fire meet gasoline (andy)

tw: bizutage

Parce qu’il avait eu l’audace d’ouvrir une fois de trop sa grande gueule la veille, Adrian avait été désigné de corvée de bleusaille ce jour-là. Un nouvel élément débarquait à la caserne en tant que pompier volontaire, et pour son tout premier jour au sein de leur grande famille, on lui avait confié l’immense honneur de le guider de son arrivée jusqu’au soir, bien que ses horaires à lui seraient plus souples, et de lui présenter les quelques grandes lignes de ce qu’était une « journée type » à la caserne, en espérant qu’aucun incident ne se déclenche d’ici-là et ne les appelle en intervention sur le terrain. Chose pour laquelle néanmoins, Adrian priait très fort.
Car à sept heures quarante-cinq ce matin-là, à la relève de l’équipe de garde et début officiel de son service, droit comme un « i » dans son uniforme cintré, celui du bleu sous le bras, il attendait fermement leur nouveau collègue, un certain Andrew, sur lequel l’équipe au grand complet s’était déjà bien renseignée. Comme dans n’importe quelle corporate, on leur avait annoncé l’arrivée imminente de Lewis plusieurs jours à l’avance, et puisque l’on pouvait être pompier, braver les flammes et être aussi avides de ragots que des concierges, tous avaient écumé les réseaux et les pages google afin de se renseigner sur le nouveau venu. Ainsi avaient-ils découvert un profil haut en couleur, s’annonçant, de ce qu’Adrian en déduisait, déjà fort prometteur niveau caractère et audace. Les fortes personnalités, à la caserne, ce n’était pas ce qu’il manquait, lui en tête de liste, et il n’était franchement pas sûr que la recrue énergique et extravertie qu’il avait vu défiler en photo sous ses yeux dépités ne soit compatible avec son propre caractère. Cependant, il se devait de lui laisser sa chance, comme à tous les autres.
Et lorsqu’Andrew était enfin arrivé, il avait eu sa place désignée à leur table, pour le sacro-saint petit déjeuner qu’ils partageaient tous, avant de commencer la première séance de sport de la journée une demi-heure après. Andrew allait découvrir à quel point la vie de pompier était millimétrée. Et si d’ordinaire la séance se passait en salle avec tous les équipements dont la caserne disposait, jour de bleusaille oblige, l’équipe n’avait pas lésiné sur l’entraînement et avait enchaîné les tours de course à pied le long des bâtiments formant l’ensemble de l’oceanside firestation. Bizutage bon enfant qui les faisait toujours rire, idéal pour une mise en jambes dans la bonne humeur.
S’en était suivie la visite express des différentes infrastructures, de tous leurs locaux, du matériel et de leurs équipements, en passant par les dortoirs, où il leur arrivait de grappiller quelques heures de sommeil bien mérité, les casiers – et trônait sur celui d’Andrew son nom écrit en grosses lettres au marqueur sur un post-it jaune collé de travers dessus –, ainsi que les sanitaires et les pièces communes ; il fallait bien que les pompiers se détendent par moment, aussi. La partie préférée d’Adrian était sans doute celle concernant le garage, où se succédaient, bien alignés, leurs camions, citernes, fourgons et autres véhicules de secours, certains neufs et rutilants, et d’autres, vers qui son cœur allait toujours, ayant un peu plus de « vécu » et de bosses.
Un peu avant midi, le Chef les avait réunis devant le garage, pour l’exercice de « la manœuvre » et s’entraîner sur le scénario du jour : un feu de cage d’escalier, avec une victime coincée dans le bâtiment, qu’il fallait secourir. Mise en situation courante, du genre de celles permettant de travailler les automatismes, afin d’être opérationnels et rodés le moment venu, car tous se devaient d’agir rapidement et efficacement face aux accidents sur lesquels ils intervenaient. Le rôle de la victime avait, sans surprise, été attribué à Andrew, afin de le faire participer à l’exercice à la place de choix, ce qui n’avait pas manqué d’amuser Adrian. « Prêt à risquer ta vie, Lewis ? » Enfilant son casque, comme si un véritable feu était en train de dévorer la bâtisse, il l’accompagna jusqu’à l’intérieur, où il devrait attendre l’équipe. « Tu verras, ça va bien se passer, on est des professionnels. » Ne pouvant refréner le petit sourire en coin sardonique qui lui titillait les lèvres, il ne put se retenir d’ajouter : « Essaie de ne pas crier trop fort, on risquerait d’avoir des problèmes avec le voisinage… » icons par xx