I want you to hold out the palm of your handIls te regardent tous, Chirel. Ils te jugent. Regardes-les, comment ils t'épient, leur coupe de champagne en cristal dans la main. Cette voix qui trotte dans sa tête à longueur de journée, comme un petit démon sur son épaule gauche et droite. Pas d'place pour l'ange raisonneur. Parfois, elle lui répond à voix haute, parce que ses pensées, elles, sont entièrement occupées par ce petit scélérat. Trace certaine, psychologique, de toute son enfance où, bien malgré eux certainement, ses parents lui ont tout posés sur ses épaules. Elle est devenue qui elle est, grâce à eux, à leurs dires sur comment être, à jalouser les autres pour s'élever toujours plus haut. Des amis ? Elle n'a jamais su en garder plus jeune, Chirel. Gamine et ado qui avait ses parents sur le dos pour que son art vive, se propulse. Pourtant, elle les aime, elle les adore, ses parents, de braves gens et des parents, au final, formidables. Les valeurs de la famille, elle n'a pas à les détester.
Robe longue, faite de soie et de strass, qui épouse à merveille les formes de la maman. Kilos pas vraiment perdus de la grossesse d'il y a huit années, pourtant, elle se donne à fond au yoga deux fois par semaine, de quoi relâcher les tensions. Alors, elle les embrasse, ces quelques kilos superflus, parce qu'elle n'en a pas honte et se trouve très belle avec. Une coupe à sa main également, elle feint des sourires joviales à quelques invités de ce vernissage. Ses tableaux sont exposés avec quelques autres artistes qu'elle soutient. Au loin, alors que trois hommes la prennent pour discuter de ses oeuvres et d'où lui proviennent ces idées, elle voit son échappatoire. Probablement son-sa seul(e) ami(e) qui a duré pas mal d'années sans relâcher ; mécène. Alors, elle s'excuse poliment auprès de ces hommes inconnus, probablement a-t-elle donc effacé trois ventes avec eux, mais tant pis, elle avait pas vraiment envie d'entamer une discussion sur l'art et la conception de cette dernière, d'autant plus que ses oeuvres tirent de ses pensées. Elle s'éloignent, marchant d'un pas félin, essayant surtout de ne pas marcher sur un bout de tissu de sa robe bordeaux, vers le(a) mécène. Une bise cordiale, quand on sait qu'entre eux il y a eu bien plus le soir où Chirel a fêtée pour la signature du divorce. Verres de vin rouge couteux par millier dans une Suite, célébrant enfin l'abandon total de cet ex-mari qui n'en valait pas la peine. Trompée, humiliée publiquement, cet homme qui est le père de sa fille mais également homme politique en pleine propulsion. Elle ne donnait rien de leurs disputes multiples en public, encore moins du manque de contact physique du couple marital en privé. Du moment que tout était caché et que rien n'entacherait sa réputation, ça lui convenait bien, parce qu'elle adore ça, qu'on l'admire, qu'enfin on puisse la jalouser. Sa petite voix malsaine s'était terré quelques temps mais a bien ressurgit en voyant l'article dans le journal, de cette infidélité avec une midinette bien plus jeune qu'elle. Un an qu'elle est libre, un an que la voix revient lui faire ronger les os, les ongles. Elle n'en dit rien à personne. Depuis, elle n'a couché qu'avec très peu de personnes, espérant à chaque fois que cela ne se sache pas.
Chirel, c'est après tout, la mère et l'épouse parfaite, artiste accomplie, aux talents dorés depuis qu'elle est petite. Avancée en cette matière à la maternelle, on voyait déjà tout son potentiel dans les nuages qu'elle gribouillait avec talent. Chirel, cuisine, elle adore ça. C'est sûrement cliché de l'épouse modèle, mais elle adorait faire des tartes qu'elle laissait refroidir sur le rebord de leur perron, elle donnait toujours des parts aux voisins pour bien se faire voir. Pelouse toujours verte et bien tondue, les fleurs toujours fleuries ou alors taillées, elle aimait que les apparences soient parfaites bien que trompeuses. Elle aime toujours. Petit fardeau qu'elle impose bien malgré elle, à son tour, à sa fille mais qu'elle aime par dessus tout.