Cleo.. } Chocolat-vanille

tw: aucun

L’or qui n’est pas vraiment or dans les mains, les ongles noircis qui auront besoin d’être frotté, il a un tablier qu’il change parce qu’il est maladroit. Enfin, il n’est pas souvent maladroit Changling mais aujourd’hui il l’est, ne demandez pas pourquoi. Il s’est levé du mauvais pied, enfin du pied des conneries, l’autre il est adroit mais il s’est posé sur le sol en retard. Il a dormi tard une fois de plus, retenu par quelques centaines d’abonnés, une game de plus, et puis on part sur Mario Kart et c’est une course de plus, et puis un round de huit courses. L’amour présent, la fatigue qui cerne les yeux, il savait que ce n’était pas une bonne idée, il devait se lever tôt, y’avait réunion avec les parents, comme de temps en temps, la date varie, c’est le surprise qui attend. Il s’est dit « c’est pas grave, je commence à quatorze heures demain » mais que nenni, car le téléphone a sonné à sept alors qu’il venait de s’endormir. Ignorer, faire la sourde oreille ? On va lui retomber dessus, inutile de s’embourber dans le biscuit, ils l’attendent au tournant et il sait qu’il est un élément essentiel de l’entreprise. C’est maintenant dans cette petite ville que se cache le quartier général des confiseries Wang (et chocolateries, mais ça fait long), quartier général qui a déménagé une fois, deux fois, la Chine bien loin, de fidèles employés et membres de la famille qui les écoutent de loin, un appel en visioconférence, parfois on se lève tôt, parfois on se couche tard, mais c’est pas tous les jours.

Il n’est pas nécessairement de mauvaise humeur mais frustré de ses yeux crevés, frustré de la maladresse qui agite ses mains et lui fait prendre de mauvaises décisions. Travaillant dans l’ombre avec d’autres, il attend leurs reproches, mais il est le fils des propriétaires alors on reste gentil, relativement. Dans cet état, Changling n’écoute pas la critique, il la balaie d’un revers de la main comme un mauvais mate dans Smite. Il explique son point de vue, enfin il n’a pas la force, pas aujourd’hui.

On n’a pas besoin de lui dire, il repose le tablier, en enfile un autre. Couleur rouge, magnifique, le logo qui scintille et il est au comptoir, sa mère qui fronce les sourcils mais ne dit rien. Changement, elle passe à l’arrière, lui au-devant. Il a pris confiance, il a pris l’habitude d’être vu, et le client en face d’elle a un anglais difficile à comprendre, un accent qui n’est pas de la région et sa maman, aussi douce, compatissante, sympathique soit-elle, elle n’arrive pas forcément. Bien sûr, elle connaît l’anglais, mais à quel point ? Changling se vante, c’est les jeux vidéo qui lui ont tout appris, mais y’a pas de quoi se vanter dirait son père car c’est un peu la loose. Et étudier à l’école, dans tout ça ?

Bien longtemps qu’il n’y a pas mis les pieds. Le client repart satisfait, la file se fait plus petite, il ne reste qu’une jeune femme et le regard de Changling s’éclaire comme une guirlande de Noël. « Oh, bonjour ! » Il y a des visages qu’on n’oublie pas, et celui-ci reste gravé dans sa mémoire sans pouvoir mettre un nom dessus. Il demandera une autre fois. D’instinct, il lui tend un échantillon d’un produit qu’elle n’a pas encore goûté (enfin il croit, il n’est pas sûr de connaître parfaitement ses précédents achats et essais). « Que puis-je faire pour vous, aujourd’hui ? Votre dernière visite remonte à quand, la semaine passée ? Même heure ! » Et il exagère à peine.
icons par xx

tw: aucun

Nuit dernière passée devant l'ordinateur à écrire et voilà que depuis la matinée, une migraine atroce torturait Cleo. Elle savait, pourtant, qu'elle ne fonctionnait pas bien sans son minimum de huit heures de sommeils. Mais les mots avaient coulés si facilement sur le clavier qu'elle n'avait pas voulu se forcer à arrêter en si bonne session pour aller se coucher. Ce genre de flux créatif n'était pas si courant pour elle, quand bien même l'écriture était une passion. Comme beaucoup d'autres passionnés, ses histoires avançaient au bon vouloir de son inspiration capricieuse. Ainsi avait-elle choisi de sacrifier une nuit de repos pour le bien de son ouvrage en toute connaissance de la fatigue qui allait l'accabler le lendemain. Mais le savoir et s'y préparer ne voulait pas dire que s'en était moins difficile à supporter pour autant. Cleo détestait se sentir sans énergie. Sans être une boule d'hyperactivité, elle aimait se sentir pleinement dynamique et prête à mener à bien ses objectifs journaliers et ce, avec le moins de difficultés possibles. Imaginez donc son niveau d'agacement et de frustration après une journée remplie de révisions peu concluantes et un retard grandissant sur la rédaction du script du prochain épisode de son podcast. La tête embrouillée et la lassitude grandissant dangereusement jusque dans ses os, la délivrance de la jeune femme arriva sous la forme d'un message de sa prothésiste ongulaire lui proposant d'avancer son rendez vous pour cause d'un désistement. Alors sans hésiter, Cleo avait de suite accepté, le cœur enthousiaste. Pour une fois elle s'était réservé un après-midi pour elle, et pas pour son travail sur lequel elle s'acharnait sans résultat. Puis il n’y avait rien de mieux que d’aller se refaire une beauté manucure lors de ces journées en demi-teinte après tout.

Enfin ça, c'était ce qu'elle croyait  car pour la première fois après son rendez-vous, ses ongles méticuleusement vernis et surmonté de belles paillettes n'avait pas empêché l’anxiété de revenir au galop, accompagnée d’un vague à l’âme qu’elle ne s’expliquait pas vraiment. Petit nuage sombre qui ne semblait pas vouloir la quitter malgré le temps ensoleillé qui l’entourait, Cleo sentait un cruel besoin de réconfort montrer le bout de son nez. Alors aussitôt, les pas de la brune la guidèrent en direction de la seule boutique qui allait sans aucun doute pouvoir l’aider, dernière tentative pour égayer durablement son humeur (au moins jusqu’au soir). Cette boutique, c’était la confiserie-chocolaterie Wang alias l’un de ses endroits préférés. En plus du décor aux couleurs douces et de son atmosphère accueillante, la confiserie regorgeait comme son nom l’indiquait, de sublimes créations comblant parfaitement la dent sucré de Cleo. Et pour preuves de la qualités de leurs produits et de leurs succès, à peine avait-elle franchi les portes de l’endroit qu’elle se trouva être la dernière arrivée d’une assez longue file d’attente. Loin d’en être pour autant agacé (elle qui pourtant pouvait se montrer assez impatiente), la jeune femme profita de ce temps pour tergiverser devant le comptoir, encore incertaine sur sa commande.

Mais quelques minutes plus tard et après avoir jeté (provisoirement) son dévolu sur de possibles assortiments de bonbons, elle se retrouva finalement à la caisse, devant un employé vêtu d'un tablier rouge sur lequel était brodé une étiquette indiquant ce qu'elle présumait être son prénom (qu'elle n'arrivait jamais à retenir) : Changling. “Bonjour !” Qu'elle le salua, ses lèvres s'étirant en sourire enjoué. Sourire qui s'agrandit d'autant plus lorsqu'il lui tendit un échantillon d'un chocolat qu'elle ne semblait à priori pas avoir déjà goûté. Les yeux illuminés, elle s'empressa de s'emparer de la confiserie tout en le remerciant puis, lorsqu'il nota ses nombreuses venues à la confiserie, Cleo ne put que rire, autant d'amusement que d'embarras. Il n'exagérait vraiment pas à vrai dire, elle venait si souvent achetés les douceurs qu'ils proposaient qu'on pouvait presque sérieusement s'inquiéter de sa consommation de sucre. “Il y a cinq jours pour être exact, mais à la même en effet ! En temps normal, j'aurais sûrement attendu au moins une semaine avant de revenir, mais j'étais dans le coin et je n'ai pas pu résister aujourd'hui !” Elle pointa du doigt les chocolats qui lui avaient particulièrement fait de l'œil depuis qu'elle était entrée. “Je n'arrive pas à me décider, pour changer. Vous me conseillerez quoi vous entre le nougat à la pistache et celui aux fruits confits ?" Tournant de nouveau son visage dans la direction du vendeur, Cleo eu soudainement un moment de pause en l'observant plus attentivement, son visage prenant une expression troublée qu'elle espérait ne pas être trop évidente. Le jeune homme lui était, pour une raison encore inconnue, étrangement familier. Ce qui était normal quelque part, puisqu'elle venait assez souvent et était la plupart du temps servi par lui. Néanmoins, Cleo ne pouvait s'empêcher d'avoir la nette impression de l'avoir déjà vu ailleurs. La question cependant - et si son intuition était juste - était de savoir où.
icons par Skate Vibe