vues du regard qu’il lui lança, elle comprit qu’il n’était pas près de changer les habitudes. « I know, at your age… » Chaque fois, la discussion était la même. Comme une danse aussi familière pour l’un que pour l’autre. Et une fois leur échange terminé, elle retourna derrière le comptoir, déposant la carafe à son endroit désigné, avant d’annoncer, sans que ça ne soit réellement nécessaire, à ses collègues qu’elle prendrait sa pause repas. Encore cette routine ennuyante dans laquelle elle se perdait jour après jour. Les mêmes pauses aux mêmes heures, les mêmes discussions, plus ou moins, avec les collègues. Et comme il lui arrivait de plus en plus souvent ces jours-ci, elle se posa à table, son repas devant elle, en contemplant sa vie. Elle que ses enseignants avaient promis à un grand avenir, elle avait parfois l’impression de ne pas avoir su vivre à la hauteur de ce que l’on attendait d’elle. Contemplant la pièce dans laquelle elle se trouvait, ces murs qui ne semblaient pas avoir changés de couleur depuis l’ouverture des années plus tôt – si ce n’était qu’elle avait terni – autant elle pouvait trouver la chose un brin désolante, autant elle savait, elle serait triste le jour ou elle viendrait à accrocher son tablier... si un tel jour venait à arriver. Encore là, faudrait-il qu'elle ose se détacher de cette routine, qu'elle réussisse à se raccrocher à cette confiance que d'autres avaient eu en elle, confiance qui semblait parfois s'être dissipé de sa propre personne.