la plénitude (maisy)
La musique à la radio comme seule connexion à la réalité, ça fait bien vingt minutes que t'es là, l'aurore comme spectacle subjuguant. Une impression de t'être fait bernée, alors que tu regardes sa porte, qui ne s'ouvre pas. T'essaies de te souvenir de votre dernière escapade sans t'en souvenir. Tu regardes ta valise qui dépasse, la peur qui te prend dans le ventre. Traverser le pays de bout en bout, pour un stupide spectacle, avec des gugus en tutu qui chantent toutes les deux minutes. Tout ça parce que t'as dis que t'aimais bien le film Sweeney Todd, celui avec Johnny Depp. Pas pour les chansons, nan, ça ça te casse bien les couilles Marta, mais pour le côté gore. Au fond, ce que tu fais là, tu ne l'aurais pas fait pour quelqu'un d'autre. Maisy c'était Maisy, et à elle, tu pourrais offrir le monde et te taper plus de deux jours de route pour voir des étoiles dans ses yeux. C'est ton soleil, une des seules personnes qui te connait vraiment et qui t'aime pour ce que tu es, sans aucune condition. Tu vérifies deux trois fois, ton itinéraire, ton niveau d'essence, les endroits où tu pourrais potentiellement t'arrêter. Ouais, au fond, c'est peut-être une bonne chose, te casser, tout oublier, quelques jours. Plus de Soobin, de Richard, de June, plus personne, plus rien d'autre que la route à perte de vue, avec Maisy qui chante à côté de toi, et toi qui la suit, en chantant faux. putain grouille toi que tu sors, au moment où la porte s'ouvre enfin, faut croire qu'elle a du t'entendre. Un sourcil qui se lève quand elle rentre, plus joyeuse que jamais dans ta voiture. Vraiment différente, irrémédiablement opposées, nées pour être les meilleures amies du monde, comme quoi la logique n'a rien à voir avec les atomes crochus. Maisy, qui aurait pu sortir du magicien d'Oz, Dorothy dansant sur les briques jaunes, toi ne jouant que les nains grincheux, gâchant l'ambiance, râlant des paillettes collantes qu'elle te fout dans ta vie morose. Tu la regardes du coin de l'oeil avant de rigoler face à sa bonhommie, contagieuse, qui te fait rappeler que t'as de la chance d'avoir croisé sa route, des années plus tôt. T'sais qu'on peut encore changer d'avis ? espérant qu'elle fasse machine arrière, les sentiments qui se mélangent, te disant que finalement c'est exactement ce qu'il te faut, une escapade avec ta meuf. Bon, ok, let's go. que tu sors en appuyant sur ton accélérateur, prenant la route, prête à traverser les états. qu'est ce que je fais pas pour toi meuf que tu sors en rigolant en la voyant chipoter sur les boutons de la radio, pour mettre une de ses playlist. J'espère qu'il y aura des beaux mecs dans ce spectacle, que ça en vaille réellement la peine y a que avec elle, que tu peux en parler, tes peines de coeur, ne pas être la salope, celle qui s'est trop souvent trompée. Avec elle, t'es pas l'amante de Soobin, t'es pas celle qui est tombée amoureuse d'un homme de foi, avec elle, t'es juste Marta. T'es juste cette nana qui a besoin d'être aimée, qui n'a pas encore trouvé la bonne personne. Je vais essayer de rouler juqu'en Iowa, puis on essayera de se trouver un hotel et on continuera demain. Après tout, le spectacle ce n'est qu'après demain. Vous avez le temps Je ne partirai pas de New York sans avoir pris une gaufre à Central Park et avoir fait des photos au Madison Square Garden tu hausses les épaules Autant jouer les touristes jusqu'au bout nan ? finalement bien plus emballée que tu pourrais le faire paraitre. J'ai écouté toutes les chansons de Sweeney Todd, faudra qu'on se les mette à un moment, histoire qu'on puisse chantonner avec eux Presque personne sur les routes, l'avantage de partir aussi tôt, prête pour une journée complète sur la route, ayant pensé à tellement de conversations, de jeux, de débat pour essayer de vous tenir réveillées le plus longtemps possible. Alors ça avance sinon avec le type ? un brin méfiante, parce que les mecs après tout c'est tous des trous du cul, des briseurs de cœur, que vous avez eu trop l'habitude de bruler des trucs, de pleurer sur l'épaule de l'autre, à s'appeler en pleurant. Tu espères vraiment qu'elle trouve enfin le bonheur, mais bon, faut croire que vous avez fait des trucs bien merdiques dans votre ancienne vie, votre karma c'est grave de la merde. Tant de choses à se dire, tant de temps à tuer, et le soleil qui explose doucement dans le ciel, comme décor merveilleux de ce voyage.
Dire que Maisy avait bien dormi ce soir-là aurait été mentir. Même si les années s’étaient écoulées depuis qu’elle s’était établie à Oceanside, même si elle s’était habituée à la vie sur la côte ouest, il n’en restait pas moins que pour Maisy, il n’y avait rien comme se retrouver à New York, ce qu’elle considérait encore aujourd’hui comme son chez-soi. Si la plupart de ses voyages étaient organisés pour des évènements particuliers comme l’anniversaire d’une amie, un mariage, ou baby shower, cette fois-ci c’était simplement par pur plaisir. Il n’avait suffi que d’une phrase pour que la proposition sorte de sa bouche. Sans doute que Marta avait réalisé rapidement son erreur en mentionnant son amour pour Sweeney Todd, parce qu’il n’en avait pas fallu plus pour que Maisy parte sur une lancée, expliquant à son amie qu’il y avait, à cet instant, la comédie musicale Sweeney Todd sur Broadway, les étoiles dans les yeux comme à chaque fois qu’elle avait la chance de mentionner une comédie musicale. Elle s’était abstenue de trop parler, par contre, mais ne s’était pas retenue de proposer à Marta un road trip jusqu’à New York. L’idée était complètement folle considérant la durée du voyage – c’était pourtant toujours plus fun de sillonner les routes que d’embarquer dans un avion – mais au fil des années, elles en avaient fait des choses complètement folles, les deux pourtant, celle-là était loin d’être au sommet de la liste. L’alarme de son téléphone retentit dans la pièce pour la troisième fois lorsqu’elle ouvrit enfin les yeux. Elle prit bien le temps de se frotter les yeux pour en chasser le sommeil autant que possible avant de s’emparer de l’appareil pour le faire taire, voyant par le fait même l’heure. Oh shit. Déjà qu’elle avait mis son alarme le plus tard possible, se laissant très peu de jeu pour être prête à l’heure prévue au programme, les notifications à l’écran lui indiquant deux messages de la part de Marta ne vinrent que confirmer qu’elle devait s’activer. Elle se prépara en un temps record, s’emparant des premiers vêtements qui lui tombèrent sous la main, mais qui seraient assez confortable pour le long trajet, avant de se brosser les dents, pas le temps d’avaler quoi que ce soit, avant de trainer sa valise, et un sac plein de petits trucs utiles, à travers l’appartement et de la quitter, le sac qui lui servait de sac à main sur l’épaule. Elle dévala les marches à toute vitesse avant de se diriger d’un pas rapide vers la voiture. Elle posa sa valise à l’arrière de la voiture avant de prendre place dans le siège passager.
Les yeux qui se plissent doucement alors que la lumière d'un soleil naissant vient éblouir le bitume. Deux secondes, tu te poses la question, savoir si tu as bien prévenu tout le monde que tu te cassais plusieurs jours, que tu serais pas sur ton tel autant que d'habitude. Et surtout, tu te demandes si quelqu'un en aurait vraiment quelque chose à foutre de ça. June te parle presque plus, te foutant au dernier plan, Clyde est sûrement avec une autre de ces pouffiasses insignifiantes. Finnick est sûrement à regarder le sol, priant un Dieu qui te semble flou. Au fond, la seule personne qui se soucie assez de toi que pour remarquer chacune de tes absences est à côté de toi, dansant sur le siège passager. Un sourire que tu ne peux dissimuler en voyant son bonheur te perforer le palpitant. Deux nanas partant à l'aventure, baillant de concert, les cernes tombant jusque par terre, les cheveux emmêlés. Tu t'es rarement sentie aussi vivante qu'en sortant enfin de ta chrysalide. Toi, le papillon de nuit, te cachant dans la tristesse et le formol. Tu piques un biscuit, essayant d'ouvrir l'emballage avec tes dents pour ne pas retirer tes mains du volant. tu me montreras tes endroits préférés de New-York ? Je veux tout voir, tout ce que je ne connais pas de toi une amitié arrivée sur le tard, alors que la solitude était ton quotidien. Tu t'y attendais pas, elle est arrivée comme un boomerang en plein dans ta tête, et t'as plus su t'en passer, dés le moment où cette boule rose bonbon est entrée dans la pièce et t'a regardé comme si t'étais la fille la plus géniale, la plus gentille du monde, tout ce que tu n'es pas. Elle est ton monde et avec elle, t'as cette foutu impression d'être invincible, d'être dans un de ces films stupide qu'elle regarde sans cesse, sachant dés les premières minutes que tout finira bien. Elle t'apporte la sécurité dont t'as tant besoin, que tu ne trouves nul part. j'ai peut-être espéré secrètement qu'on écouterait du rock des années 60 pendant tout le trajet les meilleures musiques selon toi, te voyant secrètement dans un ailleurs, dansant un jive effréné, Clyde menant la danse sous une tonnelle. je veux bien tout écouter mais une seule fois par jour, faut pas déconner, sinon je vais avoir envie de me flinguer et de foncer dans un poteau ne sachant cacher ton sourire ou de te laisser sur une aire d'autoroute ? C'est une idée aussi tiens ... un clin d'oeil rapide avant de reprendre le contrôle de la route. T'as jamais été des plus prudentes sur la route, n'arrivant jamais à te concentrer plus d'une minute sur la route, sans penser à une chose, bouger, changer de musique, regarder ailleurs. Etonnant que t'ai jamais eu d'accident. Tu tapotes sur ton volant, chantonnant, regardant les voitures, très peu en somme pour un début de journée, t'espères ne pas avoir d'embouteillage. Tu regardes l'heure, dans une heure environ, tu devrais arriver à la station essence que t'as indiqué sur ta carte avec la note "sert des croissants fourrés, a l'air bon". T'avoueras pas que t'as passé des heures à tout organiser, à faire en sorte que ça soit parfait, même si la finalité c'est des mecs eunuques en collant, ça en vaut la peine. Tu t'emmerdes rapidement, bâillement sur bâillement, besoin d'un sujet de conversation croustillant. Quoi de mieux que votre besoin incessant de testostérone dans votre vie, vos mauvais choix en matière de mec, surtout que toi aussi t'en as des choses à raconter à Maisy. si tu étais arrivée à l'heure prévue, on serait plus qu'à trente minutes de la station essence, c'est pas de ma faute. Promis, je te paierai un café. tu lui donnerais tout pour quelques ragots croustillants, et pour en savoir plus sur ce "Julian" alias "trop beau pour être vrai" ou "encore un connard de plus". T'essaies de garder ton sourire bienveillant, de ne pas montrer que ça te dit rien qui vaille cette relation. A chaque fois, elle a souffert, à chaque fois t'as fait confiance, des grands sourires, t'as payé des cafés, t'as ri, pour que finalement tu te retrouves avec Maisy à ramasser à la petite cuillère. Pas cette fois, pas une fois de plus. Tu la défendras bec et ongle et si il faut que tu lui taillades la gueule, tu le feras Marta. T'es plutôt douée avec les corps, t'aurais pas de mal à le dissimuler. que des cours de guitare ? Il a rien essayé ? et je l'ai peut-être invité ... New-York ton pied qui appuie sur l'accélérateur un peu trop fort, tes yeux surpris, ne sachant pas cacher ta crainte. New-York carrément ? tes mains qui se crispent doucement sur le volant de ta caisse, essayant de ne pas imaginer ta meilleure pote pleurer, abandonnée à son triste sort. Respire, y a de bonnes personnes dans ce monde, il est peut-être gentil ... mon cul ouais. c'est que tu dois vachement tenir à lui alors ... faudrait que tu me le présentes ... elle te connait par coeur, t'as beau faire la gentille, t'imaginer au pays des bisounours, avec des jus de fraise et des papillons, tu penses juste au fait que tu comptes bien lui faire comprendre ce qui lui arrivera si il ose seulement faire un pas de travers. de mon côté, tu devineras jamais qui est revenu dans les parages autant continuer dans les sujets qui fâchent après tout. Ensuite, vous aurez bien mérité votre café ennemi public numéro 1 alias Soobin, alias ton ex avec qui t'es resté trois ans, alias ce beau salopard qui était marié et qui s'est cassé sans te laisser un mot dans la rue, et il a eu l'audace de faire comme si il me reconnaissait pas. Les hommes c'est tous des trous du cul l'image de Clyde passant un instant dans ta tête, est-ce que lui est différent ? Bah c'est ton pote c'est pas la même chose après tout. Le clignotant à droite pour indiquer que tu sors de la route on se prend un café xxl je te préviens, je suis déjà crevée. J'ai vu qu'ils faisaient des croissants fourrés aussi la bouffe, seul point où tu montres une parcelle de bonne humeur, aimant plus la nourriture que le genre humain.
À sa question, elle secoua la tête avant de réaliser qu’elle ne pouvait pas vraiment la voir, si ce n’était que du coin de l’œil. Enfin, elle espérait. Elle connaissait quand même assez bien Marta pour savoir que, malgré que son dossier soit étonnement vierge, il n’en restait pas moins qu’elle n’était pas nécessairement toujours très concentrée sur sa conduite. Maisy se disait parfois que c’était un miracle qu’elles soient toujours en vie vu les nombreux road trips qu’elles avaient faits, et vu le nombre de fois ou elle s’était retrouvée dans le siège passager de cette voiture.
Le soulagement lorsque le sujet changea et que Marta vint à parler de ses histoires. Maisy préférait de loin écouter que parler – quand bien même, lorsqu’il s’agissait de Julian, elle semblait plutôt volubile – et avec Marta, elle était toujours bien servie. Elle pouvait passer des heures à l’écouter parler de ses histoires de cœur, et dieu sait, elle aurait tout le temps du monde au cours des prochains jours pour en entendre tous les détails. Il ne suffit que d’une question pour que le regard de Maisy ne quitte la route et se pose sur la conductrice. Même pas le temps de demander de qui elle allait parler que la réponse vint. Quiconque ne savait pas les tenants et aboutissants des histoires de cœur de Marta n’aurait pu déchiffrer ses paroles, mais pour Maisy, même pas besoin de le nommer qu’elle savait, et ça n’augurait rien de bon.
Tu ne peux t'empêcher de te demander, ce que ça ferait de partir, de ne jamais revenir. De réaliser tes rêves, reprendre des études peut-être, intégrer l'école de police, sûrement la médecine légale. Tu te vois déambuler dans d'autres lieux, dans des rues inconnues, devenir l'aventureuse que t'as toujours voulu être. Etre exploratrice de nouvelles vues. Parce que parfois t'as cette impression de tourner en rond, d'avoir tout vu, de t'essouffler, de voir le temps qui s'écoule bien trop vite, spectatrice des changements ailleurs sans que tu puisses réellement accomplir les tiens. Courir, loin, très loin, ne plus être la fille des gagnants du Lotto, ne plus être la casse couille de service, la meilleure amie un brin trop imposante. Etre juste toi, tourner la page, créer une nouvelle peinture. Tu te demandes si tu manquerais à tes parents, si tu manquerais à Clyde et un instant, t'as un pincement au cœur, de te dire que sûrement pas, qu'ils auraient peut-être enfin une paix bien méritée. Se reposant après une tornade bien trop longue, regardant tout les dégâts qu'elle a pu faire sur son passage. Le soleil orangé prenant place dans toute ta voiture, un simple regard vers elle pour te rendre compte qu'elle éblouit, tellement belle, et si peu de gens qui le remarque, quel putain de gâchis. au fond, j'ai toujours voulu visiter New-York. Faudrait qu'on s'organise ça à Noel aussi, apparemment c'est magnifique. Je rêve de voir le grand sapin là, à Rockefeller Center depuis que j'ai vu maman j'ai raté l'avion un souvenir d'une Marta émerveillée devant la vieille télé cathodique que vous aviez à l'époque où vous n'aviez rien, les étoiles pleins les yeux en t'imaginant la magie d'un arbre aussi grand, te souvenant de l'odeur de cannelle qui flottait dans ton salon pendant que ta mère préparait le repas. Une partie de cette âme de gamine qui reste ancrée sur ton myocarde, malgré ton âge adulte, tu continues d'éviter les flaques et à faire la funambule sur les bords de trottoir. Bien plus tendre que ce que tu laisses paraitre Marta.
faut croire que t'as pas choisi le bon passager Clyde te percutant directement l'esprit, alors que tu te vois, main dans la main avec lui à essayer d'apprendre quelques pas que vous avez vu à la télé, lui te faisant tourner sous la lumière de la lune, au secret du monde. prochaine fois Clyde vient avec nous, il me soutiendra dans mon choix de musique les imaginant avec leur guitare, te faisant des improvisations pendant que tu conduis, toi chantant un peu faux par dessus leur voix cristalline, bercée par leurs rires. T'as toujours pensé qu'ils finiraient ensemble ces deux là, tellement similaire, les imaginant se chanter des sérénades. T'as jamais bien compris ce qui les a retenu, ce qui a fait qu'ils n'ont jamais sauté le pas. Maisy te dirait que c'est parce que c'est pas d'elle qu'il était amoureux, toi tu répondrais que c'était qu'un beau tissu de connerie. Une heure de musique pour toi, une heure de musique pour moi, comme ça tout le monde est content un check de fait avant qu'elle commence à mettre une des chansons la ballade de Sweeney Todd qui commence à se faire entendre dans toute l'embarcation. Tu continues de te concentrer sur la route, en regardant la radio, en ouvrant un paquet de biscuit, en regardant ton amie. T'en fais pas j'ai l'habitude de faire plusieurs choses en même temps te mettant sur la bande de droite, si peu de monde sur la route, que t'as cette impression qu'elle t'appartient. comme tu veux, j'ai vu qu'ils faisaient un latté à la citrouille, ça doit être pas mal. Ils rajoutent de la cannelle en plus et dieu sait que tu aimes ça, toi qui en fout dans chacune de tes pâtisseries.
Le sujet de Julian arrivant rapidement sur le tapis sans que tu puisses cacher ton anxiété face à cette nouvelle histoire, qui va beaucoup trop vite pour toi. Trop de fois Maisy s'est emballée, elle qui rêve d'eau de rose et de pâquerette. Trop longtemps bercée par ses comédies musicales et ses histoires qui finissent bien. Maisy qui voit l'amour de sa vie dans chaque homme qui lui accorde de l'attention et qui lui dit ce qu'elle veut entendre. Au début, les deux premières fois sans doute, t'étais heureuse pour elle, emballée même. Tu les as même rencontré - vieux tas 1 et coincé 2. Tu leur a souri, tu les as même trouvé sympa, intéressant, avec de la conversation. Et puis, ils ont dégommé ta Maisy, lui brisant son petit cœur, l'endurcissant à chaque fois. Et à partir d'insignifiant 3, t'as arrêté d'être sympa et t'as laissé paraitre ton vrai visage. T'as toujours eu raison, arrivant même à limiter la casse avec certains de ces imbéciles. Et là, en la voyant parler de -trop beau pour être vrai- tu espères secrètement que t'as tord, que c'est vraiment le mec exceptionnel qu'elle te dépeint, qui veut vraiment la respecter, prendre le temps et lui donner ce qu'elle mérite tant. Néanmoins, tu restes toi et tu ne peux t'empêcher d'être celle qui essaie de voir la partie immergée de l'iceberg, de trouver la chose qui cloche, qui pourrait faire en sorte que tu la ramasses encore une fois à la petite cuillère. je ne vais pas m'emballer. Disons que c'est un mec qui prend son temps. tes freins qui pilent assez que pour voir Maisy mettre ses mains sur le tableau de bord par réflexe. Personne derrière toi, reprenant ta route comme si rien était. New-York, si loin, seule avec lui. Et si c'était un psychopathe, un Ted Bundy en puissance, belle gueule, à attendre patiemment que sa proie soit seule et vulnérable pour attaquer dans un coin à coup de pelle. Garde ton calme, Maisy est grande, elle fait ce qu'elle veut, même si ça te fait bien chier, faut le reconnaitre. Tu savais pas lui proposer un rdv moins loin avant de te taper des jours complets avec lui dans une des villes les plus dangereuses du pays ? Imaginant Maisy et Julian faire la même route que toi actuellement, te disant qu'il pourrait l'abandonner quelque part, à la moindre altercation, tellement pas prudent. Putain Maisy. ouais je comprends, t'es si spontanée. T'as pas pensé au fait qu'il pourrait ... je sais pas ... te kidnapper et te laisser dans une cabane enfermée ? J'ai déjà vu ça dans un documentaire. ouais, tu regardes surement trop de films d'horreur, peut-être que ton taff te monte à la tête. Néanmoins, t'en as déjà vu bien assez pour savoir que tout le monde n'est pas aussi bienveillant que ta meilleure amie.
Le sujet qui se poursuit avec tes propres maux de palpitant. Ton altercation avec Soobin comme sujet principal de ta semaine. Tu ne peux pas t'empêcher d'avoir mal, le coeur se brisant doucement. Tu pensais avoir tourné la page, qu'il ne soit plus que brouillard. Toutes les cicatrices à peine colmatées s'étant réouvertes de manière violente, en le revoyant là, sur le trottoir mouillé. Il ne t'a même pas reconnu, et toi, tu t'es sentie mourir, comme si une partie de ta vie - l'une des plus importantes tu ne peux le nier - n'était plus rien. Tu n'es même pas un souvenir auquel il pourrait penser un soir, tu n'es plus rien, comme si la relation la plus importante de ta vie n'a en fait jamais existé, que dans ta tête. Tu essuies doucement les quelques larmes qui coulent le long de ta joue, priant pour qu'elle n'ait rien vue. T'es pas de celles qui pleurent d'habitude, tu sais pas pourquoi ça te met autant en colère, de te dire que finalement il a gagné sur tout les points, réussissant à te briser le cœur encore maintenant, des années plus tard. je l'ai attrapé. Je me suis dit que ça allait être mon grand moment, enfin pouvoir avoir une explication, une excuse, je sais pas ... il m'a regardé comme si j'étais une dégénérée et il m'a demandé mon prénom ... une amnésie apparemment ta voix qui te reste dans la gorge je sais pas si c'est vrai ou si c'est juste une putain de manipulation pour essayer d'esquiver tu ne peux t'empêcher de rire, te garant, déjà presque deux heures que vous êtes sur la route, et l'envie de t'étirer, de marcher un peu, prendre un peu l'air avant de reprendre. je devais être une sacrée salope dans ma vie antérieure pour avoir un karma pareil. Si ça continue, je vais finir vieille fille avec un chat, faisant tapisserie au mariage de mes amis ton bras qui se met autour de ses épaules, alors que vous avancez vers le petit café, soufflant sur tes mains.
La vie semblait si simple lorsque Maisy se trouvait sur le siège passager de la voiture de Marta. Elles pouvaient refaire le monde pendant des heures tandis qu’une playlist de leurs chansons favorite faisait office de trame sonore pour leurs escapades. Elle semblait aussi idyllique lorsqu’elles commençaient à faire des plans pour le futur, à s’imaginer prendre la route pour de nouvelles destinations comme elle le faisait à l’instant,Marta lançant l’idée de retourner à New York alors qu’Oceanside disparaissait tranquillement du rétroviseur.
Et lorsque Marta vint à aborder le sujet de Julian, Maisy peina à contenir sa joie et son excitation face à l’idée du voyage qui l’attendait en sa compagnie, joie que Marta ne partageait visiblement pas. Maisy savait qu’elle était du genre à s’amouracher trop rapidement du premier venu qui la traitait avec un minimum de décence, pour au final, quelques mois plus tard, finir avec le cœur brisé. Elle savait aussi que c’était Marta qui, à chaque fois, venait la ramasser à la petite cuillère, venait panser son cœur brisé. Elle se comptait chanceuse de l’avoir dans sa vie, et cette fois-ci, Maisy sentait que c’était différent. Elle n'aurait pas été en mesure de l’expliquer à qui que ce soit, même à celle qui la connaissait mieux que quiconque, mais il y avait quelque chose chez Julian qui lui inspirait confiance, une douceur et une bienveillance qu’elle n’avait jamais réellement connu avec les hommes qui avaient partager sa vie. Elle avait beau vanter les mérites de Julian, elle savait pourtant que c’était inutile, que Marta ne se fierait qu’à son intuition et qu’à sa propre impression lorsqu’elle viendrait à le rencontrer. Et peut-être était-ce parce qu’elle redoutait ce qu’elle aurait à dire par la suite que Maisy retardait le moment fatidique. Parce qu’elle aurait sans doute le cœur brisé si Marta venait à lui confier qu’elle avait l’impression qu’il était comme les autres. Parce qu’elle avait toujours eu raison, Marta, sur chaque homme qui avait laissé sa marque sur Maisy. Toujours elle lui avait dit de redoubler de prudence, mais toujours, Maisy écoutait son cœur battant plutôt que sa tête. Elle s’était juré, après le dernier, que c’en était fini, qu’elle ne referait plus jamais la même erreur, mais voilà qu’elle retombait dans les même patterns.
Poursuivre avec les histoires de cœur de Marta n’était que la suite logique – et ça permettait à Maisy de cesser de penser que peut-être Marta avait raison, encore une fois. Comme toujours.
Parfois tu repenses aux moments de l'enfance, aux éternelles ombres de lumière, tu repenses aux illusions, à ta manière de penser que tout n'était que blanc ou noir, aux fleurs que tu cueillais pour ta mère, aux sourires de désillusion. Tu essaies de te souvenir d'une vie où elle n'était pas là, constamment comme une comète venant bousiller tout tes retranchements. Toi qui te sentais si bien dans la noirceur, avant qu'elle vienne tout éclater avec sa lumière, faisant ressortir une part de toi que tu pensais enterrée depuis longtemps, depuis que ces foutus numéros sont ressortis de cette vieille télévision défraichie. Tu ne l'attendais pas, et elle est venue tout changer. Avec elle tu as eu cette impression d'en valoir la peine, de pouvoir tout gagner, de devenir quelqu'un, quelqu'un d'autre. Et ça te fait du bien, elle te fait du bien, constamment. Et même si tu dois te coltiner les comédies musicales et les collants à paillette, elle en vaut la peine. Tu ne peux cacher ton plaisir de partir, avec elle, de jouer la touriste quelques jours. Parce que t'en as marre des rues d'Oceanside, des mêmes éternels murs, des rencontres fortuites avec les mauvaises personnes, qui un jour étaient importantes, qui ne le sont plus. Ouais t'inquiète je suis pas très foule non plus, si on fête nouvel an là bas, ça sera tournée des bars, pleins de bons plats à l'hôtel et une bouteille de champagne pour le décompte tu tires déjà des plans sur la comète, avec elle, constamment, pour toujours. Une escapade, une autre, avec Clyde et Ted Bundy à l'arrière, te voyant furtivement lors du baiser sacré de minuit, caressant les lèvres de ton meilleur ami, avant de te concentrer sur la route. Faut dire que l'idée te vient de plus en plus, de cette amitié très forte qui se transforme en quelque chose de grand, de beau, de solide. A force de l'entendre dire, tu finis toi-même par y croire, un peu, pas assez que pour sauter le pas. Tu la vois elle, heureuse, avec lui, ou un autre, heureuse, son sourire éclatant, ayant enfin eu le dénouement qu'elle méritait, pas un énième débile, faisant les bons choix.
Les musiques de Sweeney Todd qui te tapent déjà aux oreilles, clairement pas ton truc les machins lyriques, les scènes où ça chante alors que ça achète du pain. T'as jamais compris. Surement à cause de ces voix de casserole que Sweeney finit par les tuer, les transformer en viande. Ca tu peux le comprendre. Une musique d'Hoobastank qui remet les choses au clair, toi chantant le refrain, ton enfance te prenant à la gorge. Ouais ça va y a quand même de bonnes musiques dans ce truc là une musique de Sweeney qui reprend directement après, la pause fut brève, assez longue que pour t'empêcher de te fracasser dans un poteau. Faut dire que tu roules bien, pas assez que pour la sentir rassurée à côté de toi. Jamais évident d'être à la place du mort, sans aucun contrôle, confiant sa vie à une autre, avec tellement de facteurs pouvant vous amener jusqu'au supplice. Toi tu peux le dire, t'en as vu des gens qui n'ont pas eu les bons réflexes. Néanmoins, t'évites de parler de ce sujet là avec elle, elle qui a cette blessure, cette même cicatrice que toutes ces personnes qui ont perdu un proche. Vendu ! J'espère qu'il y a max de caféine dans ces trucs là, histoire que je puisse tenir assez longtemps avant la deuxième pause. la route qui te parait interminable alors que vous avez à peine commencé le trip.
Le sujet de l'amour, des hommes, de vos myocardes brisés pour vous accompagner jusqu'à la station service. Ted Bundy devenait premier sujet de conversation. T'es que contradiction, entre la peur d'une énième saloperie et l'espérance qu'il soit réellement comme Maisy le décrit. Le problème c'est que toi tu la connais, elle qui a toujours fais confiance, c'est elle la douce, la naïve de ce duo. Maisy elle voit la lumière dans le cœur des gens, elle ne peut penser que les gens peuvent être foncièrement méchants, faisant mal par pur intérêt, simplement parce que elle ne ferait même pas de mal à une mouche. Contrairement à elle, toi tu n'es plus dupe. Tu y as cru pour le premier, tu as commencé à te douter quand elle a toqué chez toi en pleurant pour le deuxième et à partir du troisième, tu n'as même plus laissé paraitre un sourire. Faut bien que l'une de vous deux s'endurcisse, et si ça doit être toi qui joue le rôle de la méchante, qui essaie de voir les part d'ombres chez Julian, tu endosseras ce rôle sans sourciller. Tu n'en veux plus, des journées avec elle sur ton épaule, pleurant, le cœur brisé, à deux doigt d'éclater et toi avec cette sensation de pouvoir bousiller ta vie, pour éclater la gueule de celui qui a eu raison de ta meilleure amie. Manipulateur de merde, donnant ce qu'elle veut, les belles phrases, les beaux cadeaux pour mieux l'achever quand ils se lassent. T'espères que lui n'est pas comme ça, vraiment, parce que tu satures, qu'elle ne supportera pas un énième palpitant bousillé. Que t'as pas envie que cette flamme se taraude, qu'elle devienne aussi fermée que toi, qu'elle ne soit plus aussi gentille, qu'elle devienne une âme errante, non tu ne veux pas de ça, pas pour elle. Tu restes là grommelant, à l'idée de la voir avec lui dans les mêmes rues que tu vas découvrir toi. Tu trouves ça trop tôt, imaginant toutes les situations, sans jamais penser à une bonne, à une situation où il lui prendrait la main, la chérirait comme elle en a le droit, se rendant compte qu'elle est la plus belle femme du monde. j'aime quand même pas ça. que tu sors Grumpy, parce que t'as plus d'argument, qu'elle ne t'écoutera pas de toute façon. Essayant de ne pas penser à une page de journal fictive parlant de cette histoire comme d'un fait divers oubliable. Trois mois c'est pas assez pour cerner quelqu'un toi t'as fallu trois ans, trois ans où tu pensais vivre le parfait amour, où tu ne savais pas qu'il avait une femme, où il s'est cassé une journée sans plus jamais te donner de nouvelles. j'aurais bien aimé que tu me présentes ce type avant de te casser ainsi avec lui. histoire que tu puisses mettre un caractère sur une image, que tu puisses savoir exactement à qui tu as affaire dans ce duel. Bonne idée la localisation. Au moins que je sache où tu es, que quelqu'un ici puisse garder le contrôle si ... ouais bon, t'as sûrement maté trop de films. Je te fais confiance tu sais, c'est juste que je m'inquiète pour toi et que tu ne lui fais clairement pas confiance, à Ted Bundy, il est louche, t'es sûre que tu l'as déjà vu dans une enquête de police, ou qu'il ressemble à quelqu'un que tu as cru voir.
Tu as peur, constamment, parce que ton coeur est aussi brisé, que t'as vécu le pire scénario possible, que tu veux pas qu'elle ressente la même chose, de penser connaitre quelqu'un, de faire confiance à cent pourcent, d'imaginer une vie, un avenir avec lui, des enfants, un mariage, parce qu'il est omniprésent et finalement que tout se détruise, implose, pour qu'elle se retrouve là, pleurant devant les dégâts causés. Tu ne peux pas t'empêcher d'être amère en pensant à Soobin, à cette rencontre que tu as tant attendu, que tu n'auras jamais, vengeance volée par un accident qui lui a retiré sa mémoire. Là ou lui est ta plus grande histoire d'amour, toi tu n'es plus rien, plus rien pour lui, qu'une odeur familière, un souvenir détruit dans une case introuvable. je ne l'ai pas reconnu ... enfin si c'est bien lui, genre le corps c'est le même, mais le regard, la voix, la manière de parler. Il était doux, tendre, tout ce que Soobin n'était pas. J'avais l'impression d'être face à un inconnu ... tu ne peux en parler qu'avec elle, de cette vulnérabilté, parce que c'est avec elle que tu as hurlé, pleuré, que tu t'es déchirée en voyant qu'il avait pris tout ses vêtements, ne laissant comme seule trace de son passage dans votre appartement qu'une lettre, qu'un verre d'eau à moitié rempli près de l'évier. Tu l'as aimé, bon sang que tu l'as aimé, et cet amour n'est pas mort, ne le sera jamais, parce que tu n'as pas cette occasion de tourner la page comme tu aurais aimé le faire. une impression que la colère que j'avais vis à vis de lui ne lui était pas destinée, il me regardait, bon sang, comme si j'étais n'importe quelle femme dans une rue qui l'accoste. Même pas un bref souvenir, rien, ne pouvant me donner aucune explication à la plus grande destruction de ma vie te souvenant que tu comptais lui parler de cette envie d'enfant, d'avancer, de cette deuxième chambre qui ne servait à rien. Tu te sens tellement ridicule maintenant alors que tu penses à cette Marta, un brin romantique, enterrée depuis longtemps. Arrête de me regarder comme ça, je sais bien ce que tu penses. tu vois Clyde, l'imaginant avec cette blonde, l'embrassant dans le cou, et tu ne peux t'empêcher de réfréner un frisson. Avoir un cœur brisé c'est une chose mais qu'il soit brisé par mon meilleur ami c'est trop ... trop de choses à perdre dans cette expérience et tellement à gagner, alors qu'il te connait par cœur, qu'il t'aime pour ce que tu es, que tu pourrais vivre une vie dans ta barque avec lui et des sandwich au thon. et puis je ne l'intéresse pas de toute façon, il me l'aurait déjà dit hein ... sauf qu'il est comme toi, les sentiments restant bloqués, dans le myocarde, les lippes fermées, sans jamais oser, réflechissant trop. Non, trop à perdre.
Tu te gares, sortant de ta voiture, t'étirant, la prenant par la main, te dirigeant vers le café, prenant deux lattés à la citrouille, restant devant la vitre alors qu'une fine pluie commence à s'annoncer. c'est vachement bon ce truc dix, vingt minutes avant de retourner sur la route. Lui proposant un truc à manger bon là on est dans l'Utah, je propose qu'on roule jusqu'à Denver, là on trouvera un petit hotel et on repartira tôt demain matin que tu sors en regardant ton maps. Courant jusqu'à ta voiture, pour ne pas être trop mouillée, reprenant la route de plus belle.
Au moins, sur ce point, elles étaient sur la même longueur d’ondes, quoi que Maisy était bien plus enchantée à l’idée de se délecter de bons plats à l’hôtel et d’ouvrir une bouteille de champagne dans le confort de l’établissement, qu’elle l’était à l’idée de se coltiner de parfaits inconnus dans des bars. Elle avait toujours été plus casanière des deux, et c’est sans doute ce qui faisait qu’elles se complémentaient si bien, Marta et elle. Là ou Maisy parvenait parfois à freiner les ardeurs de Marta, elle l’aidait à sortir de son cocon, aller un peu plus vers les autres qu’elle ne le ferait naturellement. Elle s’imaginait déjà la scène, se projetant dans un avenir absolument incertain, les lunettes roses sur les yeux, Julian à ses côtés pour le fameux baiser de minuit, et rien que d’y penser, son petit cœur s’emballait. Elle savait pourtant que ce n’était là que des rêveries, et qu’il lui fallait revenir sur terre, mais elle se plaisait à vivre dans ces illusions. C’est la voix de Josh Groban retentissant dans l’habitacle qui se fit entendre et qui la sorti de ses rêveries.
Elle écouta ensuite Marta lui parler de ses histoires de cœur à elle, les sourcils froncés tandis qu’elle lui racontait sa rencontre avec l’autre, celui dont elles ne devaient plus prononcer le nom. Elle resta muette un instant, tentant de trouver les bons mots. Tentant de ne pas laisser la colère qui l’envahissait prendre le pas sur tout le reste. Elle ne pouvait s’imaginer ce que c’était que d’être incapable de tourner la page, de ne pas avoir eu l’occasion de clore une histoire en bonne et due forme. Parce que Maisy, on lui avait toujours fait comprendre bien clairement que c’était terminé. La douleur n’en avait pas été moins vive, mais ça lui avait toujours permis de faire son deuil, ce qu’elle avait l’impression d’être chose affreusement difficile, sinon impossible, pour Marta.
Elle la suivit, n’ayant pas d’autre choix, sa main dans la sienne, avant que les boissons ne soient commandées, puis reçues. À l’abri, regardant la pluie tomber, une gorgée puis deux, le bonheur de retrouver un peu de caféine.
Tu aimerais tant appuyer sur l'accélérateur, ne plus jamais regarder derrière toi, partir, partir loin de cette ville qui te hante. Est-ce que tu manquerais à quelqu'un réellement ? Ne plus jamais voir les coins de rue qui hante, cette rue où tu l'as rencontré lui, revoir tes parents et leur stupide avidité qui ronge leur chair, tout les gens stupides qui leur sourie, faisant mine d'être leur ami sans que ça soit réellement le cas. Tu ne restes que pour elle, Maisy et son sourire grandissant, et ses chansons à la con, beaucoup trop niaises pour toi. Les gens se sont toujours demandés ce qu'elle te trouvait, à toi, celle qui tire constamment la gueule, qui agresse tout le monde, si différentes. Maisy aurait pu être amie avec qui elle voulait, tu le penses réellement. Tu ne comprends pas que ça ne soit pas la guerre pour avoir un instant de sa présence. Et même maintenant, des années plus tard, tu continues d'être reconnaissante d'avoir la chance de l'avoir constamment à tes côtés. Même si tu dois bien l'avouer, toi aussi tu te demandes toujours ce qu'elle a pu voir en toi. T'attendant à ce qu'à tout moment elle ait la révélation que tu ne lui suffises pas et qu'elle s'enfuie loin de toi. Tu te prépares à ça en forgeant tranquillement ton armure. Trop peur que ton cœur soit brisé à nouveau, sauf que par elle, ça serait beaucoup trop douloureux. Ton myocarde est calibré pour les douleurs amoureuses, Soobin t'a suffisamment préparé à ça, même perdre Ariès serait une douleur atrocement supportable, mais pas elle, non, jamais elle. Même si ses musiques te font mal à la tête. Tu ne peux t'empêcher de la chambrer là dessus, ta patience s'apaisant à chaque fois que c'est une de tes chansons qui passe, toi qui ne peut t'empêcher de chanter. Ouais, t'es vraiment heureuse de cette escapade, et -même si tu ne l'avoueras pas - tu commences à écouter attentivement les chansons de Sweeney Todd qui passent, histoire de pouvoir les reconnaitre pendant le spectacle. Tu te surprends même à apprécier certains des airs entendus.
Tu pourrais même envisager de préférer écouter les chansons de ces mecs en collant plutôt que de parler de Jeffrey Dahmer. Tu n'arrives pas à comprendre Marta, comment est-ce que vous avez été crée, calibrées, pour vous jeter dans la gueule du loup, pour oublier les pires douleurs, n'avoir aucun système de défense. A quoi ça sert de tenter l'amour, quand les cicatrices des expériences passées ne sont pas encore totalement fermées. Les femmes sont d'un ridicule, guidées par ce foutu espoir, que la prochaine fois sera la bonne. Cette foutue idée qu'il ne faut manquer aucune opportunité, parce qu'on se sait jamais, ça serait peut-être l'homme de votre vie, celui qui changera tout. Toi, tu te refuses d'y croire, l'espoir tu l'as brulé depuis longtemps mais elle, elle s'y accroche encore et encore. Du grand Maisy. Et toi tu as beau lui brandir tout les red flag possible, tu le sais, elle sautera encore, s'éclatant sans doute sur les rochers, ne t'écoutant pas. Elle n'en fera qu'à sa tête et au fond, si tu rencontrais toi aussi le grand amour, est-ce que tu ne ferais pas de même. Après tout, n'es-tu pas de nouveau obnubilée par le feu qui t'a que trop longtemps consommée ? N'as-tu pas Soobin dans l'âme depuis que tu l'as vu ? Te jetterai-tu a nouveau dans la grotte du démon ? Oui, sans hésiter. Alors tu essaies de ne pas juger, de ne pas imaginer la gorge de ce type dans tes mains manucurées si il fait le moindre faux pas, de ne surtout pas imaginer ses mains à lui sur la gorge douce de ta meilleure amie. Tu ne peux t'empêcher d'envisager le pire, combien de personnes as-tu vu sur ta table, qui ont fait confiance à la mauvaise personne ? Bien trop. Mais tu gaspilles ta salive, chacune de tes paroles, de tes arguments sont contre-carrés par ton amie, comme si elle avait préparé son speech à l'avance, s'attendant à chacune de tes remarques, te connaissant finalement par cœur. Et toi tu ne réponds qu'avec ta mine renfrognée, après tout tu ne la changera pas, tu n'en as vraiment pas envie non plus. bon. un premier pas vers toi, une rencontre, toi te demandant déjà quelle stratégie tu pourras utiliser pour faire comprendre à Freddy Kruger que tu es la personne dominante, faudra que tu t'entraines à serrer les mains bien fort et à faire des regards méchants - bon ça, ça ne devrait pas te demander beaucoup d'efforts. en espérant que tu ne sois pas transformée en charcuterie avant ton sourire qui se fane doucement, bon faut que tu arrêtes de rire, prendre les choses un peu au sérieux. je viendrai, faut bien quelqu'un pour lui faire comprendre ce qu'il risque si il te fait du mal et tu es quelqu'un qui arrive facilement à dissuader. je lui dirais directement que je suis très à l'aise avec les cadavres, on ne sait jamais ouais, même si elle a l'air d'avoir confiance en Charles Manson, toi non.
Et la discussion qui passe sur tes propres douleurs, sur tes propres doutes, sur Soobin qui rentre tout doucement dans ta vie, les émois qui reviennent, et l'envie de le revoir. Toi qui te déteste, à mort de pouvoir ressentir tout ces sentiments Tout qui te revient en mémoire, sa main dans la tienne, je pensais que c'était toi, la femme de ma vie et cette foutue voix dans ta tête qui te dit que peut-être c'était vrai, que vous étiez destinés à être ensemble, malgré tout ça, destinés à vivre toutes ces épreuves pour vous retrouver. Malgré tout, tu as tant aimé ce que tu as pu voir de lui, cette nouvelle tendresse, ce regard, la douceur de sa peau, il t'a manqué, cruellement. Il était tellement différent Maisy, une version améliorée de Soobin. Il était doux, tendre et soucieux réellement de ce que je pouvais ressentir et tout ce que tu peux reprocher à ta meilleure amie, tu le fais aussi, tomber dans le panneau les yeux fermés. Il ne se souvient plus du tout de sa femme. Et, il se souvenait de ma boisson préférée. Comme si au fond de lui, j'étais assez importante que pour être restée un peu dans son inconscient t'es surtout ridicule, ridicule de penser que tout sera différent maintenant, ridicule de retomber amoureuse de lui. Et puis Maisy parla d'Ariès, Ariès qui est tellement similaire à toi, le feu qui bouillonne, la vie qui ne lui a pas fait de cadeaux. Si il était si amoureux de moi, il n'aurait pas prévu de me trouver un copain tu ne peux t'empêcher d'en rire, en repensant au pacte que tu avais fait avec lui. A défaut d'apprécier vos partenaires respectifs, quoi de mieux que de trouver la personne parfaite pour l'autre. Si on était destinés à être ensemble, il ne prendrait pas le risque de me dénicher l'homme parfait tout pour te convaincre de la stupidité de cette possibilité, alors que ton coeur ne cesse de se dire, que finalement, finalement, elle n'a peut-être pas tout à fait tord. Tu sais, je pense que c'est simplement un jeu entre nous, cette jalousie mal placée même si ton regard vers elle ne trompe pas, tu es jalouse, constamment, de chaque fille qu'il vous ramène, de chaque regard qu'il a envers une autre. Tu as mis longtemps, trop sans doute, à te rendre compte que votre amitié pouvait amener à d'autres sentiments, bien plus fort, bien plus merveilleux.
La pause qui ne dure qu'une bonne dizaine de minutes avant que tu reprennes le volant, les heures qui commencent à filer, la nuit qui se met à tomber doucement et le premier hôtel que tu trouves fut le bon, une chambre de payée, les clefs de données avant que tu poses tes affaires sur le lit je suis crevée, je pense que je vais pas mettre cinq minutes avant de m'endormir toi te préparant pour prendre ta douche mais avant de dormir, je veux voir une photo de Michael Myers que tu lances en fermant la porte de la salle de bain, souriant de tes bonnes blagues, ouais ton humour n'est pas toujours le meilleur. Tu l'accordes.
Elle pouvait se douter, même sans qu’elle ne la regarde, que Marta était sans doute désespérée par chaque réfutation que Maisy pouvait apporter à ses arguments. Parce que c’était toujours la même histoire qui se répétait. Elles étaient similaires sur ce point-là les deux amies, à s’éprendre toujours dea mauvais hommes, à espérer que cette fois-ci ce serait différent, qu’elles trouveraient enfin le bonheur. Et chaque fois, qu’il s’agisse de l’une ou de l’autre, elles étaient les premières à mettre en lumière ce qui semblait être des red flags flagrants. Elles étaient les premières à tout faire pour protéger le cœur de l’autre. Parce qu’elle se disait bien souvent, Maisy, qu’on pouvait lui briser le cœur cent fois, elle s’en remettrait, mais à l’instant ou c’était sur les joues de Marta que les larmes coulaient, c’était une toute autre facette de sa personnalité qui ressortait. Celle qui était bien enfouie, à mille lieues de la Maisy plutôt joviale qui tentait de voir le positif dans tout. Pour Marta, elle le disait toujours avec un brin d’hyperbole, mais elle serait prête au pire pour la défendre.
Si Maisy était prête à se jeter dans la gueule du loup si facilement, si elle était prête à contrer tous les red flags que Marta pouvait bien lui donner, qu’il s’agisse de Julian, ou de ceux qui avaient laissés leur trace depuis son arrivée à Oceanside, dès lors que c’était sa meilleure amie qui semblait s’apprêter à faire la même erreur, elle était prête à partir en guerre. Le soupire qui s’échappa d’entre ses lèvres devait tout dire. Le regard qu’elle lui lança viendrait sans doute confirmer quelque doute que ce soit sur la réaction de Maisy si Marta venait à lui jeter un coup d’œil rapide. Elle était consciente que tout ce qu’elle pourrait dire risquait d’être reçu avec une contre-attaque, un peu comme elle l’avait fait quelques minutes plus tôt quand Marta avait démontré une certaine retenue face à l’enthousiasme de Maisy.
Après quelques heures de route à plus, elles arrêtèrent à leur première destination – et Maisy fut reconnaissante de pouvoir sortir du véhicule et s’étirer les jambes un peu. Tout comme elle était heureuse de retrouver un lit. Tandis qu’elle entendit l’eau de la douche couler, Maisy se mis à la recherche de la parfaite image à montrer à Marta. Elle ouvrit l’application photos de son téléphone et se rendit dans l’album photo qu’elle avait fait de son voyage à New York avec Julian. Elle fit glisser son doigt sur l’écran afin de faire défiler les images les unes après les autres, avant que l’illumination ne traverse son esprit. Elle navigua de dossier en dossier pour retrouver ses images mises en favoris, persuadée d’avoir trouvé l’image qui lui ferait rapidement changer d’opinion sur lui. À sa simple vue, un sourire niais vint apparaitre sur son visage et il s’en fallu de peu pour que son cœur ne rate un battement. Elle savait que c’était ridicule que son petit cœur se soit déjà autant attaché à lui, mais comme elle l’avait dit à Marta plus tôt au cours de la journée, elle avait l’impression qu’il la comprenait mieux que quiconque, qu’ils étaient sur la même longueur d’ondes sur tellement de sujets, sur leur vision de certaines choses, qu’elle ne pouvait faire autrement que de s’éprendre de lui. Une fois Marta sortie de la salle de bain, il ne fallut que quelques secondes à Maisy pour lui mettre son téléphone en plein visage.