un jour, j’ai fais un rêve. w/tyler.

tw: aucun.

Je suis d’accord, normalement, le week-end est fait pour sortir, s’amuser, profiter avec ses amis… mais j’avais autre chose en tête. Toute la journée de vendredi, je l’ai passé avec cette idée en tête. Sûrement une idée saugrenue, voir totalement folle. J’ai gribouillé ici et là, dans un carnet que je traîne partout, sur des feuilles volantes aussi que j’ai fourrées dans mon sac. Même sur les serviettes en papier du nomad kitchens entre deux clients. Oui, j’en suis arrivée là. Quand je suis rentrée dans la soirée, j’ai claqué un bisou sur la joue de papa avant d’aller m’enfermer dans ma chambre. Ok, je suis passée par le frigo pour faire le plein de protéines et de sucre (entendez une tranche de jambon entre deux de pain de mie pour les protéines et une canette d’ice tea pour le sucre). Après ça, j’ai passé la nuit sur cette idée qui fleurissait en moi depuis le début de la matinée. C’est horriblement frustrant quand on ne peut pas se poser, pour mettre ses idées sur papier, notez-le.
Alors j’y ai passé la nuit. Écrire, rechercher, recommencer. Râler aussi parce que ça ne me convient pas. J’ai changé de vinyles au moins dix fois. Je crois aussi que je me suis endormie un peu, la tête sur le bureau.
Il est tôt quand je sors de ma chambre avec un paquet de feuilles sous le bras. Je jauge et lance dans un murmure Papa ? silence complet. Il dort encore, à tous les coups mais je ne peux pas attendre qu’il se réveille. Alors je pose mon parpaing de feuilles sur l’îlot pour lui préparer son café, préparer quelques toasts et de quoi remplir son estomac. En disposant le tout sur un plateau, je glisse mon projet complet sous le bras, plateau dans les mains, équilibre précaire mais qui fera l’affaire jusqu'à sa chambre. Je souris largement quand Azrael se frotte à mes jambes Salut bébé ! Désolée, faut que j’aille voir papa. Les papouilles c’est pour plus tard !
Le reflet aperçu dans une fenêtre me confirme que je me suis endormie sur mes écrits, la trace de feutres sur la joue n’est pas terrible… Couloir traversé, porte de sa chambre ouverte par je-ne-sais quel miracle, je la pousse doucement avec mes fesses. Je pose discrètement le plateau sur le bord du matelas, un immense sourire aux lèvres Papa, debout ! Faut que je te montre un truc ! J’ai eu une idée de malade hier !! Je m'assoie en tailleur, trop excitée pour attendre qu’il ouvre ne serait-ce qu’un œil. Je me suis dis qu’après mes études je pourrais ouvrir ma propre boutique ! Genre, devenir la nouvelle Louis Vuitton ! T’en penses quoi ?! Je pose toutes mes feuilles sur son torse qui s’éparpille déjà partout sur le lit. J’ai bossé le projet toute la nuit !! T’en penses quoi ?? Hésite pas à dire si c’est nul hein ! on ne parlera pas de la grimace que je fais en pensant à ça. Ni la tête que fait tout court après une nuit quasiment blanche.

tw: aucun.

Quarante ans. Période de la vie, où l'on apprécie chaque petite minute de sommeil acquise. C'est une réalité quand on exerce un métier comme celui du blond. De nombreuses années à servir en tant que pompier. Un nombre incalculable de nuits de garde à travailler. Des interventions parfois non de tout repos. Une vie active bien remplie,  jouant sur ses temps de repos, tout comme sa vie personnelle. Les premiers temps, il y a eu les nuits blanches à cause des pleurs d'un bébé. Étranger l'un pour l'autre, il a fallu un temps d'apprentissage. De nombreuses nuits blanches à bercer la petite fille qui se retrouvait avec un père complètement novice. Années passant, d'autres nuits blanches ont succédé. Les petites maladies propres aux enfants, avec des pics de température donnant des sueurs froides au père. Des bras entourant le petit corps, chuchotant pour rassurer. Tout ira bien, il sera toujours là. Puis est venue l'époque des nuits d'angoisse, de contrariété. De colère. Quand en pleine crise d'adolescence, une demoiselle s'autorisait à sortir sans l'aval paternel. Rentrant en plein milieu de la nuit, il l'attendait, installé dans un fauteuil. Ceci, quand il ne réussisait pas à dénicher le lieu de la fête pour aller la chercher. Des nuits blanches, il en a eu, beaucoup. Alors oui, après plusieurs nuits de garde, l'annonce d'un jour de repos est plus que la bienvenue. Sommeil réparateur. Sommeil profond. Sommeil apprécié. Seulement, même après vingt ans, cette petite présence tant aimée parvient encore à jouer sur son repos. Papa, debout ! Grognement de sa part, sans même chercher à sortir la tête de sous les draps. Hestia est réveillée. Bien trop réveillée à son goût. Parfois, il se demande de qui elle tient cela, d'être une pile électrique de bon matin, surtout quand elle a une idée en tête. Probablement de lui, même s'il ne l'avouera jamais. Bras qui se replie pour poser la main sur ses yeux encore clos. - Princesse... Voix rauque, c'est davantage un marmonnement plutôt qu'un mot doux qui franchit ses lèvres. Elle reprend déjà, éparpillant ce qui semble être des feuilles sur son torse. Elle va le tuer. Sa propre fille. Il attrape une feuille de l'autre main mais sans ouvrir les paupières pour la regarder. - C'est parfait ma puce... ça ne pouvait pas attendre que je me réveille... souffle-t-il en tentant de se retourner pour se rendormir. Sauf qu'une masse l'en empêche, probablement sa fille installée sur le lit, et sans doute autre chose. Il pousse alors un profond soupir, rendant les armes. Adieu sa grasse matinée de repos. Merci sa fille chérie. - Est-ce que je peux boire un café avant de regarder tout ça ? demande-t-il résigné.

tw: aucun.

C’est un véritable soulagement d’avoir pu poser toutes mes idées sur papier. Y avoir passé la nuit et le manque de sommeil ne me dérange pas. Je dirais même que ça ne me dérange jamais quand ça concerne l’une de mes deux passions. Je frotte ma joue dans l’espoir d’effacer les traces de feutre. Maintenant que je sais qu’elles sont là… Pas moyen de m’enlever l’idée de les effacer.
Je jette quelques regards à papa, grand sourire aux lèvres, l’espoir que son réveil plus que matinal me sera pardonné plus facilement. Pas que j’essaie de jouer de mon sourire mais un peu quand même. Papa… t’as même pas regardé ! J’ai tout fais, tout regardé ! Si je loue un local, si j’en achète un, si j’en fais construire un ! Le coût des stock, de la matière première ! Tout ! Je ne m’arrête plus de nouveau, attrapant le paquet de feuilles pour lui mettre sous le nez. J'ai même commencé des croquis et aussi les patrons ! Et je grimace en m’arrêtant de parler. Devant la mine déconfite de papa, je regrette de l’avoir réveillé. Moue gênée accrochée au visage, je me décale pour lui laisser un peu plus de place, attrapant sa tasse de café fumant pour lui mettre sous le nez. Pardon de t’avoir réveillé… Mais je t’ai fais ton petit-dej…
Ses traits tirés me prouvent bien qu’il est encore fatigué et je m’en veux. Même si j’ai encore une tonne de truc à lui dire, je scelle mes lèvres pour ne plus dire un mot au risque de repartir dans un monologue effréné qui l’épuiserait encore plus si ce n’est l’achever complètement. Je récupère le reste de mon projet, rassemblant les feuilles désormais éparpillées sur son lit et me penche pour tout poser sur sa table de chevet. C’était nulle comme idée de toute façon. Je me lève du lit, emprise des heures de sommeil manquées, je le contourne pour venir m’allonger vers mon héro, du côté opposé au plateau et venir lui faire un câlin.
Je ferme les yeux une seconde, aussitôt, tous nos souvenirs me reviennent de plein fouet, combien papa a dû se démener pour moi. Son amour qui me donne toujours la force d’avancer, me fait oublier que notre famille n’est pas entière mais reste parfaite. Je me souviens d’un tas de trucs, nos meilleurs souvenirs à mes yeux reste d’avoir toujours vu ses lèvres s’étirer en sourire malgré la fatigue, l’énervement ou  l’inquiétude. Des disputes, je ne me souviens que nos réconciliations. De nos bouderies, nos éclats de rire. Rendors-toi papa.

tw: aucun.

Sa fille est une pile électrique. Le pire, c'est qu'elle n'est même pas dopé à la caféine, il est le premier au courant de ceci. Heureusement, car elle aurait eu raison de lui des années auparavant, et une fois de plus en cette heure bien trop matinale à son goût. Lui qui espérait juste dormir un peu. Plan qui tombe à l'eau et qui ne sera même pas remplacé par une sieste plus tard dans la journée, car ce n'est pas dans ses habitudes. Une fois qu'il est debout, sa journée a démarré. Alors oui, il espérait rester couché deux ou trois heures de plus. Sans ouvrir les paupières il écoute, et s'il n'avait pas non plus l'habitude, il serait étonné que la jeune femme fasse autant preuve de maturité. Dans son projet, car pour ce qui est de le présenter, il y a encore un long chemin à parcourir dans la manière. Est-ce que c'est mieux d'avoir une fille prête à entrer dans la vie professionnelle et qui ne pense pas qu'à s'amuser ? Sous beaucoup d'aspects oui. Mais pour d'autres, même s'il ne l'avouera pas, il aimerait qu'elle profite un peu de sa jeunesse. Sans faire de conneries ni commettre les mêmes erreurs que lui, évidemment. Le moulin à paroles tant aimé reprend, continue. S'arrête. Et finit par lui présenter des excuses, rapprochant une tasse de café de lui vu l'odeur qui parvient à ses narines. Voici qui le décide à ouvrir les yeux, pour se redresser dans son lit. Regard fatigué, il tend la main pour récupérer la tasse de café fumante. - Merci pour cette attention.. souffle-t-il en constatant enfin l'étendu des dégâts sur son lit. Des feuilles éparpillées de partout que la princesse tente de rassembler tant bien que mal. - Ne dis pas ça Hestia, je suis certain que l'idée est super. C'est juste la manière de l'amener ma chérie.. Feuilles rassemblées, elle se relève. Il espère ne pas l'avoir vexée mais apparemment non, puisqu'elle fait le tour du lit pour venir s'allonger à ses côtés. Main libérée pour ouvrir le bras et l'attirer contre lui pour un câlin. Il dépose un baiser dans ses cheveux, profitant du silence qui envahit enfin la pièce et qui lui permet de mieux se réveiller. Des réveils ainsi, ils en ont connu un nombre incalculable au fil des années. Petite fille venant le rejoindre, prétextant un cauchemar et réclamant les bras forts de son papa pour la protéger. Juste eux deux, aucune femme n'ayant réussi à se faire une petite place dans leur famille, pour diverses raisons. La principale étant qu'il fera toujours passer sa fille en premier, et plusieurs ne l'ont jamais compris. Tasse portée à ses lèvres pour boire une gorgée de café alors qu'elle l'invite à se rendormir. - Trop tard, j'ai la femme de ma vie dans mes bras qui va me présenter son projet lentement, pendant que je bois mon café. As-tu un peu dormi au moins ? Pas de remontrances en prévision si elle a fait nuit blanche. Il sait que ça ne servirait à rien, que ça ne serait que des paroles en l'air. Puis ce n'est pas comme si elle a fugué, non elle a fait que travailler sur un projet qui lui tient à coeur.

tw: aucun.

Mon cœur se gonfle quand il me remercie pour le petit déjeuner. Mon père, mon héros. Je ne serais certainement rien ni personne si ce jour-là précisément, il n’avait pas ouvert la porte. On aura beau me répéter que c’était son rôle, je maintiens qu’il était jeune et qu’il aurait pu flipper comme beaucoup d'autres l’ont fait et le feront sûrement encore de nos jours. Et pas une seule fois j’ai regretté qu’il l'ait ouvert cette porte. Alors je rassemble les feuilles et l’écoute me dire qu’il est certain que l’idée est bonne. J’ai une chance inouïe d’avoir un père qui a toujours su croire en moi et mes rêves. Même si je l’épuise et que je peux l’excéder à souhait. Encore une fois : mon père, mon héros.
Tout mon cirque rassemblé en un tas approximatif sur la table de chevet, je suis nettement mieux à présent, une fois que j’ai pu lui parler de mon idée, sûrement un peu foireuse sur les bords, et que je suis allongée près de lui, dans ses bras qui m’ont toujours protégés de tout. Je sais combien j’ai de la chance de l’avoir comme père, j’en ai vu des enfants qui étaient dans pires situations que moi alors je ne me plains pas.
Baiser déposé dans mes cheveux, j’ai aussitôt un large sourire qui se dessine sur mes lèvres et qui illumine tout mon visage. Les yeux clos, je me rends compte que je suis épuisée même si l’excitation de mon projet me tient encore éveillée malgré tout. Mais mon sourire se transforme vite en grimace quand il me demande si j’ai dormi et en guise de première réponse sommaire, un bâillement. Main devant la bouche, je secoue la tête. Un peu. Je crois. J’ai eu une absence au bout d’un moment. Je me redresse à mon tour pour être à côté de lui, déposant un bisou sur sa joue puis ma tête sur son épaule. Dis, t’en veux pas à la femme de ta vie de t’avoir réveillé au moins… ? Parce que moi si. Un peu quand même.
Encore une fois, dû à la fatigue c’est certain, mes yeux se ferment et je repars dans les souvenirs, les rires, les jeux, les découvertes. Toutes les folies que j’ai pu un jour lui dire. Je me souviens de la tête qu’il tirait quand je lui annonçait que j’avais envie d’apprendre la guitare, le piano et toutes ses folies là. Même si j’ai rapidement changé d’avis parce que je n’arrivais pas à me décider. Je me souviens de cette fois-là, quand j’avais seize ans, sortie en douce pour aller faire la fête avec des amis. Je m’étais cru super forte à faire le mur sans qu’il ne s’en rende compte. Grossière erreur. En plus de le savoir, il avait même trouvé l’adresse et était venu me chercher. Les mots que j’avais pu lui cracher au visage ce soir-là… je m’en veux encore.
Je secoue la tête quand je la relève mollement, énième bâillement dissimulé derrière ma main. Tu crois que c’est con de rêver de devenir la prochaine marque de luxe célèbre ? Yeux de merlan frit, ce n’est pas ce qu’il me dira qui pourra me blesser, plutôt le retour à la réalité. Je sais bien que je rêve trop, oser se comparer à de grandes marques… il faut être folle. Je le suis sûrement un peu alors je le coupe avant même qu’il ne commence à me donner son point de vue. Ouais, c’est complètement con. Oublie, p’pa. Je croise les bras sur ma poitrine, moue boudeuse au visage.

tw: aucun.

Le projet de la demoiselle est peut-être mauvais. Il ne sait pas encore. Dans tous les cas, qu'il soit bon ou mauvais, il sait qu'il l'encouragera. C'est ce qu'il a toujours fait quand elle est entrée dans sa vie sans qu'il ne s'y attende, et c'est ce qu'il fera jusqu'à la fin de sa vie. Pour lui, c'est juste son rôle de père que d'encourager, pousser un peu son enfant, qu'elle ne se freine pas pour finir par penser qu'elle ne vaut rien. Des parents dépréciant leurs enfants, il en a rencontré quelques uns au fil des années, plus rarement des professeurs, lassés de leur profession ou non fait pour ce métier. Il a serré les dents, pris sur lui. Hestia ira toujours de l'avant, tout comme lui. Ainsi sont faits les Scott. Il n'est pas encore complètement réveillé et prêt à l'écouter mais il fera avec. Le breuvage qui glisse dans sa gorge agira sous peu pour lui donner un petit coup de fouet. Pour l'instant, il savoure cet instant, celui de tenir celle qui n'est plus si petite dans ses bras. L'encourageant à lui parler même s'il s'interroge sur son nombre d'heures de sommeil. Petit soupir qui lui échappe à l'écoute de la réponse. Si son métier exige qu'il reste des nuits éveillé, ce n'est pas le cas de la jeune femme. Alors qu'elle se redresse, il remarque une chose qu'il n'avait pas vu jusqu'à présent. - Je suppose que c'est durant ce moment d'absence que tu t'es barbouillée le visage fredonne-t-il, amusé. Sa grande fille. Pas d'âge pour se mettre du feutre sur le visage. Même combat que lorsqu'elle avait quatre ans. - Pour le moment non, mais je ne garantis pas de ne pas le regretter en fin de journée de ne pas t'en vouloir. Au pire, j'irai dormir tôt, et tu pourras me traiter de vieux. Tasse de café portée une nouvelle fois à ses lèvres. Il tend ensuite le bras pour la poser sur sa table de chevet, refermant désormais son bras libre autour du corps de sa fille. Un bref instant, il ferme les paupières, profitant juste de cet instant de calme. Ainsi posé, il pourrait se rendormir facilement et terminer sa nuit, avec sa fille contre lui. Cela ne lui ferait pas de mal non plus à elle de se reposer un peu. Cela n'arrivera pas, car si son projet a duré toute la nuit, il lui reste assez d'énergie avant de rendre les armes. Quelques secondes. Le temps d'un court silence. Celui de savourer cet instant. Mouvement qui s'exerce entre ses bras, paupières qui se rouvrent et le regard océan se pose sur le visage de la demoiselle. Question qu'elle lui pose, qui amène quelques secondes de réflexion pour ne pas lui répondre de bêtise. Temps suffisant pour qu'elle reprenne, écartant son idée. L'espace d'un instant, il la revoit alors qu'elle était enfant et qu'elle boudait car ça n'allait pas comme elle voulait, ou quand il lui disait non sans changer d'avis. - Tu sais que si tu fais les questions réponses, on ne va pas s'en sortir et je vais me demander pourquoi tu m'as réveillé balance-t-il, un sourire aux lèvres. - Ne fais pas ta mine boudeuse, sinon je vais devoir te chatouiller pour décrocher un sourire sur ce joli visage. D'ailleurs, pour faire mine qu'il exécutera sa menace, ses doigts se mettent en mouvement juste deux secondes pour la chatouiller au niveau des côtes. - Sinon je pense que ce n'est pas con d'avoir des rêves et de vouloir les réaliser. Si tu y arrives, je serai très fier de toi, et si ça tombe à l'eau, je serai quand même fier de toi, car tu auras essayé. Ce qui est con, c'est de ne pas tenter et de vivre avec des regrets plus tard. Ne fais jamais ça princesse.

tw: aucun.

Serrée dans les bras forts de mon père me renvoie des années en arrière, quand je me glissais à petits pas de souris dans son lit parce que j’avais fait un cauchemar. Ou tout simplement parce que je n’avais pas envie de dormir toute seule. S’il râlait pour la forme, j’avais toujours le droit d’être serrée tout contre lui comme ça. Et de tous les endroits du monde, c’est l’unique où je me suis toujours sentie en sécurité. Même si je ne lui dis presque jamais. Je suis à peu près certaine qu’il sait que je le pense. Même quand on se dispute. Alors quand il me fait remarquer les traces sur ma joue, je plisse les yeux et fronce mon nez pour montrer mon désaccord avec sa taquinerie pourtant je ris comme l’enfant que j’étais il y a encore peu. Et que je suis sûrement encore au fond de moi. Arrete p’pa ! Te moque pas ! J’ai pas eu le temps de l’enlever ! Tout en gloussant, je saute du lit parce que j’ai une certaine fierté (des Scott paraît-il) et surtout, je ne laisserais aucune chance à papa de capturer le moment pour m’afficher sur Instagram, puis file à la salle de bain pour frotter ma joue. Je suis quand même bien contente de ne pas voir la tête de papa quand il me dit ne pas m’en vouloir pour le moment mais que ça changera sûrement au cours de la journée. En croisant le regard de mon reflet dans le miroir, je grimace.
Tête baissée, je reviens dans la chambre en faisant une petite moue. Desolée, papa. Je retrouve très vite la position initiale, aux côtés de mon père, dans ses bras et là, je soupire d’aise. Je pourrais m’endormir en un claquement de doigts si je n’étais pas encore complètement accaparée par cette idée qui fleurit en moi. Le silence s’installe quelques instants à peine, juste le temps pour lui de réfléchir à une réponse à ma question. Mais finalement, je le coupe avant même qu’il ne dise quoi que ce soit. Je sais bien que mon idée est grotesque, mais non. Encore une fois, papa, mon héros a encore frappé. Oui, papa… Bras finalement croisés sur ma poitrine, je boude avant même de connaître son avis sur la question. Avis qu’il me donne après m’avoir chatouille plus d’une demi-seconde. C’est donc suffisant pour moi pour me tortiller dans tous les sens et éclater de rire. A-a-arrete !! Papa ! Je me redresse en tentant de reprendre mon sérieux malgré les larmes de rire aux coins de mes yeux. D’un coup d’épaule (qui ne le fait pas bouger d’un iota) je tente de le recadrer comme il le fait si bien avec moi. Un peu de sérieux.
J’écoute attentivement son laïus sur les rêves qu’il ne faut jamais abandonner et surtout ne jamais vivre avec des regrets. Je lève les yeux vers mon modèle, pensive, je mordille ma lèvre avant de changer complètement de sujet. T’en a des regrets toi ? Synonyme de « tu regrettes de pas avoir retenu maman ? » mais pourtant, jamais je ne prononcerais ses mots, pas devant lui, ne mérite pas d’entendre parler d’elle, lui qui a tellement galerer alors que j’étais qu’un nourrisson.

tw: aucun.

Sa grande fille. Il comprend qu'elle n'est plus une enfant. Il a un peu de mal parfois à accepter qu'une personne ravira son cœur un jour, et qu'elle volera de ses propres ailes. Il le sait, en tant que parent, que les choses se dérouleront ainsi, que viendra un moment où elle n'aura plus besoin de lui, qu'elle fera sa propre vie. C'est le but, que son enfant s'épanouisse, qu'elle soit heureuse même si quelque part, il y aura cette petite pointe de douleur dans son cœur. Il ne souhaite pas la garder enfermée dans une tour, même si parfois on peut supposer le contraire. Mais quand elle se retrouve ainsi, le visage bariolée de feutre, elle n'est plus sa grande fille mais redevient l'espace de quelques minutes sa petite fille. Cela le fait rire de la voir ainsi, sa réaction davantage. Il glousse alors qu'elle se précipite dans la salle de bain attenant à sa chambre pour se débarbouiller, alors que mademoiselle possède sa propre salle de bain, à côté de sa chambre. Elle utilise sans vergogne celle de son père. Réveil difficile mais dans la bonne humeur. Tasse de café déposée sur la table de chevet, la silhouette féminine revient, et lui doit se pincer les lèvres pour ne pas sourire à sa vue. Il la connaît son enfant. Il a bien compris que parfois il vaut mieux se taire, surtout quand celle-ci a pour passion le stylisme et qu'en grandissant elle développe un souci de la perfection, ou du moins la recherche de la perfection. La moindre petite remarque pourrait la renvoyer dans la salle de bain où elle restera de longues minutes avant qu'il ne la revoit. Alors, en bon père qui comprend cet aspect de sa fille, il se contente de la récupérer contre lui, de refermer de nouveau ses bras sur son corps et de la tenir ainsi, quelques instants. Le temps pour sa petite fille boudeuse de faire des questions auxquelles elle répond. Le temps pour lui de la menacer de la dérider en la chatouillant. C'est fatal. Cela fonctionne à tous les coups tellement elle est sensible. C'est à peine s'il la touche mais elle rit déjà aux éclats. Coup d'épaule donné pour le mettre en garde de recommencer. Douceur en vérité, car il ne ressent pas vraiment le coup qu'elle lui donne. Il se pince les lèvres à sa phrase, empruntée à l'une des siennes. Son enfant prend parfois trop exemple sur son vieux père. Alors, il retient le sourire et répond à sa question sur les rêves, et sur le fait de ne pas avoir de regrets. Il ne souhaite pas qu'elle en ait de ne pas oser se lancer pour poursuivre un rêve. Espérant qu'elle s'imprègne de ses mots, il ne s'attend pas à la question qu'elle lui retourne. Il ne répond pas immédiatement, prenant le temps de réfléchir un peu. Durant longtemps, il y a des sujets qu'il n'a pas abordé avec elle, la jugeant trop jeune pour entendre certains mots. Mais à présent qu'elle est une jeune adulte, il sait qu'il peut ouvrir certaines vannes. - J'en ai un oui, que je ne pourrai jamais remédier. Il hésite un peu mais décide finalement de se lancer. - J'aurais aimé être présent à ta naissance. C'est mon plus grand regret, de ne pas avoir su, sinon j'aurais tout fait pour être là, même si on n'était plus ensemble avec ta mère..

tw: aucun.

Débarbouillée de ces traces de feutres, je me sens nettement mieux. Le paradis me gagne lorsque je retrouve la chaleur des bras de mon père, blottie contre lui, même à vingt ans, j’ai encore, et je l’aurais sûrement toujours, la sensation grisante d’être minuscule dans ses bras. En sécurité. Entière. Souvent je me demande si je réussirai un jour à prendre mon envol. Ne plus le voir tous les jours, même si ce n’est que l’histoire de vingt minutes pour se raconter nos journées respectives.Vraiment pas l’idée la plus réjouissante qui soit. Mais très vite, la bonne humeur revient, envolée mes pensées qui me font flipper plus que de raison puisque j’y passerais forcément un jour. Rire de si bon matin fait un bien fou. La bonne humeur me fait un bien fou. Certainement un signe avant-coureur avant qu'il annonce son unique regret. Je ne contrôle rien. Mes bras se couvrent de chair de poule, me font frissonner. Pour cacher mon malaise à parler d’elle, je me frotte les yeux de mes deux mains. Je barricade mon cœur pour qu’il oublie la douleur à ressentir dans les moments-là. Hors de question de parler d’elle. Hors de question de lui faire du mal, à lui. C’est elle qui s’est mal conduite. Elle qui a jugé bon d’agir de la sorte. Elle a demandé l’avis de personne me concernant. Les pensées ténébreuses qui s'agitent, je fronce les sourcils alors que je prends la main de papa dans la mienne. Ma bouée de sauvetage. À la manière d’un doudou, le meilleur qui soit, je serre sa main contre moi, me love encore plus contre lui. Mon unique point de repère. Puis les mots tombent, m'écorchent les cordes vocales. On s’en fout d’elle. Elle est morte pour moi. Faux. Elle ne le sera jamais tant que je n’aurais pas compris. Tant eu je n’aurais pas eu son avis sur la question. En fait, sur “ les questions ” serait plus juste. Des questions j’en ai des tonnes, des milliers. Chaque jour, une nouvelle qui restera à jamais sans réponse. J’ai beau ne pas vouloir en parler parce que je juge en avoir assez souffert quand j’étais petite, les mêmes questionnements tournent en bouclent dans ma tête. Tout le temps. Ma tête pourrait même exploser, j’en suis sûr. Mais en attendant, elle repose sur le torse de papa. Les battements de son cœur m’apaisent, m’enlève les épines qui représentent chaque point d’interrogation rester sans réponse. Boum, boum. La colère qui naissait en moi disparaît. Boum, boum. La tempête s’apaise. Boum, boum. Je veux juste rêver comme la gamine de vingt ans que je suis. Réfléchir. Hésiter. Retourner la question dans ma tête puis… Abandonner pour un meilleur sujet. Je suppose que tu m’as prévu un truc pour mon anniversaire et je suppose qu’on fera ça le premier week-end d’août ? Du coup, je prévois de le faire avec mes potes le deuxième week-end. Mais j’aimerais bien qu’on fasse un truc que tous les deux. Tu veux bien ? Cœur toujours pas soulagé mais sourire revenu, je retiens un rire parce que je sais que l’idée que mes vingt-et-un ans lui donne des cheveux blancs. Majorité absolue, bien que je compte rester sage comme je le suis, ça reste un cap à passer et il paraît que j’ai grandi trop vite. Une virée que toi et moi, ça te dit ? Je sais que c’est pas évident avec la caserne mais ça me plairait bien.

tw: aucun.

Ne pas avoir entendu le premier cri de son enfant. Ni couper son cordon ombilical. Ne pas avoir eu l'occasion de sentir ses coups de pieds sur un ventre bien arrondi. De nombreux petits moments qui lui ont été volés, laissé dans l'ignorance d'une grossesse, non désirée mais menée à terme. La mère de Hestia est responsable de ces manques dans sa vie, mais une partie de lui a conscience qu'il l'est également. Reparti plusieurs mois pour l'armée, en dehors de sa famille, et de ses amis proches, il se doute qu'il ne devait pas être vraiment joignable. Surtout pour ceux qui ne savaient pas qu'il s'était enrolé. Alors, il regrette, autant qu'il comprend. Mais quelque part, même si ces petits regrets resteront à jamais, il est chanceux. Il n'a pas manqué les premières fois de sa fille. Premiers pas. Premier bobo en tombant de vélo. Premier tour de manège. Première fois qu'elle s'est amusée à le maquiller, lui mettant des élastiques dans les cheveux. Ces petits moments précieux valent tous ceux qui sont des actes manqués. Pendant de nombreuses années, il a marché sur des œufs, évoquant rarement la mère car il ne sait pas ce qu'elle est devenue, ne possède pas les réponses aux questions de sa fille. C'est une discussion, qu'ils peuvent enfin avoir, après plus de vingt ans. Les mots de Hestia assombrissent un peu le regard du père même si elle ne le voit pas. - Ne dis pas ça princesse. J'espère que tu auras un jour des réponses à tes questions. Je ne la défends pas, mais elle n'a pas eu la chance que j'ai, d'être si bien entouré par la famille. Ses parents, même si en colère au départ, au point de l'obliger à faire un test adn pour s'assurer que le bébé était bien le sien, se sont vite radoucis par la suite, accueillant cette petite fille avec joie, aidant le jeune père qu'il était au mieux pour qu'il ne se noie pas. Il a pu également compté sur sa fratrie. Sur sa meilleure amie qui a également eu un enfant à la même période. Ils se sont soutenus comme jamais, élevant les deux petites filles au mieux. Plus tard, l'entrée de Rebecca dans sa vie, ainsi que Stella. Il est chanceux. Hestia également. Elle est bien entourée depuis toujours et toutes les femmes de sa vie, elles ont toutes été merveilleuses pour apporter cette présence maternelle manquante à la petite fille. Petit silence qui s'installe entre eux, chacun perdu dans ses pensées. Un moment de calme après le réveil un peu trop dynamique dont il a été victime. Il ferme mêmes les paupières. Présence chaude contre lui, ainsi que la couette, condition idéale pour qu'il se rendorme même s'il ne le fera pas. Pensées continuant de tourner autour de l'absence de mère de Hestia. Il émet un petit grognement à l'évocation de l'anniversaire de son bébé. La majorité absolue. Il est heureux pour elle autant qu'il regrette qu'elle grandisse si vite. - Bien vu, je vais te prévoir un anniversaire digne de ce nom. Comme pour tes 6 ans peut être. Quoique non, trop girly pour lui même s'il s'était prêté au jeu. - Tu n'as même pas besoin de me poser la question. Regard océan qui descend vers la silhouette de sa fille. - Ne t'en fais pas pour la caserne, tu passes avant. Et ça me tente bien une petite virée père/fille oui. Quelques jours loin d'ici. Tu as une idée d'où tu veux aller ? Toujours dans le pays ou ailleurs ? On peut prendre un globe, le faire tourner et pointer du doigt une destination. A moins que... La France pour le stylisme ? Il réfléchit à des lieux propre à tout passionné de stylisme, mais en dehors de la France, et peut être l'Italie, il est bien incapable d'en citer. C'est vraiment un univers qui lui est étranger même s'il tente de s'accrocher pour comprendre la grande passion de sa princesse. Non évident car il continue de n'y rien comprendre, malgré qu'elle lui explique souvent.

tw: abandon maternelle.

Ma mère. Sûrement le sujet le plus épineux de toute l’existence de la terre. J’en viendrais presque à regretter d’avoir demandé à papa s’il avait déjà eu des regrets. J’aurais pu deviner que cette partie allait ressortir et nous mettre mal, tous les deux. Autant l’un que l’autre d’ailleurs. Et ce sujet fait mal. Même dans les bras les plus rassurants qu’ils soient n’arrivent pas à me protéger. Pas de ça. Pas d’elle. Qui est-elle ? Comment est-elle ? Est-ce qu’elle est calme et posée comme papa ? Ou est-ce que je tiens mon côté rêveuse et pile électrique d’elle ? Est-ce qu’elle m’aime quand même ? Est-ce qu’elle pense à moi tous les jours comme je pense à elle ? J’en doute. Si elle m’aimait, elle ne m’aurait pas abandonné. Si elle pensait à moi, elle serait revenue. Non… ?  Si. Mais elle ne l’a pas fait. Jamais. Ce constat fait mal. Je m’efforce de ne plus y penser, mais elle est là, dans un coin de ma tête, s’immiscer un peu plus à chaque instant. Je ferme les yeux et c’est une image totalement inventée qui s’imprime dans mon esprit. Alors je passe un bras en travers du torse de papa pour le serrer un peu plus. Serre-moi fort, que j’ai envie de lui dire. Arrête de parler d’elle, que j’ai envie de lui crier. Parce que tout ce que je constate c’est que ça fait mal et j’ai pas envie. Je veux pas. Et si elle n'était pas si bien entourée, elle aurait pu rester dans ma vie quand même. J’ai aucune question à poser à une inconnue. Elle est morte, c’est tout. Faux, faux, faux et archi faux. D’ailleurs, l’absence d’assurance dans la voix qui s’est faite plus petite le démontre. Je ferme les yeux plus fort encore, y glisse l’image bien nette de papa, lui il est là. Lui, il ne m'a pas laissé tomber. Il m’a appris à me relever. À sourire. À rire. À aimer. C’est lui qui m’a tenu les mains lorsque j’ai appris à mettre un pied devant l’autre. Encore lui qui m’a appris à parler. Toujours lui qui a soufflé sur mes genoux éraflés quand je tombais, accompagné de l’éternel bisou magique. Fais un bisou magique à mon cœur, que j’aimerais lui demander. L’un de ceux qui guérit tout. Ceux que lui seul a le secret. Même si mamie m’en faisait, c’était pas les siens, ils ne me guérissaient pas aussi bien. Mais je finis par retrouver mon calme. Je veux clore ce chapitre comme je l’ai toujours fait jusqu'à maintenant. Ça a toujours fonctionné. Je change du tout au tout, suivant le rythme calme des battements de cœur de mon héros, apaise les miens devenus anarchiques le temps de quelques minutes. Mon anniversaire. La fête. Une virée tous les deux. Voilà qui finit de m’apaiser complètement. Je retrouve le sourire et glousse lorsqu’il parle de mes six ans. Spécialité princesses et paillettes. Attention, cette fois-ci c’est moi qui ferais les robes de princesses. Dont une pour toi ! Je pouffe de rire en l’imaginant dans l’une de ses robes à froufrou, manches bouffantes et col claudine d’un rose à s’en faire mal à la rétine. Je réfléchis quand il me demande si j’ai une préférence pour notre futur destination. Mh… Mais il me coupe l’herbe sous le pied quand il me propose de lui même la France. En une fraction de seconde, je me redresse pour planter mes iris dans l’océan de papa. Mon sourire remonte jusqu'à mes yeux, j’illuminerais l’univers entier si je pouvais. Pariiiiis !!!! Je fais claquer un énorme bisou sur la joue de mon père, mon héros. Je ris, levant les bras en me dandinant dans le lit. Aussitôt prononcé, je m’imagine déjà au pied de la Tour Eiffel, le lèche-vitrine des boutiques de luxe. Je me met même à chanter, gloussant tout en même temps, ce qui ne donne rien de très fabuleux. L’effort de chanter l’unique chanson en français que je connaisse, sans même en connaître le moindre sens. Voulez-vous coucher avec moi, ce soiiiir !!! J’éclate de rire, me laissant retomber dans les draps, ma tête cognant la tête de lit au passage, me faisant rire de plus belle.

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Faux, elle n'est pas morte. Sujet épineux, même si Hestia est désormais une jeune adulte. Peut-être que c'est de sa faute à lui. Il n'a pas bercé sa fille durant son enfance de mots plein d'espoir concernant sa mère. Qu'elle l'aime, mais qu'elle ne pouvait pas s'occuper d'elle, que c'était au-dessus de ses forces. Sa princesse en veut à sa mère, une partie de lui comprend. Mais l'autre se souvient encore aujourd'hui de ce visage embué de larmes, du déchirement qu'elle a eu en glissant le bébé dans ses bras. Elle craquait et lui, trop estomaqué par la découverte de ce bébé, il n'a pas réagi. Il ne l'a pas retenue. Il n'a pas su lui proposer de l'aide et elle a disparu sans laisser de traces. Peut-être que s'il avait réagi à l'époque, elle serait présente dans la vie de leur fille aujourd'hui. Il ne sait pas et ne saura jamais. C'est sûrement un autre regret mais celui-ci, il le garde enfoui, ne l'exprimant pas. Étreinte se resserrant sur la fine silhouette de sa princesse. Il la serre fort, pour la réconforter, lui transmettre de sa force, mais tout autant pour en puiser en elle. Il n'est pas infaillible le héros de sa petite fille, loin de là même. C'est juste qu'il ne s'est jamais permis de flancher devant elle. Pas même quand il a eu cet accident d'ambulance douze ans auparavant. Quand elle entrait dans la chambre d'hôpital, emmenée par ses grand parents, ou sa tante, il l'a toujours accueillie avec le sourire, étouffant la douleur quand elle se serrait un peu trop contre lui sans se rendre compte que cela lui faisait mal. Il lui a promis de se remettre sur pieds très vite pour l'accompagner de nouveau à l'école, jouer avec elle, juste s'occuper de sa prunelle. C'est sa mission, celle qui ne l'a jamais fait flancher malgré quelques coups durs. Rien que de penser à Hestia, c'est suffisant pour le faire se relever, pour arrêter de broyer du noir. Son sourire chasse toutes les mauvaises pensées, ses rires également, comme celui qu'elle a en évoquant l'idée de lui faire une robe de princesse qu'il devra porter. - Ja-mais. Il se retient de la chatouiller, car elle pouffe déjà, ayant retrouvé son sourire. Discussion qui s'allège pour évoquer la future majorité absolue de la demoiselle. Pour une fois, c'est lui qui parle, qui ne laisse pas le loisir à son enfant d'en placer une, posant des questions, suggérant des idées. Peut-être que c'est bien de lui qu'elle tient ce côté. Ils se ressemblent un peu quand il s'y met. Puis, le blond prononce un mot magique, celui d'un pays. Yeux qui pétillent de bonheur. Le son strident de la capitale française qui retentit, peut être même que les voisins l'ont entendu. Baiser sur sa joue rappeuse. Rire. Danse de la joie sur le lit. Elle n'est plus là sa petite fille, elle s'imagine déjà de l'autre côté de l'Atlantique, à arpenter les rues, s'extasier devant les vitrines. Il la connaît pour imaginer ce qui se passe dans sa tête. Par contre, les paroles qu'elle se met à chanter le font grimacer. - Hestia ! Il ne parle pas français mais cette chanson, il l'a déjà entendu et un jour il a googlé pour connaître la signification des paroles. - Je t'interdis de dire cette phrase, encore moins en France balance-t-il peu convaincu que sa fille l'écoute car la voici en train de retomber sur le lit dans un éclat de rire. Bruit sourd d'une tête qui se cogne. Aussitôt, lui a un regard inquiet, se tient prêt à examiner la princesse. La douleur ne semble pas l'atteindre, vu les rires. - ça sera donc un séjour père/fille à Paris. Enfin, si tu as ton année princesse fredonne-t-il, amusé. L'idée lui prend, de chatouiller une nouvelle fois la jeune femme. Il aime l'entendre rire aux éclats. Il claque ensuite un bisou sur sa tête avant de se redresser. - Maintenant que je suis bien réveillé, je vais prendre une douche. T'as prévu d'aller dormir, ou tu vas sautiller en imaginant Paris jusqu'à tomber d'épuisement ? Elle en est bien capable, c'est ça le pire.

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Cette fois-ci c’est sûr. Je regrette d’avoir posé la question. Oh non, pas parce que je refuse d’en parler avec lui, ni même d’en parler tout court. Je regrette parce que j’ai peur. Peur de parler d’elle avec lui. Peur de ce qu’il pourrait m’apprendre, de ce que je pourrais découvrir. Peur de lui faire du mal à lui si on parle d’elle. Je crève d’envie d’en parler, savoir comment elle était, comment elle se comportait. Juste savoir si je lui ressemble, même un tout petit peu. Mais je peux pas. Pas avec mon père. Je refuse de lui faire mal et je suppose que c’est la même chose de son côté. Alors on en parle pas. On évite le sujet. On classe le dossier en rangement vertical et on essaie d’oublier, je suppose. Pour ma part en tout cas, je fais tout ce que je peux pour jeter ce foutu dossier aux oubliettes. Même si j’ai un tas de choses que j’aimerais lui dire, lui avouer. Mais c’est plus fort que moi, je veux pas. Je ne peux pas. Alors l’étreinte qu’il me rend ça me rend forte. Ça me rend fière. Ça me panse mon cœur qui tambourine dans ma poitrine comme s’il voulait en sortir. Ça panse mes plaies et ça redresse mon sourire qui s'était fait la malle. Bercée par son amour que je lui rend au centuple, je souris. Je ris et j’explose de joie quand on en vient à parler de ce voyage, de Paris. Impossible pour moi de me contenir, je ris, danse et chante. J’ai envie de crier au monde entier qu’on va aller à Paris. J’ai envie de crier au monde entier que j’ai le meilleur papa du monde. J’éclate une nouvelle fois de rire quand il tente de me réprimander. Ben quoi ? Je l’aime bien, moi, cette musique. Yeux de merlan frit relevé vers mon père, immense sourire aux lèvres, je bat des cils comme le ferait un petit ange. Oh, mais elle est super bien cette chanson ! Pourquoi j’aurais pas le droit ? Sourire retourné, je la chante pourtant à tue-tête avec mes amis, bien qu’il ne s’en doute sûrement pas. De nouveau, je croise les bras sur ma poitrine quand il y va au chantage sur mon année en cours, moue boudeuse malgré le petit sourire mutin au coin de mes lèvres. Ça, c’est du chantage mon cher papa. Je vais être obligée de bosser encore plus. Comme si ça me gênait. Je glousse en me tortillant quand ses doigts frôlent à peine mes côtes, mon sourire fier revient quand il embrasse mes cheveux. J’aurais bien aimé faire les deux mais il paraît que ce n'est pas possible. Quoi que… Je ris, amusée, en le regardant se redresser alors que je m’enfonce un peu plus dans son lit, allant même jusqu’à le pousser du lit pour piquer sa place encore toute chaude. Je suis crevée mais ma chambre est loooin… Regard de biche prise au piège dans les phares d’une voiture, si je pouvais, je dessinerais une auréole au-dessus de ma tête, attendant simplement son feu vert pour fermer les yeux et dormir à poings fermés dans son lit.

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La mère de Hestia. Sujet épineux qu'ils ont bien du mal à aborder tous les deux. Faire du mal à sa petite fille, c'est le dernier de ses souhaits, alors possible qu'il choisisse la solution de faciliter, en n'insistant pas davantage, ne poursuivant pas la discussion à son sujet. Il n'a pas beaucoup d'éléments puisqu'il ne l'a jamais revue depuis ce fameux jour où elle lui a déposé un bébé en pleurs dans les bras. Cœur qui s'est arrêté, qui a gonflé quand les pleurs se sont arrêtés et que de grands yeux l'ont regardé. Avant même de savoir si elle était réellement de lui, il l'aimait cette enfant. Elle a conquis son cœur avec un simple regard et une petite main qui s'est refermée sur l'un de ses doigts. Sa petite fille, pleine de vie, espiègle, qui aime rire. Ils rangent le sujet épineux, encore une fois même si ce n'est pas la bonne solution, retournent sur un chemin plus rassurant et familier. L'évocation de Paris est une explosion de joie même si les paroles d'une certaine chanson le font grimacer. - Car ces paroles invitent n'importe qui à coucher avec toi ! Nouvelle grimace de sa part. Ce n'est pas le genre de verbe qui le dérange, sauf lorsqu'il s'agit de sa petite fille. Certes, elle n'est plus une enfant, il se fait des illusions, se voile la face en voulant croire qu'elle est toujours aussi pure et innocente. Normal, c'est son bébé et rien de pire qu'un père qui doit accepter que sa prunelle grandisse. Il pense s'en tirer plutôt pas mal sur le sujet même si parfois, il a du mal. Alors, il vaut mieux dévier, revenir sur quelque chose de plus rassurant pour lui, comme l'année scolaire qui doit être réussi. La réaction de la jeune femme le fait rire. - Tu n'as pas besoin de bosser davantage, je sais déjà que tu l'auras ton année. Je suis très fier de toi. Ce n'est pas donné à tous les parents d'avoir un enfant qui aime l'école, aime travailler, et qui sait déjà ce qu'il veut faire dans la vie. Il est chanceux pour le coup, mais il y a tellement de sujets qui paraissent simple quand il s'agit d'Hestia, qu'il se demande parfois ce qu'il a fait pour mériter une si bonne étoile. Lui est prêt à démarrer la journée, alors qu'elle... Il se sent pousser hors du lit plus vite qu'il ne désire en sortir. Aussitôt après, la voici qui lui pique la place qu'il vient de libérer. Il s'accroupit à côté du lit, et laisse échapper un rire à sa phrase. - J'ai compris princesse. Le voici qui la borde dans son lit, sachant que c'est soit ceci, soit la porter jusqu'à sa chambre. Sauf qu'elle n'a plus l'âge qu'il fasse ceci, quoique... Y-a-t'il vraiment un âge pour s'arrêter ? - Dors ici princesse, autant que tu veux. Rêve de Paris... souffle-t-il en se penchant pour déposer un baiser sur son front. Il patiente, le temps qu'elle ferme les paupières, l'observe encore un instant avant de se relever en récupérant le plateau de petit déjeuner. Plutôt que d'utiliser sa propre salle de bain et risquer déjà de la sortir des bras de Morphée, il décide de quitter la chambre, refermant doucement la porte derrière lui, allant par la suite prendre la douche dans une autre salle de bain de la demeure, laissant dormir celle qui est encore sa petite fille dans son cœur à poings fermés.

THE END