I can't feeling anything (Angel #04)

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(Tenue)  La soirée précédente avait été mouvementée. Il avait difficilement trouvé le sommeil ou du moins, c’était le sommeil qui avait fini par le rattraper tant il s’était senti vidé de toute énergie. Il avait liquidé ses derrières ressources pour tenir au loin une nouvelle crise. C’était devenu une habitude qui ne le confortait pas dans le fait qu’il allait mieux. Au contraire, rien n’allait. Le moment avec Angel n’avait fait que confirmer que tout dans sa vie était fragile. Lorsqu’il s’était levé au petit matin, l’air hagard et était tombé sur le regard de Lucy, empli de jugement pour ce verre et cette bouteille qui trônait sur la table basse, il n’avait pas pris la peine de se défendre. Il n’avait même pas eu le temps de boire, mais les preuves étaient là. Il n’avait pas la force. Ils avaient échangé que quelques regards. Lui, parce qu’il n’arrivait plus à lui parler, elle pour des raisons qui lui appartenaient. Leur relation était dans une impasse. Elle l’était depuis son retour. Découvrir le pot aux roses, avait juste accélérer les choses. Il avait rangé le verre et la bouteille, avait fait bonne figure lorsque sa fille était descendue avant de se rendre à l’université. Il la préservait autant que possible de ses états d’âme et de ses crises. Il puisait autant que possible dans ses ressources pour ne pas l’appesantir d’inquiétudes à son égard. Il y avait assez bien de monde qui s’inquiétait pour lui. Lorsque les membres de la maisonnée étaient partis, il était monté dans sa chambre qu’il n’occupait plus depuis des semaines, s’était saisi de vêtements propres avant de filer sous la douche. Il avait passé un temps conséquent sous l’eau, son esprit se concentrant uniquement sur l’eau qui battait sa peau, lui apportant une simple sensation de bien-être. Il avait craqué sous le jet d’eau. Des sanglots avaient secoué sa silhouette, car il ne savait plus où donner de la tête, quoi penser de ce qu’il se passait dans sa vie ces dernières semaines. Il ignore le temps qui s’écoula avant qu’il ne trouve la force de s’extirper du jet d’eau pour se s’essuyer et s’habiller. Il se regarda dans le miroir, les traits plus tirés que jamais. Il se sentait si vide aujourd’hui. Il n’aimait pas cet état de léthargie, mais il n’aime pas pour autant ce tiraillement qu’il ressenti lorsqu’il entendit le son d’une voiture qui s’arrêta devant sa demeure alors qu’Angel s’en extirpait. Ce tiraillement le mettait en alerte. Il ne devrait pas le ressentir. Un soupir s’épancha de ses lippes lorsqu’il se rendit compte qu’il s’efforça de ne pas regarder les traits de son ami, d’aller le rejoindre pour avoir accès à des données qu’il avait besoin d’entendre, sans en avoir la légitimité. Non. Il devait lui laisser son jardin secret et ne surtout rien ressentir de particulier à ce sujet. Pourtant ce pincement était là et s’il était encore incapable d’en comprendre la réelle cause, il savait qu’il puisait son existence dans l’attachement qu’il avait pour cet homme. Un homme qui avait été le centre de son existence durant trois ans. Celui vers lequel il cherchait à se tourner pour fuir le présent et juste ressentir la sérénité qu’il lui apportait. Seulement, c’était ce que lui avait besoin. Pas ce dont son ami avait besoin. En conséquence, il resta sagement dans sa résidence, s’occupa autant que possible l’esprit, la musique dans les oreilles, la mine de son crayon glissant sur le carnet de croquis dont il noircissait les pages. Il ignorait ce qu’il dessinait, il s’enfermait dans une bulle hermétique, ne répondit à aucun message au cours de la journée. C’est à peine s’il prit conscience que Lucy était entrée. Il la laissa vaguer à ses occupations personnelles. Elle l’informa qu’elle allait courir. Il lui offrit un sourire contrit, à défaut qu’il soit sincère. Il abandonna son carnet, se releva pour préparer le repas. Il pouvait au moins se concentrer sur cette simple tâche, tout comme d’échanger avec Danielle lorsqu’elle arriva. Il la laissa vaguer à ses occupations personnelles. La pluie semblait s’être abattue sur la ville. Il trouva curieux que Lucy ne soit pas déjà rentrée. Inquiet, il tenta de l’appeler. Se disant qu’elle était sur le chemin du retour, il ne réitéra pas son appel immédiatement. Il retenta une vingtaine de minutes plus tard. Toujours pas de réponse. Il sentit la piqure de ce silence, de ce qu’il pouvait impliquer et il n’aimait pas cela. Voyant l’heure du repas avancer, il prit la décision de diner sans elle. Il invita Danielle à venir diner. Il s’efforça de faire bonne figure, mais même sa fille trouvait curieux qu’ils dinaient sans maman, sachant que sa voiture était dans l’allée.

« Elle s’est peut-être refugié quelque part de la pluie. Elle ne tardera pas à rentrer. » Avait-il tenté d’expliquer en se montrant le plus serein possible, mais ce n’était qu’une façade.

Ils échangèrent de tout et de rien, mais lorsque Danielle remonta dans sa chambre, il se jeta sur son téléphone, tenta de l’appeler, l’inquiétude et une colère nocive prenant doucement emprise de son corps. Il détesta ce sentiment de nouveau, alors à bout, il se dirigea naturellement vers la dépendance, soulagé d’y voir un peu de lumière. Il traversa la cour sans se protéger de la pluie. Il ne prit pas conscience de son hésitation, qui le poussa à rester plus longtemps sous la pluie. Il finit par atteindre le chambranle de la porte, par frapper afin qu’il l’invite à entrer. Ce qu’il fit. Il pénétra donc dans la dépendance, s’efforçant de ne pas regarder la pièce, trouver des traces de quelque chose qui pouvait lui donner des indices.

« Bonsoir Angel. Navré de t’importuner, mais Lucy n’est toujours pas rentrée, et ne répond pas à mes appels ou messages. Je commence à m’angoisser. Je… » Il prit conscience que son échine tremblait sous l’intensité de ses émotions, alors que ses prunelles tombaient dans celles de son ami. Elles se mirent à trembler.

« Je crois qu’elle est avec lui. J’en suis presque certain. » Lâcha-t-il dans un sanglot qu’il s’efforça de faire taire en plaçant sa manche devant sa bouche.

Parce qu’il n’y avait que cette possibilité qui pouvaient faire sens. S’il lui était arrivée quelque chose, quelqu’un l’aura contacté, aurait répondu à un appel. Son silence, il était rare, mais assez évoquant. Elle l’aurait rassuré qu’importe la raison, mais si elle restait silencieuse, c’était parce qu’elle avait rompu sa promesse. Celle de ne plus le voir et c’était une pensée assez suffisante pour faire céder ses barrières. Il n’arrivait pas à l’encaisser et il se tournait vers la seule âme qui savait comment gérer cette merde quand elle lui tombait dessus comme une épée de Damoclès.

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« Merci encore pour cette soirée. »

J’offrais un sourire à l’homme qui se tenait devant moi. Un baiser offert, des frissons, bien trop appréciable, roulant le long de ma nuque. Je le laissais s’envoler, retourner à ses occupations tandis que je retournais aux miennes, à la dépendance de la demeure d’Elias, dans laquelle j’avais trouvé refuge depuis plusieurs semaines déjà. Je n’avais pas dormi de la nuit. Le sommeil me guettait. J’avais horriblement besoin de repos. Pas seulement à cause de mon rencard, mais aussi à cause de ce qui s’était passé la veille, avec Elias. Je n’avais pas eu de nouvelles de toute la soirée. Pas un message, pas un appel. Pourtant, j’avais surveillé mon téléphone, avait même vérifié plusieurs fois, mais non, rien. Pas un signe de vie.

Alors j’avais préféré oublier. Pour de bon cette fois. Oublier les sentiments impossibles que je portais à Elias. Oublier l’état dans lequel il était lorsqu’il était parti la veille, me laissant seul avec mon rendez-vous qui m’attendais. Je mentirais en disant que je n’avais pas passé une belle soirée auprès de lui. Que je n’en avais pas profité comme il se devait. J’avais réussi à ne pas trop y penser, pour me concentrer sur mon amant de ce soir. Sur moi et mes désirs, mes envies. À présent, le sourire que je portais aux lèvres portait le souvenir de cette soirée. Avais-je envie de le revoir ? Sans doute que oui.

Je m’étais effondré dans le canapé lit, à peine après avoir passé la porte. Je n’avais même pas pris la peine de me changer, pour m’endormir en quelques secondes à peine. J’avais hésité pourtant, à passer voir Elias, pour simplement m’assurer de son état. Être sûr qu’il aille bien. Mais non. Je m’étais retenu. Parce que c’était mieux comme ça. Parce qu’il n’avait sans doute pas besoin de moi.


Il commence à être tard, lorsque les coups résonnent à travers l’espace. J’émerge avec difficulté, sans prendre conscience de suite de ce qui se passe. Il me faut quelques secondes, pour réaliser que l’on tambourine à ma porte. Mes yeux s’ouvrent finissent par s’ouvrir d’un coup, sous la poussée d’adrénaline que ce bruit provoque en moi. C’est Elias. Ça ne peut être que lui. Les vêtements débrayés, je me lève en un bon pour rejoindre la porte et le laisser enfin entrer.

« Entre, entre. »

Il est trempé. Dans un état second. Je mets quelques secondes, avant de comprendre ce dont il parle. Lucy. Lucy est partie. Et merde. L’angoisse lui monte à la tête. Je le comprends avant même qu’il ne l’avoue lui même. Il est au bord du gouffre. Au bord de la crise. Il a besoin de moi. Maintenant.

« Ok… Calme toi. Ça va aller. Ça va aller. »

J’approche. Mes mains glissent à sa rencontre pour échouer sur son visage, le forçant à rester avec moi, à ce que son attention ne me quitte pas. Je lui offre un regard aussi réconfortant que possible.

« Viens. On va chercher de quoi te sécher. Tu vas attraper la mort si tu restes comme ça. »

Je refuse de le lâcher, le tirant avec moi à travers la pièce jusqu’à la salle de bain pour lui trouver une serviette de bain. Mes mains s’activent. Je glisse le tissu sur ses cheveux, entreprend d’enlever son sweat complètement trempé pour ne pas qu’il attrape froid. Mes gestes sont protecteur, lents et assurés. Cela me brise, de le voir ainsi.

« Qu’est ce qui te fait penser ça ? Peut-être qu’elle a juste trouver un endroit pour s’abriter ? Peut-être qu’elle a perdu son téléphone ? »

Je savais, quelque part au fond de moi, qu’il avait sans doute raison, même si je refusais de l’envisager. Je refusais que son couple éclate, là, maintenant, en cet instant. Il devait forcément y avoir une autre explication. Forcément.

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(Tenue)  A cet instant, il est tel un marin égaré qui s’accroche à la lueur émise par le phare qui éclaire la baie. Elias en a pas réellement conscience. Il est juste dévasté par ces angoisses et pensées parasites qui obstruent son jugement. Il a besoin de s’arrimer, s’ancrer à quelqu’un qui lui permettra de rester dans la réalité et jusqu’à ce jour, le seul qui est toujours parvenu, c’est lui. Lui, qu’il vient retrouver, s’immisçant dans sa vie comme une gangrène qui pourrait l’arracher à un état de félicité qu’il a dû l’expérimenter. Son esprit en prend conscience quand il traite les données visuelles, qu’il le retrouve dans la même tenue, bien moins lisse que la vieille, signe évident d’une nuit passée en compagnie d’un autre, de cet homme qui l’a reconduit ce matin. Cette donnée qui pique, autant que celle autour de laquelle il tourne en boucle : l’absence de Lucy. Ce sanglot qui lui échappe, le prend de court, alors que ses pensées s’agitent, deviennent un brouhaha d’images, de mots, de sensations qui lui arrachent des frisons de tout part, le conduisent à trembler. Ses menottes qui viennent s’imposer sur ses traits du visage, l’ancrant à l’instant. Instinctivement ses mains viennent se poser sur ses poignets comme pour les retenir là. Il sent des goutes d’eau perler sur son visage : mélange entre l’eau de la pluie et ses larmes muettes. Il est resté combien de temps sous l’eau pour être mouillé de la sorte. Son myocarde s’empale dans sa poitrine alors que sa respiration en fait de même. Il y a des incohérences dans ce qu’il pense être la réalité et ce qu’il en est. Il se laisse manipuler comme un pantin, le suit mécaniquement, à défaut d’avoir conscience de le faire. Il se retrouve dans la salle de bain, essuie ses larmes du bout de sa manche comme pour tenter de reprendre contenance, mais il est dans un piteux état et il le sent, le sait. Il laisse son ami lui sécher les cheveux, lui retirer son sweet-shirt pour retirer au maximum l’humidité qui rafraichit son épiderme. Cela ne devrait pas être le cas. Il a pourtant froid. Il se sent gelé et si fatigué. Il est une bombe prête à exploser. Les questions d’Angel effleurent son esprit. Un soupir las s’extirpe de ses lippes alors qu’il baisse les yeux sur sa silhouette trempée.

« Je le sais... C’est tout… Elle… elle aurait trouvé le moyen de me contacter… qu’importe ce qu’il aurait pu lui arriver…On m’aurait répondu ou on m’aurait contacté… » Sa voix est lointaine. Il n’a pas l’impression qu’il est celui qui les prononce.

Il se sent tellement fatigué. Il s’appuie sur le meuble du lavabo dans un second soupir, se tourne vers ce dernier pour cacher sa peine, la douleur que cette pensée lui inflige. La possibilité qu’il se fourvoie était tout aussi possible, mais à choisir il préfère cette éventualité que la plus dramatique. Il ne souhaite même y songer. Il ignore laquelle est la pire. Sa respiration est vive.

« Je ne devrais… pas être là… » Il murmure dans une voix étranglée, car malgré toutes ses pensées parasites, il a conscience qu’il envahit l’existence de son ami, alors qu’il s’efforce de préserver ses proches, encore et toujours.

« C’est totalement injuste de ma part ! » Il lâche dans un ton colérique alors qu’il vient donner un coup de poing sur le meuble, contrer la douleur mentale pour une douleur physique.

Cette culpabilité lui dévore les entrailles et le fait trembler d’autant plus surtout lorsque ses prunelles tombent dans les siennes à travers le miroir.

« Je suis vraiment désolé, Angel… » il lui demande pardon, car il a conscience de la mauvaise place qu’il lui donne dans son équilibre fragile alors qu’il baisse de nouveau la tête pour observer ses membres qui tremblent sous l’intensité de ses émotions.

Cette crise qu’il s’efforce de garder loin de lui, mais qu’il garde sous contrôle, sans savoir combien de temps, il va tenir, car il sent la vague arriver, l’engloutir petit à petit sous son passage. Il n’arrive pas à s’en préserver. Il n’a plus la force de lutter. Il n’y voit plus de sens.

« Si seulement, je pouvais ne rien ressentir… » Une supplique, car son esprit déraille, ne sait pas gérer ces émotions qui sont trop violentes pour être rationnelles alors qu’il se sent sombrer, se noyer petit à petit.  Il veut que tout s’arrête.

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Elias vacille. Son état est bien pire que ce que je ne l’aurais pensé. Peu importe ce qui pourrait sortir de mes lèvres à cet instant, il me semble que rien ne pourrait le faire changer d’avis. Rien ne pourrait le convaincre que Lucy n’est pas partie rejoindre cet homme, avec qui elle avait eu une aventure. Je n’ose plus le contredire, pour me contenter de passer la serviette sur ses cheveux, comme si ce simple geste pouvait tout effacer de la peine qu’il ressentait à cet instant. Que faire, que dire, dans un moment pareil ? Je n’ai pas les mots, a cet instant. D’autant plus dans cet état de fatigue dans lequel je suis encore. Je peine à réaliser pleinement la situation. J’aurais besoin d’une douche, d’un café, mais tout cela est secondaire. Il n’y a que son état qui m’importe, c’est la seule chose qui me fait tenir debout.

Alors, je le laisse extérioriser sa peine, arrêtant enfin mes gestes envers lui. Je croise son regard dans la glace. Je n’aime pas son discourt. Encore moins qu’il se fasse du mal. La violence qui découle de son geste me crispe. Je ne m’y attendais pas. Et je ne laisserais certainement pas penser ainsi. Ni agir ainsi.

« Arrête de faire ça. Arrête de t’excuser. Et de me préserver. Ça n’a pas de sens Elias ! »

Mes mains s’abattent sur lui pour le faire se retourner, pour qu’il puisse me faire face à nouveau. Ses larmes me percutent. Elles éveillent mon palpitant. Mon dieu, j’aurais voulu ne jamais partir hier soir. J’aurais dû rester auprès de lui. J’aurais dû comprendre sa détresse, lorsqu’il était venu me voir. Et là, c’est encore pire. Bien pire.

« S’il te plaît, arrête. Arrête de te faire du mal comme ça. Je t’en prie. »

Mon ton s’est radoucit, tout comme mes gestes à sa rencontre. Mes doigts viennent essuyer ses larmes qui roulent silencieusement sur ses joues en une caresse de mon pouce. Que j’en voulais à Lucy soudain, de le mettre dans un état pareil. Une pointe de colère à son encontre me foudroyait le cœur. Si elle le voyait ainsi, est-ce qu’elle se sentirait coupable ? Est-ce que qu’elle réaliserait le mal qu’elle était en train de lui faire ?

« Ça va aller. Même si tu crois que non. Même si ça t’arrache le cœur. Même si tu n’as plus envie de ressentir quoi que ce soit. Ça va aller, je te le jure. »

Ma voix est tel un murmure entre nous. Elle cherche à l’apaiser, autant que je le puisse. Ma main glisse dans sa nuque, cherchant à lui apporter l’apaisement dont il a besoin. Je réalise à peine l’intensité des caresses que je lui offre. Je m’en fou, si ça peu lui faire du bien, soulager son âme et les sentiments qui le déchirent.

« Je suis là. Tu peux t’accrocher à moi. Tu peux me gueuler dessus. Me frapper si tu veux, si ça te fait du bien. Je m’en fiche, tu entends ? »

Je lui offre un sourire désabusé, empli de la tristesse qu’il porte. D’un coup, mon rencard de la veille me paraît être à des années lumières. Comme si il n’avait jamais existé.

« Viens, allons nous poser dans le canapé. Je vais nous faire une boisson chaude, ça te fera du bien. »

Il tremblait encore. De froid et sans doute de tout ce qu’il pouvait ressentir en cet instant. Je le tirais à ma suite pour le guider vers le canapé, où je l’encourageais à s’asseoir. J’attrapais un plaid, avec lequel je l’entourais.

« Je vais me changer vite fait, j’arrive. »

C’est à peine si j’osais le laisser seul. Mais j’avais besoin de me changer. D’enfiler quelque chose d’autres. D’envoyer valser les traces de ma nuit précédente pour me sentir plus à l’aise. Je me glissais rapidement jusqu’à ma garde robe, enlevant ma chemise et mon pantalon à la hâte pour les troquer contre un sweat et un jogging. Mes pas me guidaient vers la cuisine. Je sortais deux tasses et du thé à la citrouille, mon préféré, en espérant que cela lui ferait du bien.

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(Tenue)  Il s’en veut de ne pas être en mesure de gérer cette tempête émotionnelle qui s’abat sur lui. Il devrait pouvoir gérer ses émotions, mais il n’y parvient pas. Depuis son retour, rien ne se passe comme il le voudrait. Il se rend compte que croire qu’il pourrait rentrer et reprendre sa vie était une utopie. C’était trop, trop différent, trop déroutant et trop dévastateur. En trois ans, la vie avait continué sans lui. Sa femme était sans doute, celle qu’il avait trouvé le plus changé, celle dont il avait eu le sentiment aussi fugace que profond qu’elle n’était plus sienne. Il avait voulu faire taire cette intuition, mais elle avait vu juste, comme il était profondément persuadé que son absence était due à la rupture de cette promesse qu’elle lui avait faite. Bien sûr qu’elle s’en voudrait, mais le mal était fait. La blessure béante était là et douloureuse. Aucun mot ne pourrait la résorber. Elle le marquait à vif. Il devait l’affronter, aussi difficile que cela soit cette vérité. Seulement, il ne parvenait pas à affronter la réalité seule. Il se noyait et il ne voulait pas perdre pied, mais il se rendait compte que c’était déjà le cas. La seule personne vers laquelle il pouvait s’accrocher se trouvait derrière lui. Cela n’aurait pas dû être le cas. Il s’en voulait de l’immiscer ainsi dans son enfer familial, de l’entrainer avec lui dans son sillage. Il était en colère contre lui, parce qu’il ne parvenait pas à le préserver alors qu’il s’efforçait de préserver tout le monde. Il avait besoin de lui et ça le tuait de l’intérieur, car cela ne devrait pas être le cas. Il n’était plus sa responsabilité. Il ne l’avait jamais été. Du moins, il n’aurait jamais dû l’être.

« Bien sûr que je ne peux que m’en vouloir, Angel ! » Il lui lance dans une voix enraillée par ses larmes qui s’écoulent sans discontinuer sur ses joues.

« Je devrais te préserver comme je préserve tout le monde depuis toujours ! Tu ne devrais pas avoir à me voir ainsi, si… » Il ne trouve pas ses mots.

Comment pourrait-il qualifier l’état dans lequel il se trouve à cet instant ? Il l’ignore. Il se sent plus vulnérable que jamais. Ses suppliques lui arrachent des frisons, touchent une corde sensible en lui qui l’empêche de poursuivre. Il redevient une poupée de chiffon face à lui, trouvant une sensation de bien-être dans chaque frôlement de ses doigts sur son épiderme. Sa voix se veut apaisante et il sent l’angoisse se décroitre légèrement. Bien sûr, sa respiration demeure vive, ses membres tremblent et ses pensées sont brouillées, mais au moins, il est encore ancré dans la réalité. Il lui offre si naturellement son soutien, prêt à se sacrifier pour s’assurer qu’il garde la tête hors de l’eau. Cela le bouleverse.

« Angel… » Il murmure alors qu’il le tire vers la pièce principale de la dépendance pour prendre place sur le canapé lit.

En même temps, il n’a pas la force de lutter, alors il se laisse envelopper d’un plaid, ses prunelles hagardes suivant naturellement ses gestes sans pouvoir s’en empêcher. Il y trouve une certaine occupation qui maintient ses pensées au loin. C’est presque apaisant. Du moins, jusqu’à qu’il l’observe se diriger vers sa garde-robe pour tronquer sa tenue pour une autre, s’offrant à son regard qui capture quelques marques qui ne laissent aucun doute sur l’existence d’une nuit avec son rencard de la vieille. Une pensée qui lui rappelle cette piqure douloureuse ressentie en début de journée. Une sensation déplaisante alors qu’il se recroqueville sur lui pour poser sa tête contre ses cuisses, serre les pans du plaid autour de lui pour chasser ces images de son esprit. Il ignore ce que ça engendre en lui. Il sait juste que ça le désarme totalement. Il s’intime à respirer profondément. C’est tellement le merdier dans sa tête.

« J’ignore si ça va aller mieux, tu sais… » Il lâche dans un soupir profond. Les yeux clos, il s’efforce de trouver les bons mots pour exprimer ce qu’il ressent, mais c’est compliqué d’y voir clair.

« Je m’en veux de ne plus être le roc qu’ils ont toujours connu, de ne pas pouvoir prendre la nouvelle aussi rationnellement que j’avais l’habitude de le faire… Je m’en veux de ne pas pouvoir te préserver également, car ça met en évidence certaines choses dont je ne suis pas pleinement certains d’appréhender l’incidence. » ni même la raison. il lui avoue simplement dans un soupir tellement éreinté qu’il a pas réellement l’impression de prononcer ces mots.

« J’ai le sentiment de te vampiriser, de ne rien t’apporter alors que tu pourrais pleinement avancer sans moi. » Il conclut en venant redresser son visage pour plonger ses iris dans celles de son ami.

Est-ce que cette vérité est douloureuse ? Assurément. Elle est perceptible dans l’éclat de ses prunelles, mais il ne l’aborde pas alors qu’une tasse est déposée sur la table basse. Son attention s’attarde sur cette tasse, comme si elle devenait le centre de son univers. Du moins, à cet instant, car elle le préserve d’aller plus loin dans ses réflexions et de maintenir cette crise au loin, malgré les effets encore présents. Il tremble comme une feuille, plus gelé de l’intérieur que jamais.    

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J’arrive tant bien que mal à l’apaiser. Au moins un peu. Était-ce grâce à ma voix ? Aux caresses que je lui offrais ? À un mélange de tout cela ? Sans doute. Le principal était que cela fonctionnait. Pourtant il insiste, persuadé qu’il est de devoir être le roc qu’il a toujours été auparavant.

« Est-ce si grave, que je te vois ainsi ? »

Sa vulnérabilité, elle fait partie de lui. De l’homme que j’ai appris à connaître au fil des années et duquel j’ai fini par tomber amoureux. J’ai mis du temps à comprendre, du temps à réaliser mes sentiments, mais à présent qu’ils étaient là, que je ne pouvais plus les nier, le fait qu’il rejette cette partie de lui était particulièrement douloureuse. Était-ce cela, la réalité ? Est-ce que l’homme dont j’étais tomber amoureux n’était qu’un mirage ? Que le reflet d’un esprit malade ? La réponse à cette question me semblait bien trop douloureuse en cet instant.

Nous sortons de la salle de bain. Je l’installe dans le canapé lit, lui apporte le réconfort qui me paraît naturel. Je reste quelques instants dans la cuisine, le temps de préparer la boisson que j’ai promise, tout en l’écoutant de loin. Je prends conscience de ces mots, qui ne font qu’accroire le sentiment qui m’enserre le cœur. Je fronce les sourcils. J’ai du mal à le comprendre.

« De quoi tu parles ? Quelles choses ? »

Je me détourne du plan de travail après avoir récupérer nos tasses, que je viens déposer sur la table basse, retrouvant ma place auprès de lui. Mon regard emprisonne le sien lorsqu’il relève la tête vers moi.

« Comment tu peux dire un truc pareil ? »

Ses mots m’arrachent le cœur. Parce que ce n’est pas vrai. Ce n’est pas le reflet de la réalité mais plutôt de ce qu’il a dans la tête. Je déteste qu’il parle ainsi. Comme si il n’avait pas d’importance. Comme si nous n’étions rien. Ça me laisse un goût amer en bouche, que je tente de dissimuler du mieux que je peux.

« C’est vraiment ce que tu penses ? Que tu ne m’apportes rien ? Sans toi, je ne serais déjà plus là Elias. Sans toi, tout ça n’aurait pas de sens. Tu sais, ce n’est pas parce que je ne le montre pas, que je vais bien. Tu m’aides à me maintenir à flot, à ne pas sombrer. Et ça depuis qu’on se connaît. Ça a toujours été le cas. C’est encore plus vrai aujourd’hui. »

Je repris mon souffle. Parler de moi n’avait jamais été chose facile. Jamais. Parler de mes sentiments, de qui pouvait me traverser, avait toujours été quelque chose de délicat. Parce que j’avais peur des conséquences. Et parce que j’étais persuadé que ça n’intéressait personne, de toute façon.

« Sans toi, je ne sais pas où je serais aujourd’hui. Tu crois que j’avancerai sans toi mais en réalité c’est grâce à toi que j’y arrive. Ma vie a un sens, grâce à toi. »

Mon cœur s’affolait dans ma poitrine. J’étais devenu incapable de sourire, prisonnier de la vérité que je venais d’avouer. Ma main épousa sa jambe à travers le plaid qui le recouvrait. Il ne réalisait pas, l’importance qu’il avait à mes yeux. Celle qu’il avait dans ma vie.

« J’arrive à avancer auprès de toi. J’arrive à vivre, à nouveau, comme j’avais oublié de le faire ses dernières années. Tu n’as pas la moindre idée de l’importance que tu as à mes yeux, n’est-ce pas ? Tu n’as pas idée de ton impact. Tu crois que tu me fais du mal ? Si tu savais comme tu as tord Elias… »

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(Tenue) Était si grave qu'il le voit vulnérable ? Oui. Non. Il sait juste que ça ne devrait pas être devant lui qu'il se dévoile de la sorte. Sans doute parce que c'est Lucy qui devrait être à ses côtés à cet instant et que ce n'était pas le cas. Les vœux de leur mariage étaient bafoués des deux côtés, il fallait bien qu'il l'admette. En la mettant de côté, en voulant la préserver, il avait érigé des barrières entre eux et sachant qu'entre temps, elle avait développé des sentiments pour un autre homme, l'issue était presque jouée d'avance. Il aurait dû le pressentir. Sans doute l'avait-il senti sans tellement en prendre conscience. La vérité faisait mal. Il se rendait compte qu'il y avait quelque chose de plus qu'il lui échappait inexorablement. D'autant plus lorsqu'il ressentait une telle piqûre à voir son épiderme marqué par la présence d'un autre. C'était incongru, déstabilisant et il n'avait pas la capacité de taire ce qu'il parvenait à identifier. Pourtant les questions le perturbaient, car il ne pouvait pas les ignorer.

« Le fait que j'ai besoin de toi pour me sentir bien. Je sais que ce n'est pas anodin.  Je le sais. » Il admet faiblement.

Cela ne l'empêche pas de sentir que l'équilibre est fragile entre eux. Il a le sentiment que celui qui a le plus besoin de l'autre, c'est lui. Tout en sachant que ça ne devrait pas être le cas. Sans doute que s'il n'était pas au bord de la crise de nerfs, il aurait pu taire ceci, mais ce n'était pas le cas. Il ne prend pas conscience qu'en évoquant ce déséquilibre, il blesse son ami. Ce sont ses propos qui le ramènent à la réalité. Des paroles qui le touchent, le bouleversent, l'amènent à se perdre dans l'intensité de son regard. Ce qui n'est pas conventionnel, mais qui semble si naturel à ses côtés. Tout lui semble simple à ses côtés. Même au cœur de l'enfer, il est parvenu à atténuer les effets dévastateurs de ce qu'ils ont vécus. Il rend les choses à la fois simples et compliqués, car il sent qu’il y a un sens derrière cela. Le fait que cela n’est plus Lucy qui a un tel effet pour lui et qu’il n’a pas encore la capacité de l’accepter. Il se fait embarquer dans son discours, prend l’intensité de ses émotions comme une vague scélérate et cela l’ébranle. Le contact de sa menotte contre sa cuisse, toucher apaisant et chaud au-dessus du tissu qui sépare leurs épidermes. Ce toucher aussi intime que les précédents. Ces paroles ont le mérite de chasser tout le reste en périphérique. Son regard ancré au sien, il se rend compte que sa respiration se fait lente et difficile, comme s’il tentait de reprendre ses esprits après une longue apnée. C’est peut-être ce qu’il vient de se produire. Il l’ignore. Il est tellement chamboulé par ce qui vient d’être avoué. Ces mots, s’il était honnête, il les lui avait posés par écrit. Cela avait déjà été intense à lire, mais à les entendre de vive-voix, c’était dévastateur. Sans doute parce qu’il le regardait d’une manière différente, qu’il s’en rendait compte et que cela ne le dérangeait pas.

« Je suis désolé, Angel… Je… » Il commence simplement en venant poser sa tête contre ses jambes. « Je ne voulais pas me montrer indélicat. » Il ajoute en venant tourner la tête vers lui. Sa main vient doucement frôler son bras dans une tendre caresse qui se veut amical et reconnaissante.  

« Merci. » Il murmure simplement en venant lui presser le bras. « Je ne sais que dire d’autre. J’ai beaucoup de chance de t’avoir. Je suis heureux de t’avoir à mes côtés. » Il ajoute comme pour qu’il comprenne bien l’importance qu’il a à ses yeux également.

« Tu m’apportes l’air qu’il me manque, même si j’ignore ce que cela dit de moi, mais ça me fait du bien. J’en ai tellement besoin, de trouver du sens, la force d’avancer et tu me donnes cette lueur d’espoir tellement que je me repose sur toi, alors que je ne l’ai jamais fait auparavant… » Il ajoute alors qu’il vient fermer ses paupières en se redressant.

« C’est nouveau pour moi. C’est sans doute mon plus gros défaut. A force de vouloir être toujours fort, j’en oublie que je suis qu’un être humain et que j’ai aussi des faiblesses. » Un soupir s’épanche de ses lèvres alors qu’il vient recouvrir sa paume de la sienne pour la serrer délicatement.

« Merci de les accepter et de prendre soin de moi, Angel. » Il conclut alors qu’il regarde sa main posée sur la sienne dans un mouvement qu’il lui semble si normal, alors qu’il n’a jamais été si intime avec un autre homme.

« J’ignore ce qu’il va se passer désormais… C’était une possibilité que j’avais envisagé, tu sais, qu’elle ait refait sa vie durant mon absence. Après tout, trois ans, c’est beaucoup de temps, surtout quand on pense l’autre mort. » Il sent les sanglots dans sa voix. Ils sont sans doute perceptibles dans l’éclat de ses rétines.

« J’aurai pu l’entendre même si ça faisait mal, mais elle m’a menti, elle a tu l’existence de cet homme et à part me dire désolée, elle n’a pas été foutu de me donner d’explications. J’aurai pu comprendre, j’aurai pu lui pardonner, mais le mensonge, cela m’a toujours rendu dingue. Elle le sait et pourtant, elle l’a fait. » Sa voix se fait tranchante, bien que secouée par quelques larmes muettes qui enraille sa voix.

« Et je lui en veux. Je lui en veux terriblement… et si je m’écoute, tout ce qui me vient est du ressentiment, de la colère aveugle et ça me bouffe. Cela me bouffe, car ce n’est pas moi. Cela n’a jamais été moi et je lui en veux encore plus terriblement de me faire devenir ce monstre. » Il murmure en relevant la tête pour tenter de ravaler ses larmes qu’il vient essuyer du bout de ses doigts.

« Je veux juste que ça s’arrête. Je ne veux plus subir ça, mais je ne sais pas quoi faire. » Il admet faiblement, essayant tant bien que mal d’envisager ses possibilités.

Peut-être que de lui en parler, va lui permettre de garder l’esprit plus au clair lorsque Lucy va rentrer et qu’elle lui fournira l’explication de son absence de réponse. Il saura alors si son intuition est toujours bonne ou s’il s’est trompé. Si c’est le cas, il n’attendra pas que cette possibilité se concrétise. Si Lucy ne peut pas prendre une décision. Il la prendra pour eux, parce qu’il ne veut pas vivre dans le mensonge.

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Sa réponse me déstabilise. Je ne réponds rien, bien trop absorbé par la signification de ce qu’il vient de m’avouer. Il a besoin de moi pour se sentir bien. Alors que c’est Lucy dont il devrait avoir besoin. Lucy, qui semble avoir disparu de la circulation. Lucy qui l’a abandonné, pour aller rejoindre son amant. Je ne peux qu’imaginer, à quel point tout cela doit être douloureux. Égoïstement, je suis heureux d’être là pour lui, comme je l’ai toujours été ses dernières années. Comme je le serais toujours. Quoi qu’il ce passe. Quoi qu’il arrive. C’était un pacte entre nous. Une évidence, une promesse gravée à jamais dans mon âme. J’essaie de ne pas prendre trop à cœur ce qu’il vient de révéler, de ne pas me laisser aller au surplus d’émotions qui me monte à la tête. Je tente de faire taire mon cœur fou dans ma poitrine, de ne pas me laisser envoûter par son regard qui refuse de lâcher le mien. J’étouffe cet espoir, pour accueillir les excuses qu’Elias fini par lâcher.

« Ce n’est rien. »

La caresse sur mon bras me fait fermer les yeux. Une fois de plus, je constate trop tard à quel point ce genre d’attention est trop importante, que cela à le don de me mettre dans un état second. La nuit passionnée que j’avais pu passer avec mon amant n’avait rien changé à cela. Je déglutis difficilement en en prenant pleinement confiance. Ma tentative avait échoué, lamentablement. Les paroles qui suivent n’arrangent rien à´cette vérité. Elles me bouleversent. Me heurtent autant qu’elles m’affolent. Je refuse de m’y accrocher, à ses doux mots qui glissent de ses lippes. Parce que si je le fais, je perdrais le contrôle pour de bon. Si je le fais, je céderais à l’envie grandissante qui dévorait mon être de lui prouver mon attachement par d’autres moyens. Je me haïssais, de penser à ça dans un moment pareil. Sa main trouva sa place sur la mienne. Mon dieu, tout cela finirait par me rendre fou.

« Je te le confirme, c’est sans doute ton plus grand défaut. Au moins maintenant tu commence à en prendre conscience. » dis-je avec un sourire. « Je le ferais toujours. Quoi qu’il se passe. »

Quoi qu’il se passe. Je ne trouve rien d’autre à dire. Peut-être est-ce suffisant, après tout. Je quittais son regard en me souvenant du thé, qui trônait toujours sur la table basse, lâchement abandonné. Je portais la tasse à mes lèvres, redécouvrant son goût avec délice. La chaleur du liquide me fit un bien fou.

« Ça ne m’étonne pas de toi, que tu l’aies envisagé. Je comprends ta colère. Je comprends que tu lui en veuilles. Il faudra du temps pour que ça passe, tout ça. Je pense que même si elle te connaît, même si elle sait que tu n’aimes pas les mensonges, elle espérait encore sauver votre couple. Sans doute était-elle dans le déni, aussi. Elle s’en veux sans doute, tu sais. »

Je ne la défendais pas. Pas du tout, j’essayais juste de trouver les mots pour essayer d’apaiser la rancœur que je ressentais de sa part.

« C’est normal que ça te bouffe. Je crois qu’à ta place, je serais dans le même état que toi. »

Mon pouce s’activa contre sa main dans une caresse inconsciente, diffusant une douce chaleur le long de mon bras.

« Parle lui, lorsqu’elle rentrera. Peu importe ce qu’elle te dira. Peu importe où elle est maintenant, tu ne peux pas rester comme ça. Tu as besoin de stabilité. Cette situation va te rendre fou, si tu la laisses dégénérer. » dis-je en lui accordant un nouveau regard. « Je suis désolé. Je sais que ma présence ici ne vous a pas aidé. C’est ce que je craignais, avant de venir. Et c’est exactement ce qui se passe. Tout ça, c’est en partie de ma faute. Tout le temps qu’on a passé ensemble, tu aurais dû le passer avec Lucy. Je m’en veux, vraiment. »

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(Tenue) L’instant est troublant. Il a bien conscience que quelque chose est en train de se jouer dans cet échange même si le sens lui échappe. Il aura tout le temps d’y penser plus tard. A cet instant, il sait juste que sa présence l’empêche de sombrer dans une nouvelle crise qui menaçait de le submerger, que ses paroles lui ont permis de la tenir à l’écart et qu’il se sent plus serein. Il lui fait part de ces fêlures, de ces pensées qu’il garde pour lui, mais qui finissent par se dévoiler. Il se sent en confiance avec lui. Cela a toujours été le cas. Il sait qu’il peut compter sur lui quoi qu’il arrive. C’est un pacte qu’ils se sont fais au fond de l’enfer. Sans doute ont-ils scellé leurs existences l’une à l’autre, sans en avoir réellement conscience, mais l’idée n’est pas angoissante. Elle est même apaisante en réalité. Surtout dans le contexte actuel où son existence semble reposer sur un équilibre inexistant, un mensonge. La réalité est difficile à avaler. Pour une fois, il dévoile le fil de ses pensées, admet les griefs qu’il a développé à l’encontre de son épouse. Il éprouve une profonde haine de ressentir les choses comme c’est le cas présentement. Cette rancœur ne lui est pas coutumière. Elle met juste en évidence la blessure latente que le mensonge a engendré en lui, qui ne parvient pas à cicatriser. Le retour d’Angel se veut apaisant, compatissant envers Lucy, à l’image du discours que lui-même aurait tenu. Il soupire, car il sait très bien que Lucy s’en veut, que la situation n’est clairement pas simple à vivre pour elle, mais il a toujours cru qu’ils pouvaient tout se dire. Il a toujours laissé la porte ouverte pour échanger de ce qui est important. Il aurait sans doute pu être blessé, mais il ne serait pas senti si trahi que cela a été le cas lorsque la supercherie a été découverte, notamment dans un instant où il était vulnérable, où il n’a pu que prendre cette vérité en pleine face sans pouvoir se préparer. Elle l’avait contacté, car elle pouvait compter sur lui. Pas sur lui. N’était-il pas en train de faire la même chose à bien des égards ? Non. Peut-être que oui. Surtout en partageant des gestes aussi intimes avec Angel, bien qu’il ne fût que son ami. Les choses auraient pu être interprétées autrement s’il avait été une femme. Le doute aurait été permis. En vrai, il l’est à cet instant et il en prend conscience. Elias accuse le coup de cette information, sans ressentir le besoin cuisant de rompre ce contact comme cela a pu être le cas quinze jours auparavant. Les paroles d’Angel sont sages, à l’image de l’homme qu’il a toujours connu. L’aura de sérénité qu’il dégage a toujours eu fait ses effets sur lui. Ce soir en est la preuve parfaite de nouveau. Il est prompt à se flageoler, lui évoque une part de responsabilité qui n’est pas la sienne.

« Je pense malheureusement que l’issue était inévitable. Je pense être une personne avec une grande capacité d’écoute, m’efforçant de toujours dire la vérité en y mettant les formes. L’honnêteté fait partie de mes traits de caractère. Je considère que je mérite la même chose et lorsque je me rends compte que cela n’est pas le cas, je peux me montrer très froid. Encore plus s’il s’agit de ma femme, qui est avant tout ma meilleure amie, qui sait qui je suis, au plus profond de mes tripes, en dépit de la maladie. J’ai voulu croire que je pourrais lui pardonner, mais je pense que c’était qu’un énième mensonge auquel j’ai voulu m’accrocher. » Il lui avoue en venant inspirer profondément.

« La réalité c’est que cet homme avait déjà trop d’importance dans son existence à mon retour, mais qu’effectivement, elle a vécu dans le déni. Mais je ne peux le tolérer. J’aurai peut-être dû prendre la décision à sa place, ce soir où la vérité a éclaté. Je pense que ta présence ou non, n’aurait rien changé. J’aurai juste pris la décision et aurait traversé les conséquences seuls. » Il murmure simplement dans un ton absent.

« Mais j’ai conscience qu’il y a une forme d’hypocrisie dans ma posture. Ce qui est assez ironique quand j’y pense. Je suis prompt à lui reprocher une affection qu’elle a développé pour un autre, sur lequel elle peut compter, alors que je fais la même chose avec toi. Même si la nature du lien est différente, Kalen est son Angel dans une certaine mesure. » Il évoque le fil de ses pensées sans réellement prendre conscience de la portée de ses mots.
Du moins, pas totalement. Pourtant, il vient d’admettre qu’il a de l’affection pour Angel, qu’il a acquis une place particulière pour son bien-être, mais il ne va pas au bout de sa réflexion, car son esprit est concentré sur la raison de sa fébrilité initiale.

« Si elle veut construire quelque chose avec cet homme, la seule chose que je peux lui offrir, c’est sa liberté à défaut de mon pardon. Je ne me sens pas encore capable, même si j’ai pleinement conscient que je suis injuste. Je pense que c’est la meilleure chose à faire. » Il annonce alors qu’il vient reposer ses jambes sur le sol pour reprendre une posture plus conventionnelle. Il se penche pour attraper la tasse qu’il porte à son visage pour savourer une lapée.

« Tu m’avais proposé de me suivre quelque part, pour se changer les idées, loin de nos vies bousculées. Tu serais toujours d’accord ? » Il le questionne en venant lui lancer un regard. « Tu n’es pas obligé de dire oui, Angel, cela ira même si je reste seul, puis tu as peut-être d’autres plans de ton côté. » Il conclut simplement, attendant sa réponse.

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Mes paroles semblent trouver sens auprès de mon ami. Il me rassure, m’explique et soudain, c’est le Elias que je connais par cœur qui semble revenu auprès de moi. Rationnel. Qui parle avec sa tête avant de parler avec son cœur. La crise est passée. Un sourire ourle mes lèvres en écoutant ses explications. Je suis heureux de constater que les bouleversements qui l’habitaient on cessés, troqués par un calme semblant plus serein. Bien sûr, rien est réglé, bien sûr. Il souffre encore et continuera de souffrir, mais le plus dur semble être passé, du moins c’est ce que j’aime penser.

« Tu mets la barre très haut pour tes proches. Je peux comprendre que rien que l’idée de te décevoir peut être terrifiante. Ne soit pas trop dur avec toi même. Tu as voulu t’accrocher à ton mariage malgré tout, il n’y a rien de mal à ça, bien au contraire. » je lâche en me voulant rassurant.

A son tour, il tente de me rassurer, de me faire comprendre que ma présence en ses lieux n’a rien changé à leur histoire. J’aimerais le croire, réellement. J’aimerais que cela soit vrai. Néanmoins je ne peux pas m’empêcher de me crisper, lorsqu’il me compare à l’amant de sa femme. Je ne sais pas quoi en penser. Des sentiments contradictoires m’enveloppent face à cette vérité. J’ai peur de saisir toute la portée des mots qu’il vient de prononcer. Un espoir, infime, s’éveille en moi, telle une fissure qui me gardera sans doute éveiller cette nuit, à n’en pas douter. Étais-je si précieux à ses yeux ? À quel point, au juste ? Ma main fini par le quitter alors qu’il bouge, reprenant une meilleure position.

« Si tu es sûr de toi… »

Je ne savais quoi répondre de plus. La situation était délicate. Il n’y avait que lui, qui savait ce qui était bon pour lui et ce dont il avait envie. Sauver son mariage ne semblait en tout cas plus dans ses plans pour le moment et cela me désolait, loin, bien loin des sentiments que j’éprouvais pour lui. Puis, une proposition que je connaissais viens sur le tapis. Celle que je lui avais lancé, lors de mon arrivée. Il n’avait pas oublié…

« Oui, bien sûr que je suis d’accord. » dis-je les yeux brillants d’une excitation nouvelle. « Arrête de penser comme ça. J’en ai envie, sinon je ne te l’aurais pas proposé à la base. »

Partir quelque part, se changer les idées. J’étais ravi qu’il revienne de lui même avec cette proposition. C’était un moment idéal. S’éloigner de tout cela. Essayer de se retrouver. Je ne pouvais qu’approuver.

« Où aimerais-tu aller ? »

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(Tenue) Il est vrai qu’Elias peut se montrer exigeant, tout comme il l’est envers lui-même, mais il a tendance à être plus clément envers les autres qu’envers lui-même. Il est même particulièrement intransigeant avec lui. Ce qui est clairement perceptible dans sa manière de gérer son trouble et comment il a du mal à gérer son incapacité à rester stable dans ses émotions. Oui, il avait cru pouvoir lui pardonner cela. Sans doute l’aurait-il fait si les circonstances avaient été différentes, mais ce n’était pas le cas et désormais il savait que la pente serait difficile à remonter, surtout après ces dernières semaines où leurs échanges s’étaient révélés cordiales ou lourdes de sous-entendus. Ce n’était clairement pas une situation saine. D’autant plus si elle continuait à penser à lui. Il avait conscience qu’il extrapolait, qu’il n’avait aucune preuve tangible, mais son intuition était là, et c’était suffisant, car il était rare qu’elle lui fasse défaut. C’était un don comme une malédiction à ses yeux. Il s’exprimait simplement auprès d’Angel, car il se sentait en confiance et qu’il ne le jugeait pas. Il l’avait toujours soutenu depuis le jour de leur rencontre. Ce qu’il fait de nouveau à cet instant. Il n’était pas vraiment sûr de lui, mais dans l’état actuel des choses, il ne voyait pas d’autres solutions. On ne pouvait aller contre les sentiments. Du moins, Lucy était le genre de personnes qui suit ses émotions. Elle s’était attachée à un autre, un autre qui avait été là quand il était absent, un autre qui était plus stable que lui actuellement. Le savoir était blessant. Il était en colère contre elle, mais sans doute qu’il était plus en colère envers lui-même, car il avait manqué à ses devoirs en revenant différent. Elle prétendait le contraire, mais il n’avait pas été dupe. Aucun d’entre eux avaient vraiment agi pour se rapprocher de l’autre. Ils avaient juste sauvé les apparences, partagées des moments affectueux, mais qui avaient eu une saveur différente. Son corps prend conscience de l’absence de la pression de la main d’Angel sur la sienne. Sans doute qu’il ne devrait pas en être conscient de cette manière, mais c’était malheureusement le cas. Retrouver sa liberté pour espérer se retrouver, découvrir le nouvel Elias, l’ajustement entre l’ancien et le nouveau, c’est une perspective qui lui semble tentante et nécessaire. Il se rend compte qu’il est rentré trop tôt, qu’une introspection avec lui dans un environnement excepte de son quotidien pourrait lui être bénéfique. C’est en tout cas le pari qu’il est prêt à prendre afin de pouvoir digérer tout ce qu’il a vécu depuis son retour et tenter de tourner la page, avancer de nouveau. Du moins autant qu’il lui sera possible de le faire. Il l’invite naturellement à le suivre, car c’était sa proposition à la base. Seulement, les choses ont évolué pour lui. Il semble avoir rencontré quelqu’un. Peut-être a-t-il envie de se donner une chance avec ce dernier. Seulement, contre toute attente sa proposition est accueillie avec enthousiasme. C’est idiot, mais ça le ravit, lui arrache un sourire sincère alors qu’il vient boire une nouvelle gorgée de ce thé. Il vient déposer sa tasse sur la table basse lorsqu’il lui demande où il souhaite se rendre.

« Je n’y ai pas vraiment réfléchi, mais sans doute un endroit reculé, quelque part en montage ou proche d’une forêt où il serait possible de se perdre dans la nature. Je sais que je dois faire attention à mon genou, mais cela me fait du bien quand je marche. » Il lui indique alors qu’il vient s’allonger sur le canapé lit sur lequel ils sont assis.

Il glisse un de ses bras sur ses yeux pour se protéger les yeux. Il se rend compte que les draps tout comme le plaid est empreint de l’odeur d’Angel. C’est idiot et complètement logique puisqu’il occupe les lieux depuis quinze jours, mais cette pensée lui apporte un sentiment de bien-être.

« Il y a une montagne dans la région, le Mont Ritter. C’est vraiment joli. On devrait pouvoir trouver un chalet dans un endroit excentré pour y passer quelques jours, voire quelques semaines. Qu’en penses-tu ? » Il le questionne afin de se concentrer sur quelques choses de positifs, de laisser l’angoisse à l’orée de ses pensées.

Il veut profiter de cette mini parenthèse, même si ce n’est que quelques minutes, heures, car ça lui fait du bien de juste être là, avec Angel, envisageant les détails de ce voyage, qui pourrait leur permettre d’avancer, chacun à sa manière sans doute.  

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J’ai une pensée fugace pour mon amant de la veille lorsque l’idée de l’escapade vient dans notre conversation. J’avais accepté la proposition sans même y réfléchir. Sans même penser à lui. Parce que je savais, au fond de moi, que Elias passait avant tout. Avant lui également. La soirée avait pourtant été très appréciable. Il avait été charmant. Il était beau, bourré de qualités et un très beau coup au lit, mais même avec tout cela, quelque chose me manquait. Je ne savais pas quoi. Sans doute n’étais-je pas prêt ? Ou bien était-ce juste de la peur ? Du déni ? Ça ne serait pas la première fois, après tout. J’avais fuit les relations toute ma vie. C’était devenu pire encore depuis la mort de Lucia. Il n’y avait qu’Elias, qui faisait exception à la règle. Une exception que je taisais, pour le bien de tous. Par facilité. Par peur. Elias bougea, s’allongeant dans le lit canapé. Cette vision, à cet endroit, me provoqua des papillons dans le ventre. Un bien être que je préférais taire, une nouvelle fois.

« La montagne. J’aime l’idée. »

Je me glissais à ses côtés, m’allongeant en prenant appui contre mon bras, me laissant le loisir de l’observer.

« Ça me tente bien. Ça fait une éternité que je n’ai pas été dans ce genre d’endroits. J’aime beaucoup cette idée. »

Je mordais ma lèvre dans un mélange d’excitation et d’appréhension. Lui et moi, perdus dans les montagnes pendant des semaines ? C’était bien trop tentant pour que je refuse la proposition, même si une petite voix que je préférais taire me soufflait que ce serait de la torture, me concernant.

« Je pense que ça pourrait nous faire du bien. J’imagine déjà nos balades. Les fins de journées au coin du feu… » je me laissais aller à l’imagination. « Sans oublier les guimauves. Très important les guimauves. » ajoutais-je en un léger rire avant de me reprendre. « Quand veux-tu partir ? »

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(Tenue) Elias préfère concentré sur ce potentiel projet que ce qui se passe à l'extérieur de la dépendance. Le monde peut bien attendre. Il veut juste profiter de cette parenthèse avant d'avoir à affronter la réalité, la douleur, la tristesse et toutes les émotions que cela peut engendré. Angel est un compagnon idéal, d'humeur toujours égale. Il est un roc qui ne bouge pas qu'importe les tempêtes qui grognent autour de lui. Il est stable et il arrive toujours à l'ancrer à l'instant présent. Il l'accompagne dans ce projet, commente ses propositions qui semblent lui convenir. Il vient s'installer à ses côtés, sans rentrer dans son espace personnel, mais suffisamment pour qu'il est conscience de son poids qui pèse sur le matelas, de la chaleur que son corps dégage et qui lui rappele ce trouble. Cette agitation qu'il a ressenti au moment où la nécessité, les à contraint à envahir l'espace de l'autre. Celle qu'il a chercher à identifier sans y parvenir, mais il commence à en saisir quelques lignes même si elles sont confuses, car il doit traiter les données, mais n'a pas encore le luxe de le faire. L'instant est si apaisant et confortable. Il se sent terriblement bien. Un sentiment si rare. Il l'écoute attentivement, sa voix berce son esprit, l'ancre à ce moment sans qu'il puisse se disperser. Un sourire amusé ourle ses lippes alors qu'il lui jette un regard.

« Monsieur aurait-il été scout ou cela fait partie de ses souhaits jamais réalisés ?  » Il le taquine naturellement avant d'ajouter :  « Mais OK pour les guimauves et le feu de cheminé.  Les températures doivent être moins clémentes en haut. »

Il se fait la réflexion que ça ne sera pas désagréable, tant qu'ils puissent se réchauffer d'une manière ou d'une autre. Il réfléchit à sa dernière question. En vrai, il partirait sous le champ s'il s'écoutait, mais il fallait attendre quelques jours, le temps de tout préparer. Il inspire profondément, sentant la fatigue doucement le gagner, mais il ne se laisse pas sombrer.

« Le plus tôt possible, ce serait parfait. On pourrait regarder ce qui est vacant et réserver. Ensuite voir ce qu'on fait. Tant qu'il y a la nature et que c'est un peu excentré, ça me va. Je ne me sens pas encore assez à l'aise en société.  » Il lui indique simplement avant de conclure :  « Cela pourrait te convenir ? C'est peut être un peu trop tôt par rapport à ta relation avec ton amant ? »

Après tout, lui aussi a son mot à dire. Il ne se rend pas compte qu'il a buté sur les derniers mots, comme si cela le touchait de le faire. C'est juste un seconde d'arrêt, mettre un terme sur une relation qui ne le concerne en rien. Et pourtant, il sent que ça me pique quelque part, comme si ça le dérangeait. Ce qui était ridicule, mais ça c'était son problème.

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Soudain, l’ambiance entre nous n’a plus rien à voir avec ce qu’elle était. Elias sourit. Me taquine même, s’éloignant de plus en plus des larmes qu’il avait tant versé, il y avait encore quelques minutes à peine. Je préférais tellement le voir ainsi, même si je ne doutais pas une seule seconde que tout cela avait dû le fatiguer. Que la peine, le sentiment de colère et de trahison n’était pas loin. Mais tout cela, semblait rallier pour le moment à un autre temps. Ici, maintenant, cela n’avait plus lieu d’être. Seuls comptaient les sourires échangés, les regards brillants, l’évocation de cette escapade en montagne dont nous étions en train de dessiner les traits. J’avais déjà hâte d’y être.

« Ahah plutôt des souhaits jamais réalisés, je dois bien l’avouer. »

Mon regard s’égard dans le vide, méditant sur ses paroles. Il était vrai que j’avais une idée très romancée de la montagne. Cela pouvait paraître presque enfantin, d’un œil extérieur. Elias néanmoins était loin de me juger, comme toujours avec lui. Cela faisait partie de ses nombreuses qualités. Il me tire de mes pensées en répondant à ma seconde question. Le plus tôt possible, donc. Je lui souris comme une première réponse, marquant mon accord. La suite en revanche, me tire un regard quelque peu perplexe. Mon amant. Honte à moi, je l’avais presque oublié celui là. Presque aussitôt, les souvenirs de ma soirée me revenaient en tête, faisant naître un nouveau sourire sur mes lippes, cette fois bien plus nostalgique. Empli d’un éclat de bien être que je ne cachait pas, ne remarquant pas le trouble d’Elias. J’étais un amoureux de l’amour, après tout.

« Oh tu sais…. » je commençais en le lâchant du regard, laissant ma tête retomber contre le matelas. « On a passé un bon moment mais… Je ne sais pas. Quelque chose me manque. »

Une flamme, une passion, le petit quelque chose en plus qui ferait la différence. Cette chose, qui ferait que je le choisirais lui, plutôt qu’Elias. C’était stupide, je le savais. J’étais prêt à me torturer le cœur auprès de mon ami et passer à côté des prémisses d’une relation qui promettait monts et merveilles plutôt que de m’y plonger corps et âme. Le cœur avait ses raisons.

« Je le reverrais lorsque nous rentrerons, si il veut encore de moi. » concluais-je en relevant les yeux vers le bleu des siens. « On part quand tu veux. D’ailleurs, on a qu’à regarder tout de suite quand est-ce qu’il y a de la place. »

Je me relevais sans attendre plus longtemps, bondissant en dehors du canapé lit pour aller récupérer mon ordinateur à quelques pas de là, le ramenant auprès de lui. J’ouvrais la machine et commençait déjà à pianoter la recherche. Plus vite ce serait fait, plus vite nous pourrions nous projeter.

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(Tenue) Elias n’a pas réellement le temps d’analyser ce qu’il se passe en lui, en son ami, dans l’intervalle entre sa question et la réponse d’Angel. Il sent juste qu’il se passe quelque chose. Quoi ? Il l’ignore, mais il y a une pointe perceptible dans sa poitrine qui est déplaisante. Un peu comme si une aiguille se plantait à cet endroit. Un sentiment similaire à ce qu’il a ressenti à la découverte de l’existence de Kalen. L’intensité est beaucoup moindre, mais il se questionne sur son existence. Il ne devrait pas ressentir cela, ni même sentir que sa respiration se fait plus pesante. Il l’écoute, mais son bras vient masquer son regard dans un geste de pudeur, parce qu’il sent qu’il y a quelque chose d’étrange qui vient l’envahir. Elias garde le silence car il se sait quoi répondre à ces confidences qu’il lui fait. Il s’efforce de s’ancrer aux propos d’Angel pour éviter que sa curiosité ne prenne le contrôle. Ce serait une curiosité mal placée et surtout cela ne le regarde pas. Du moins, il craint les réponses. Un peu comme avec Lucy, lorsqu’il a évité d’aborder ce sujet d’une éventuelle nouvelle rencontre. Angel semble disposé à mettre cette relation entre parenthèse et il ne cherche pas à l’en dissuader, ni même à rebondir sur ses confidences. Les mots lui manquent. Il ne saurait pas bien sur quoi rebondir. En conséquence, lorsqu’Angel évoque le fait de regarder dès maintenant, il hoche succinctement la tête, dans une expression un peu hagarde.

« Bonne idée… » Il commente alors que son ami se redresse pour chercher son ordinateur et l’allumer.

De son côté, il vient se redresser, retrouve le bord du matelas pour s’emparer de la tasse, se refugier dans la texture tiède du liquide durant quelques secondes. Il finit par finir sa tasse, vient se rapprocher de la silhouette de son ami pour regarder par-dessus son épaule. Par ce biais, il s’immisce dans son espace, sa silhouette encore enroulée dans le plaid est une couverture appréciable. Il se sent encore fébrile, les mains froides, mais à la fois, il se sent bien, près de lui, résolument partagé entre deux eaux. Il préfère se concentrer sur les annonces de chalets disponibles. Ils doivent trouver le juste milieu, entre confort et qualité prix. Les choix sont multiples, car ils sont encore en basse saison, mais elles ne sont pas si nombreuses.

« Que penses-tu de celui-ci ? » Il le questionne en venant tendre sa main pour lui montrer l’image d’un chalet situé à Mammoth Lakes. « Cela à l’air d’être excentré de la ville. Le coût me semble raisonnable. » Il lui indique alors que ce dernier ouvre l’annonce et fait défiler le descriptif et les photos.

Cela pourrait leur convenir. A vrai, Elias n’a jamais été trop contraignant. Il a juste besoin de calme et de verdure. Il est prêt à s’adapter à tout.

« Qu’en penses-tu ? » Il questionne Angel en venant tourner son visage vers le sien, avant de prendre conscience qu’ils sont proches. Sans doute même trop.
Il s’éloigne donc dans un sourire d’excuse et réadapte une distance normale, mais ce n’est pas simple d’être a deux sur un petit écran.

« On pourrait utiliser ma voiture pour s’y rendre si ça ne te dérange pas de conduire. Je crains de ne pas être encore en mesure de gérer les imprévisibilités sur la route. » Il admet dans un ton las, parce que ça le travaille d’être dans cet état, mais il ne peut que le supporter, à défaut de parvenir à le surpasser.

Il doit apprendre à être patient. Il l’a toujours été, mais c’est une capacité qui semble lui faire de plus en plus défaut.  

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Je ne remarque pas, que mes réponses semblent plonger Elias dans un état particulier, bien trop absorbé par l’idée de notre voyage. Je reviens rapidement près de lui, me réinstallant confortablement sur le canapé lui à ses côtés avant de lancer la recherche. Je ne remarque pas tout de suite la proximité d’Elias juste derrière moi. Lorsque j’en prends conscience, je préfère ne pas faire la moindre réflexion, me contentant d’apprécier sa présence. C’est stupide. Ce n’est qu’un petit détail, quelque chose dont je devrais me moquer, mais c’est bien là, palpable. Les annonces défilent devant mes yeux avant qu’il ne m’arrête devant l’une d’elle, sur laquelle je clique pour en savoir plus.

« Ça a l’air grand. Ce n’est pas un peu trop pour nous deux ? »

Je fais défiler les photos. Il a raison, pour ce que c’est, le prix est raisonnable. Ça semble perdu dans la nature. Exactement ce qu’on cherche.

« Ça m’a l’air très bien équipé en tout cas. Avec ça c’est sûr qu’on sera tranquille. » je lui réponds avant qu’il ne tourne la tête en ma direction.

Mes lèvres s’entrouvrent naturellement en prenant conscience de sa présence bien trop proche de mon visage. Mes iris dévient sur ses lèvres sans que j’en ai conscience. Son souffle me provoque un frisson, avant qu’il ne s’éloigne finalement en un sourire. Mon regard dévie à son tour. Je reprend contenance, espérant qu’il n’ai rien remarqué.

« Oui, pas de soucis. Je t’avoue que je me voyais mal aller jusque là bas avec ma moto. Ce sera plus simple pour nos bagages, aussi. » dis-je en cliquant sur la réservation afin de voir les dates disponibles. Je relève soudain la tête en sa direction. « On pourrait peut-être la prendre avec nous, maintenant que j’y pense. Ça te plairait qu’on se fasse une virée en moto là-bas ? Ça doit être fantastique de rouler à travers les montagnes. »

Je le lui ai caché, mais c’était quelque chose que j’avais envie de faire avec lui, une virée en moto. L’idée m’était venue depuis le moment où je l’avais fait rapatrier ici, pour faciliter mes déplacements et éviter de toujours devoir prendre la voiture d’Elias. Restait à voir si l’idée le charmait autant qu’à moi. Je m’égarais à l’observer en attendant sa réponse. Il était mignon, ainsi enroulé dans le plaid que je lui avais donné. Ses cheveux étaient complètement sec à présent. Il ne tremblait plus, semblait bien plus apaisé.

« Tu as encore froid ? »

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(Tenue) Effectivement le chalet à l’air plutôt grand, mais a première vue, il est plutôt rare de trouver plus petit. A part s’ils décident de se rabattre sur un appartement en ville ou une tinyhouse.

« Je n’ai pas l’impression que le choix soit large si on tient à se tenir éloigner de la ville la plus proche. Cela peut-être un bon compromis. » Il commente, car à première vue, les annonces sont assez limitées à ce sujet.

Cependant, le cout est raisonnable. Alors naturellement, il demande son avis en se tournant vers lui. Il lui faut que quelques secondes pour se rendre compte qu’ils sont plus proches qu’ils ne le devraient. Il s’éloigne avant même d’avoir eu suffisamment le temps d’analyser ce qui s’est passé. Pourtant, l’éclat des prunelles d’Angel reste ancré dans ses rétines et son souffle contre sa peau tout autant. Le trouble est toujours aussi vivace que la dernière fois lorsque son front s’est posé contre le sien. Cette intimité est perturbante, mais il ne peut la nier désormais. Il se demande si Angel ressent la même chose à ce sujet. Il devrait lui poser la question pour en avoir le cœur net. Il sait cependant que ce n’est pas le genre de questions qui se posent naturellement. Alors, il s’abstient de tout commentaire à ce sujet, garde cela pour lui en attendant d’avoir la capacité d’en saisir véritablement le sens. Il préfère rebondir sur leur projet, lui proposer d’utiliser sa voiture et Angel lui répond naturellement. L’échange est fluide, comme il l’est toujours avec lui. Il le prend de court avec sa proposition. Une virée à moto ? Il n’est pas contre l’idée. Cela lui permettra d’obtenir un autre souvenir que le dernier en date, quand ils ont dérobé cette moto pour fuir le lieu de leur captivité. Angel semble tellement enthousiaste à cette idée qu’il ne désire pas envisager une autre réponse que d’accepter sa proposition.

« Cela devrait pouvoir se faire. Cela doit être différent sur une moto que dans une voiture. Cela devrait être plaisant. Je te fais confiance. » Il lui indique en venant doucement lui presser l’épaule quelques secondes. « On pourra louer une remorque pour ta moto. J’ai l’appareillage nécessaire sur ma voiture. » Il lui indique en venant resserrer les pans du plaid autour de ses épaules.

Il a bien envie de se laisser tenter par cette idée, ressentir de nouvelles choses tout en espérant avoir la capacité de les gérer. Il va devoir se faire confiance. La question d’Angel le ramène à l’instant présent.

« Je ne sais pas trop. Je me sens bien en dessous du plaid, il fait bien chaud. Je suis un petit vieux. » Il tente le trait de l’humour pour éviter d’appesantir l’instant. Il sent son téléphone vibrer, mais, il n’amorce pas de mouvement pour le regarder.

La parenthèse est peut-être en train de se refermer. Lucy va peut-être rentrer sous peu. Il évite d’y songer et préfère juste jeter un coup d’œil sur l’écran d’ordinateur en demandant.

« Du coup, il y aurait des disponibilités pour quoi ? » Il questionne, espérant que le destin joue en leur faveur.

Il a besoin de fuir la réalité, avec lui, juste profiter des bienfaits de cette bulle qu’il créé autour d’eux, car c’est tellement simple quand il est avec lui, même quand l’enfer leur lèche les pieds, il parvient à lui redonner de la force et du courage et cela fait tellement de bien.

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Sa réponse me tira un sourire comblé. Il était partant pour la virée à moto. Il me faisait confiance. À cet instant, il n’aurait pas pu me faire plus plaisir.

« Parfait. Tu verras, ça n’a rien à voir. L’adrénaline de la vitesse, les sensations, c’est complètement différent. »

Rien que d’y penser, j’en avais des frissons. J’avais hâte de partager ce moment avec lui. J’essayais de retenir un peu mon enthousiasme, n’oubliant pas le pourquoi de cette escapade. Avec un peu de chance, tout cela lui ferait oublier un peu Lucy et sa peine. A moins qu’il ne finisse par changer d’avis et qu’il me demande d’annuler à la dernière minute. Je me préparais aussi à cette éventualité, juste au cas où. Je fini par le questionner, curieux de savoir son état. Son trait d’humour me tire un rire franc.

« Cela explique pas mal de choses… » dis-je pour le taquiner.

Ma main glissa à sa rencontre pour ouvrir le plaid qu’il venait pourtant de rabattre sur lui. J’attrapais un bout de la couverture, que je fis passer au dessus de mes épaules pour la refermer sur moi, créant un cocon appréciateur.

« T’as raison, ça fait du bien. »

Était-ce à cause de la chaleur qui se dégageait de lui ? Ou bien du plaid ? Peu m’importait. Je me sentais bien ainsi. J’espérais que lui aussi. Je lui offrais un nouveau sourire, a l’instant même où son téléphone se mit à vibrer. Il y eu un instant de flottement. Je suis surpris qu’il n’y prête aucune attention mais me garde de faire le moindre commentaire pour revenir à la réservation.

« Il y a des disponibilités à partir de demain…  Si tu es pressé de partir, on pourrait y être demain soir. T’en penses quoi ? »

Je comprenais sans mal qu’il ai envie de partir, vite et loin, pour fuir tout de bordel qu’était devenu sa vie. Pourtant, il faudrait bien qu’il gère tout cela, à un moment où à un autre. Et en même temps, c’était sans doute plus simple pour lui, de le faire sans être coincé dans la même maison que Lucy et sa fille.

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(Tenue) Cette virée à moto tient très à cœur Angel. Il s’en rend compte face à l’enthousiasme qui le gagne et qui éclaire ses traits. Cela lui arrache un petit rire en coin. C’est plaisant de le voir si détendu et sans doute plus lui-même que jamais. Il est heureux pour lui. Sa bonhommie est appréciable, tant et si bien que lorsqu’il sent son téléphone vibrer, il n’est pas prompt à s’en saisir pour replonger le nez dans le merdier qu’est son existence. Il est prêt à repousser l’échéance, même si ce n’est qu’une heure supplémentaire. Il n’a pas envie de lire l’excuse qu’elle va lui fournir, savoir si elle va lui dire la vérité ou un mensonge, un mauvais concours de circonstances ou autre. Non, cela ne l’intéresse pas présentement. Du moins, il n’est pas encore prêt psychologiquement à le faire. En conséquence, il préfère répondre à la question de son ami, l’aborde sous un trait d’humour pour ne pas rendre l’instant plus pesant, car il perçoit la question sous-jacente, la réelle. Il préfère ne pas songer à ce qu’il ressent réellement à cet instant, tant que son esprit est alerte et en capacité de tenir ses émotions à l’orée de ses pensées.

« Eh ! C’est mon plaid. » Il le réprimande faussement avec un petit rictus en coin quand bien même par cette action, Angel se retrouve de nouveau plus proche de lui. « Ok, je t’en laisse un bout parce que tu le mérites et que je prends de la place chez toi. » Il poursuit en répondant à son sourire.

Il le questionne sur les disponibilités et obtient une réponse qui peut précipiter leurs départs. Ce qui peut que lui convenir. La chance est de leurs côtés et cela le rassure. A cet instant, il n’a plus qu’à se saisir de la perche qui est tendue, de se lancer dans une nouvelle aventure pour espérer pouvoir se retrouver. Sans doute qu’il devrait attendre son échange avec Lucy, songer à ce que son départ pourrait signifier pour Danielle, mais il se dit qu’il est peut-être temps qu’il se préoccupe de ce qu’il veut lui. Et il veut partir. Là, maintenant.

« Cela me semble être une bonne idée. Je suis prêt à l’idée de partir dès demain, tant que je peux quitter tout ça, même si c’est sans doute lâche, mais j’ai besoin de cette pause pour me retrouver. Peut-être qu’à mon retour, j’y verrai plus clair. On peut réserver si tu es prêt également. » Il lui indique en venant plonger ses iris bleues dans les siens, lui laissant la possibilité ou non de reporter leurs départs.  

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Ça me fait du bien, d’être dans cet état d’excitation. C’est sans doute déplacé, étant donné la situation mais je n’arrive pas à faire autrement. Tout cela me rempli bien plus de joie que mon rencard d’hier, alors même que j’avais passé une excellent moment avec l’homme dont j’avais partagé la couche. C’était différent. Être avec Elias était bien plus naturel que de flirter avec un inconnu. Lui me connaissait par cœur. Ou presque. Avec lui, je n’avais pas peur d’être moi-même. Je n’avais pas à me prêter au jeu de la séduction, puisque ça n’avait pas lieu d’être. Je pouvais juste profiter du moment présent et cela me rendait heureux. Aussi simple que ça.

« Sa majesté veut bien m’en donner un bout ? C’est trop d’honneur, vraiment. » dis-je en prenant un ton d’aristocrate.

La question du planning fini rapidement par être posée, plus importante pour lui que pour moi. Moi, j’étais prêt à le suivre, peu m’importais quand. Personne ne m’attendait nulle part. À part peut être mon amant, que je préviendrais en temps et en heure, sans pour autant lui dire que je partais en escapade avec Elias. Cela pourrait être mal interprété et je n’y tenais pas, même si je n’avais de compte à rendre à personne. Ses iris rencontrent les miennes alors qu’il se livre, explique son point de vue. Je ne peux que le comprendre. Sans doute ferais-je la même chose à sa place. Même si c’était lâche. Pour autant, j’ai bien du mal à le lui dire. Il a cet éclat dans ses yeux, qui a le don de me faire oublier jusqu’à mon nom.

« Oui… »

Un murmure. Juste un mot, dans un souffle. Le frisson qui me parcourra l’échine me ramena sur terre. Je fini par rompre le contact. Il fallait que je me reprenne.

« Faisons comme ça. J’irais chercher la remorque demain dans la matinée. » dis-je en cliquant sur la réservation pour que cela soit en ordre. « Tu veux partir combien de temps ? Deux semaines, plus ? »

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(Tenue) « Il m’arrive d’être clément. » Il lui indique simplement en haussant un sourcil avant de secouer la tête dans un mouvement d’assentiment, quelque peu amusé.  

Un peu de légèreté avant de devoir affronter la réalité. Une réalité qu’il est prompt à fuir. Ce qu’il ne manque pas d’exprimer à son ami. Il a conscience que c’est lâche de sa part, mais ça lui semble nécessaire, encore plus vu le contexte. Il n’est pas certain d’être en mesure de rester ici. Les souvenirs des dernières semaines ont été durs à vivre, malgré quelques accalmies. La conversation qu’il compte avoir avec Lucy, sera sans doute aussi pénible que celles qu’ils ont eu sur la plage mais cette fois-ci, il a pu compter sur la présence de son ami et se reposer sur lui. Ce qu’il n’a pas l’habitude de faire, mais qu’il accepte à ces côtés. Sa présence n’est pas un élément de plus à gérer dans son environnement, il y a toute sa place et il s’en rend plus ou moins conscience même si c’est une pensée fugace. Ses propos n’entendent pas vraiment de réponse. Il sait qu’il l’écoute et qu’il comprend ce qu’il peut ressentir à cet instant. Angel lui indique qu’ils pouvaient faire cela. Il ira chercher la remorque demain dans la matinée pour leur permettre de partir en tout début d’après-midi s’ils ne souhaitent pas arriver trop tard, mais cela n’a pas d’importance, à partir du moment qu’ils sont partis, le voyage a débuté. Deux semaines lui semblent bien.

« Deux semaines, cela peut-être bien. On pourra envisager de prolonger si on en ressent le besoin. Ce sera une coupure fort appréciable. » Il lui indique alors qu’il vient se saisir de son téléphone portable pour accéder à son compte en banque en ligne.

Bien sûr, son regard tombe sur le message de Lucy. Cela lui arrache un soupir de soulagement, car au moins, il sait qu’elle va bien. Ses doigts se crispent autour du téléphone, effet d’une irritation qui vient doucement pourlécher ses entrailles et ses pensées. Il n’y répond pas, quitte l’application de message pour rejoindre la banque en ligne.

« Je vais payer la réservation. J’ai mon numéro de carte sur l’application. » Il lui indique en venant se rendre sur l’application dans laquelle il rentre ses identifiants.

Il ne se formalise pas de lui donner de telles données, car il a déjà mis son existence entre les mains de cet homme et il en a pris soin, même encore aujourd’hui. En conséquence, il le laisse entrer les informations nécessaires. Sa main tremble légèrement alors qu’il lâche un second soupir.

« Elle va bien. Elle rentre sous peu. Peut-être est-elle déjà là. » Il informe son ami en venant enserrer le plaid plus fortement autour de ses épaules.

Il est dépossédé de toute envie de se lever, de quitter le contact chaleureux du plaid et réaffronter la pluie même sur une courte distance. Encore plus à cet instant, où il ignore s’il va parvenir à rester stable émotionnellement. Cette pensée l’effraie quelque peu, mais il ne peut éviter l’inévitable malheureusement.

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Heureusement, Elias ne semble pas avoir capté mon trouble. C’est une bonne chose. Il n’a pas besoin de ça. Je me sens presque honteux, d’avoir un tel comportement en sa présence, ici et maintenant. Mon euphorie retombe quelque peu. Qu’est-ce que ce sera, lorsque nous serons juste tous les deux, seuls en pleine montagne ? Ce n’est que pour deux semaines. Juste deux semaines. Ensuite, je suppose que je m’en irait. Elias aura besoin de calme, pour gérer tout ce qui se profile. Il n’aura sûrement pas besoin que je traîne dans ses pattes, même si je sais d’avance qu’il me dira le contraire. Il le faudra, de toute façon. Les dernières heures me l’ont encore prouvées. J’avais beau avoir eu mon rencard, il me faisait toujours de l’effet. Les sentiments que je redoutais d’avoir pour lui étaient là, bien présents et je refusais de détruire la belle amitié que nous avions construit. Le mieux était de me retirer, tant qu’il en était encore temps.

« Va pour deux semaines. »

Je l’observais s’emparer de son téléphone, découvrir le message tant redouté. Il soupire sans émettre le moindre commentaire. Je me retiens de lui demander quoi que ce soit, bien trop respectueux de sa vie privée. Si il avait envie de m’en parler, il le ferait de lui même. Je me détourne pour rentrer pour les données qu’il m’indique, confirmant ainsi notre réservation. Demain soir, nous serons à la montagne. Demain soir, nous serons loin de cet enfer sentimental.

« C’est fait. »

Je relève la tête lorsqu’Elias reprend la parole. Il fini par m’informer du fameux message. Je lui réponds d’un faible sourire, apposant ma main sur son épaule pour tout réconfort.

« C’est une bonne chose. »

Il n’y a rien à dire d’autre. Je vois bien qu’il repousse le moment fatidique. Tout en lui me le prouve.

« Si tu préfères rester ici, tu peux. Je peux me trouver un endroit pour la nuit. Je comprends que tu ne veuilles pas rentrer. »

Je lançais ma proposition, conscient qu’il devra tout de même affronter son épouse à un moment ou à un autre.

« Je suis là, si jamais ça ne va pas. »

J’essayais de lui transmettre tout le courage que je pouvais avoir. Je serais là, peu importe comment l’affrontement de passerait.

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(Tenue) La réservation est faite. Le projet se concrétise et il se dit que c’est sans doute la bonne nouvelle de la journée. Un point positif dans ses ténèbres qui ne disparaissent jamais totalement, mais dont la présence est moins menaçante lorsque l’aura apaisante d’Angel est à ses côtés. Une appréciable bulle de laquelle il ne désire pas s’extirper. Malgré l’arrivée imminente de Lucy qui lui rappelle que les émotions sont là, toujours, simplement atténuées par cette sérénité qu’Angel lui apporte. Angel semble percevoir ce trouble qui l’assaille de nouveau. Il lui propose une alternative. Une alternative où il fuit la rencontre, où Angel s’éclipse pour potentiellement retrouver cet homme qui a partagé ses draps. Une pensée fugace qui ravive ce sentiment de tiraillement dans sa poitrine. Emotion saugrenue dans un tel moment, encore plus lorsque les possibilités effleurent son esprit. Sans en prendre conscience, peut-être que son regard se voile d’une curieuse lueur, aussi fugace est-elle, mais il capte qu’il est différent.

« Non. Il le faut. Je ne peux pas fuir continuellement. » Il indique en venant relâcher la pression du plaid autour de ses épaules pour s’extraire de sa chaleur.

Son épiderme se parsème de frisons au contraste entre la chaleur qui le recouvrait et la température ambiante de la salle. Il vient doucement presser l’épaule de son ami dans une douce caresse avant de s’éloigner, de se redresser. Le mouvement est lent, car il doit assurer son équilibre avec son genou abimé, qui semble rigide après tant d’heures d’inaction.

« Merci pour tout, Angel. Je suis heureux de t’avoir à mes côtés. » Il lui indique en venant se tourner vers lui en lui offrant un sourire reconnaissant.

« Souhaite-moi bonne chance. » Il lui indique dans un soupir alors qu’il vient prendre une grande inspiration en se dirigeant vers la porte, s’extirpant de la dépendance pour retrouver la fraicheur de cette nuit pluvieuse.

Une page est sur le point de se terminer. Une nouvelle est sur le point de débuter, sans que rien ne soit certain concernant son avancée. C’est dans un état quelque peu second qu’il traverse le jardin pour rejoindre sa demeure. Une demeure qu’il a tant aimé par le passé, mais qui lui laisse une saveur âpre en bouche désormais. Sans doute parce qu’il n’y a plus rien qui soit conforme au passé. Ni elle, ni lui et que cet amour qui les a tant liés s’est délité, n’est plus qu’une chimère et cette pensée est aliénante, mais il doit y faire face, l’accepter puisqu’il n’y a plus de retour possible en arrière. Ils doivent désormais ramassés les pots cassés.